Economie

Génériques : l’OMC piégée

«Ceci est un accord historique pour l’OMC ». C’est en ces termes que s’est exprimé le directeur général de l’Organisation mondiale du commerce, Supachai Panitchpakdi, commentant l’approbation, enfin, par cette instance d’un accord jugé vital pour les pays pauvres concernant la fourniture de médicaments génériques contre les maladies infectieuses. Une approbation qui a eu lieu samedi matin, après cinq jours de négociations laborieuses. Concrètement, les pays pauvres pourront importer plus facilement des médicaments génériques meilleur marché, s’ils ne peuvent pas les fabriquer eux-mêmes. Une avancée? certes, mais il s’agit plus d’un compromis que d’un véritable acquis pour les pays en développement. Et pour cause, si la crédibilité de l’organisation, qui était en jeu, a pu être conservée, les intérêts des grands lobbies, constitués essentiellement pas les laboratoires et grandes firmes pharmaceutiques américains, l’ont également été. Ce compromis s’arrête là où commencent les véritables enjeux touchant aux intérêts de ces derniers. Important pour les pays touchés par de graves maladies endémiques, comme la malaria, la tuberculose ou le sida, cet accord n’en lèse pas moins d’autres pays. «L’accord d’aujourd’hui va dans le sens de ce que voulaient les Etats-Unis et leur industrie pharmaceutique, malheureusement il n’apporte que peu de réconfort pour les patients pauvres, les règles de brevets vont continuer à pousser le prix des médicaments à la hausse», ont indiqué des ONG dans un communiqué commun relayé par l’AFP. Bien que légitime, la volonté des grands groupes pharmaceutiques de conserver leur mainmise sur cette industrie pénalise à plus d’un titre à la fois les économies et les populations des pays sous-développés. L’accès à des médicaments bon marché est une question de vie ou de mort des millions de gens dans le monde, dont quelque 30 millions d’Africains souffrant du sida, selon des chiffres de l’ONU. Signataire de ces accords, le Maroc est désormais tenu de respecter le système des brevets, d’une durée de 20 ans, régissant l’industrie pharmaceutique. « Auparavant, les laboratoires marocains pouvaient faire toutes les copies de n’importe quel médicament, même ceux qui étaient sous générique ailleurs. Après l’application de cette loi (le Dahir limitatif, paru en février 2000) ils ne pourraient plus reproduire les produits qui sont encore sous brevet… Le problème qui se pose actuellement est qu’à travers les discussions en cours au sein de l’OMC, ces grandes multinationales essayent de prolonger la durée de ces brevets, et ce de deux manières», nous avait déclaré Abdellah Filali Lahlou, P-DG de Pharma5 et secrétaire général de l’Association marocaine de l’industrie pharmaceutique (AMIP). La première se rapporte aux données confidentielles non-divulguées, stipulant que le générique produit ne doit pas utiliser de formule ou donnée confidentielles, alors que la seconde concerne les données complémentaires, c’est-à-dire, les médicaments qui constituent des compléments de traitement à des maladies autres que celles pour lesquelles ils ont été produits. Les deux contraintes combinées, le Maroc dont 80% des médicaments disponibles au sont produits localement, avec environ 10% constitués de médicaments génériques, se trouvera dans l’obligation d’importer ces produits plutôt que de les produire. Quand on sait que plus de 40% des achats en médicaments de l’Etat marocain sont constitués de génériques, et que les économies générées annuellement s’élèvent à 260 millions DH annuellement, on peut facilement imaginer l’impact que cet accord aura sur notre pays. Les médicaments disponibles dans les hôpitaux marocains sont des génériques à hauteur de 50%. C’est dire que cette nouvelle législation va pénaliser essentiellement le malade. Les génériques sont généralement 30% moins chers que les molécules mères. L’industrie pharmaceutique nationale quant à elle encourt le danger du recours systématique à l’importation de produits pharmaceutiques étrangers, ce qui posera à moyen et long termes, le problème de sa compétitivité.

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