C’est un président Abdoulaye Wade, à la popularité toujours intacte, qui a reçu mercredi 29 mars 2006, au siège de la présidence, Toufiq Ibrahimi, P-DG de la Comanav, accompagné de Moha Ouali Tagma, ambassadeur du Royaume du Maroc pour le Sénégal, la Gambie et le Cap Vert.
Hasard du calendrier ou heureux présage, cette entrevue au Palais présidentiel, sis à l’avenue Leopold Senghors, a lieu le jour même où au siège de la Cosec (Conseil national des chargeurs sénégalais), l’on précédait à l’ouverture des plis pour le choix du cabinet conseil devant accompagner le projet de la liaison maritime entre Tanger, Casablanca, Nouadhibou, Saint-Louis et Dakar.
Un projet qui, contrairement à ceux du Nepad, « des milliards de francs CFA dépensés dans les colloques et les voyages et pas un kilomètre de route construit», disait Wade il y a quelques semaines dans un journal
français, passe au stade du concret.
L’intérêt pour les trois pays est évident, analyse Djibo Ka, ministre du Transport international, qui a reçu longuement la délégation marocaine. «Avec Tanger-Med, le projet de liaison maritime sera encore plus solide», poursuit cette grande figure de la politique sénégalais, qui a survécu aux trois présidents qu’a connus le pays.
Ce grand chantier du détroit oblige les consultants à réviser leurs études et à reconsidérer les perspectives de la route maritime allant du Cap Spartel au phare des Mamelles (point le plus élevé de Dakar) sous un nouvel angle.
Longtemps sceptiques quant au rendement de cet investissement, les institutions internationales se rallient désormais en masse à cette initiative ambitieuse. A l’heure où le président Wade discutait des diverses opportunités offertes par ces projets, une dizaine de cabinets spécialisés dont le londonien Drawry (finalement retenu en même temps qu’un cabinet sénégalais) espéraient être qualifiés pour la réalisation du business-plan.
Plate-forme de l’Afrique de l’Ouest, le Sénégal qui aligne une croissance moyenne de 6% depuis l’avènement
de l’Alternance en 2000, se prépare aux rendez-vous de demain en construisant des routes et des ponts. A l’image de la capitale Dakar, dont les travaux de construction d’une grande autoroute à huit voies ont commencé, tout le pays est en chantier. Mais le décollage économique tant attendu se heurte au manque d’infrastructures.
Aussi, désengorger la capitale reste l’une des préoccupations principales de l’homme du Nepad qui, selon ses fervents supporters, a mis fin à quarante ans d’immobilisme,.. Ces routes, le secteur touristique, première source de devises au pays de la Terranga, en appelle de ses vœux.
Aujourd’hui, entre Dakar et la petite côte de Sally (première destination touristique du pays), distantes de seulement 80 kilomètres, les autobus mettent cinq heures, dont deux sur un petit cordon urbain de 26 kilomètres à l’intérieur de Dakar. Comme le témoigne le directeur général de la Compagnie fruitière, le rythme d’acheminement des conteneurs de la zone industrielle vers les ports, est de plus en plus lent; c’est un véritable frein pour le développement».
L’oxygène pourrait sans doute venir de la mer, avec des bateaux-taxi, opérant des navettes rapides entre le centre et les zones périphériques comme Pikine. L’idée émise par les
dirigeants de la SOMAT, en s’inspirant notamment du mode de desserte à Abidjan, fait son chemin dans les différents cercles du gouvernement Wade. Reste à l’asseoir.La SOMAT est prête à s’investir, pourvu que l’Etat sénégalais mette en place l’infrastructure nécessaire, des quais et des rampes amovibles.
Sur le plan intérieur, différents chantiers sont aussi ouverts, pour relier Dakar au reste du pays. Si avec le Nord, les infrastructures sont suffisantes, par contre, avec le Sud, les défis sont énormes. Relier Dakar à Ziguinchor restait donc l’un des objectifs majeurs de Wade. La mise en place de la ligne maritime gèrée par la SOMAT vient donc combler un grand vide.
L’acte fondateur de cette grande entreprise a été paraphé par les deux chefs d’Etat, ici même à Dakar, en mars 2005. La SOMAT, qui n’a finalement démarré ses activités que le 11 novembre 2005, est aujourd’hui entré dans ce que M. Ibrahimi appelle, «une phase de perspective économique ». Autrement dit, explique le président de la Comanav, « prospecter d’autres pistes économiquement rentables ».
A commencer par le fret.
Le dernier conseil d’administration de la SOMAT a validé un projet dans ce sens. Un navire roulier permettrait aux camions, obligés de traverser la Gambie, avec des phases arrêt de cinq heures en moyenne, de bénéficier de liaisons sécurisées, et d’optimiser leur exploitation. «La majeure partie de la récolte fruitière de la Casamance, soit 22 000 tonnes pour la seule mangue », ne pouvait être dégagée, faute d’infrastructures, commente un responsable ministériel. Conséquences : seules 2 200 tonnes parvenaient à être exportées. Les pertes sont énormes.