Le marché de l’assurance a été ouvert à la concurrence depuis l’entrée en vigueur de la première loi n°06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence.
Le fonctionnement concurrentiel du marché de l’assurance au Maroc est passé au peigne fin par le Conseil de la concurrence. Un avis a été émis dans ce sens et ce conformément aux dispositions de la loi n° 20-13 relative au Conseil de la concurrence. D’après le constat établi, le Conseil a relevé que le marché est «fortement» réglementé par un arsenal juridique, réglementaire et normatif composé d’un ensemble de lois, de décrets et arrêtés ainsi que des circulaires de l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS). « Malgré cet encadrement, le marché de l’assurance a été ouvert à la concurrence depuis l’entrée en vigueur de la première loi n° 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence et ce, par la libéralisation des taux de commissionnement des intermédiaires en 2001 et du tarif de toutes les branches de l’assurance en 2006 », fait savoir le Conseil de la concurrence dans son avis. Parmi les éléments relevés dans ce sens, l’avis met l’accent sur une invisibilité par rapport au délai de traitement des agréments permettant la pratique des opérations d’assurance et par les entreprises des assurances et de réassurances (EAR) et des conditions de sortie accordant « un pouvoir discrétionnaire et disproportionné au régulateur sectoriel ». De même, le Conseil souligne l’existence « d’un système d’agrément hybride accordant un avantage concurrentiel substantiel pour les assureurs mixtes, ainsi qu’une offre non adaptée à l’assurance inclusive ». Pour ce qui est de l’offre, elle ressort, selon le Conseil de la concurrence, « insuffisamment innovante » avec une présence de segments d’assurance fragiles et un potentiel inexploité du canal de la bancassurance.
Vers l’assouplissement des conditions d’accès
Tenant compte de ces constats, le Conseil de la concurrence appelle à l’assouplissement des conditions d’accès et de sortie des différents opérateurs de ce marché. Il est dans ce sens recommandé d’ajuster les exigences légales d’accès au marché de l’assurance et les intégrer dans des textes réglementaires pour faciliter les amendements. « Les exigences légales pour l’obtention de l’agrément permettant la pratique des opérations d’assurance et de réassurance (50 millions de dirhams de capital social pour les SA et 50 millions de dirhams de fonds d’établissement et un nombre minimum de 10.000 sociétaires pour les SAM) constituent des barrières à l’entrée au marché de l’assurance, notamment pour les petites et moyennes entreprises », peut-on lire dans l’avis du Conseil de la concurrence. Il est également question d’intégrer une disposition juridique fixant le délai de réponse par l’ACAPS aux demandes d’agrément pour la pratique des opérations d’assurances et de réassurance. « L’absence de cette disposition légale au niveau du cadre juridique encadrant le secteur des assurance constitue une barrière d’accès à ce marché pour les investisseurs qui ont besoin de visibilité, de transparence et de sécurité juridique concernant le système d’agrément », fait savoir le Conseil à ce propos. Parmi les recommandations émises figure également la refonte du système d’agrément des intermédiaires d’assurance et ce compte tenu des insuffisances présentées par le système actuel et ce aussi bien pour les entreprises des assurances et de réassurances que pour les personnes souhaitant accéder à ce marché. Le Conseil propose en outre de détailler davantage les conditions de retrait des agréments par l’ACAPS. «le code des assurances stipule que l’ACAPS peut retirer partiellement ou totalement l’agrément à une entreprise d’assurance et de réassurance lorsque l’intérêt général l’exige. Il y a lieu de noter que le concept de l’intérêt général est très vague et laisse à l’ACAPS un pouvoir discrétionnaire pour évaluer et décider du retrait de l’agrément», retient-on du Conseil de la concurrence qui insiste sur la définition exacte de l’intérêt général. Le Conseil appelle également à ce propos à limiter les contours de ce concept afin de donner plus de visibilité et de sécurité juridique aux opérateurs économiques.
L’amélioration de l’offre assurantielle est de mise
Le Conseil a également mis l’accent sur la nécessité d’améliorer l’offre assurantielle au niveau national. Le Conseil plaide dans ce sens pour une réforme légale en vue de corriger l’avantage concurrentiel découlant de la spécialisation des assureurs. Il est également proposé d’ouvrir progressivement l’assurance non-vie au secteur bancaire, de développer une offre assurantielle inclusive et innovante et digitaliser les contrats d’assurance ainsi que de digitaliser la distribution des produits d’assurance et dématérialiser les contrats d’assurance et renforcer l’étanchéité des différents segments d’assurance et mettre fin à la compensation. Le Conseil de la concurrence a aussi appelé à développer davantage la compétition dans le segment de la responsabilité civile (RC) automobile, d’instaurer l’obligation du paiement direct de la prime à l’entreprise d’assurance et de réassurance ainsi que d’améliorer la régulation sectorielle et encadrer les missions des regroupements professionnels. Sur ce dernier point il y a lieu d’encadrer l’intervention des associations professionnelles au niveau des instances consultatives de l’ACAPS, de revoir les missions de la Fédération marocaine de l’assurance (FMA) au vu du rôle déterminant qu’elle joue dans le secteur ainsi que d’améliorer la transparence en matière de désignation de l’association représentant les intermédiaires d’assurance.
La position du consommateur à renforcer davantage
En vue d’améliorer la protection du consommateur de l’assurance, le Conseil de la concurrence a mis l’accent sur la nécessité de renforcer la position du consommateur dans sa relation contractuelle avec l’assureur et améliorer la qualité des prestations d’assurance. La finalité étant de garantir l’information des citoyens sur les caractéristiques des offres de couverture disponibles en vue de leur permettre de prendre des décisions éclairées concernant leurs contrats d’assurance et sur les modalités pratiques d’exécution desdits contrats. Il est également question de renforcer à la fois les modalités de traitement des sinistres et d’exécution des contrats en uniformisant le processus de leur traitement ainsi que la protection du consommateur, notamment en matière de la vente liée des produits d’assurance. Le Conseil propose en parallèle d’encadrer juridiquement la fonction des experts en assurance automobile en veillant à renforcer leur qualification et leur impartialité. Il est également question d’améliorer la médiation en assurance en confiant la gestion de la médiation en assurance à l’ACAPS à l’instar du médiateur bancaire qui est géré par Bank Al-Maghrib et facturer sa rémunération aux entreprises des assurances et de réassurances. Ceci passe en outre par la réglementation de la médiation en assurance à travers l’insertion des dispositions relatives au niveau du code des assurances, pour qu’elle gagne en crédibilité et en force d’intervention ainsi que la digitalisation du processus de médiation depuis le dépôt de la requête jusqu’à la prise de décision, pour simplifier la procédure de médiation et faciliter la tâche aux consommateurs. Dans le même sillage, le Conseil recommande de réglementer la fonction des comparateurs d’assurance. L’ambition étant d’optimiser leur valeur ajoutée au niveau du secteur et de protéger le consommateur contre les pratiques trompeuses éventuelles liées à ce service.