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Inclusion financière post-Covid au Maroc : La BERD soutient l’entrepreneuriat féminin

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L’accès au financement reste la principale difficulté rencontrée par les femmes entrepreneurs. Au Maroc, une meilleure insertion de la femme dans l’économie nationale pourrait permettre au pays de sortir de l’impasse de crise imposée par la Covid-19 et franchir un cap important vers le développement.

C’est dans ce sens que le webinaire «Inclusion financière des femmes au Maroc: Challenges et opportunités post-Covid-19» a été organisé par la Banque européenne pour l’investissement et le développement (BERD) le 10 novembre 2020 dans le cadre de «Back to Business Initiative». Cette initiative vise à émettre des recommandations destinées aux acteurs économiques pour la relance de l’économie dans la période post-Covid-19. Ont pris part à cet évènement plusieurs responsables de diverses institutions (BERD, AFEM, ONU-femmes, l’UE au Maroc, Women in Africa, Bank Al-Maghrib, Groupe BNP-Paribas, Groupe BMCE).

Etat des lieux et actions de la BERD

Pour Marie Alexandra Veilleux-Laborie, directrice de la BERD au Maroc, le Maroc a enregistré d’importants progrès depuis plusieurs années, notamment en termes d’accessibilité du secteur financier formel, d’éducation financière ou encore de financement des entreprises. Néanmoins, il y a plusieurs segments de la population qui demeurent quasi exclus du système financier. A cet égard elle rappelle que seul 1 adulte sur 3 au Maroc est titulaire d’un compte bancaire auprès d’une institution formelle comparativement à 1 adulte sur 2 dans la région MENA. Certains segments sont plus en reste et celui des femmes plus particulièrement. Se référant à une étude menée par Bank Al-Maghrib en 2017, moins de 20% des femmes de moins de 25 ans disposent d’un compte bancaire. Elles ne sont que 3% à faire de l’épargne et seulement 2% à avoir accès au crédit bancaire. Les disparités sont encore plus accentuées entre le milieu urbain et le milieu rural. Au niveau de la BERD, l’inclusion financière fait partie de ses opérations et constitue un des axes majeurs de sa stratégie 2025. «Nous sommes fortement engagés et déterminés à soutenir l’entrepreneuriat féminin et l’inclusion dont l’inclusion financière des femmes. Avec la crise actuelle (sanitaire, économique et sociale), la BERD a actualisé sa politique genre en l’adaptant au nouveau contexte et cette politique s’articule autour de trois axes.

Le premier consiste à apporter une assistance technique axée sur la planification du travail auprès du secteur privé mais aussi des autorités locales et l’objectif est de mettre en place des mesures efficaces et inclusives sur le marché du travail pour préserver le capital humain dans le cadre de la crise de Covid-19. Concernant le deuxième axe, nous mettons à disposition une boîte à outils et des conseils pour assurer les services d’infrastructures inclusifs et orientés genre durant cette période de crise et post-crise. Enfin notre politique genre introduit des politiques dédiées qui permettent d’accroître la résilience des femmes entrepreneurs durant cette période de crise et par la suite», relève la responsable. La composante genre est incluse dans la partie financement de l’économie verte (stratégie de la BERD). Cette démarche est soutenue par le Fonds vert pour le climat. «Concrètement cela se traduit par une trentaine de projets financés ayant une composante genre simplement cette année», ajoute-t-elle. La Banque travaille également sur le volet accompagnement en formant les porteurs de projets et les jeunes entrepreneurs, notamment les femmes. «Depuis le début de la pandémie nous avons accompagné et formé plus de 700 PME de manière complètement digitalisée et nous avons accompagné plus de 70 entrepreneurs femmes. Nous avons aussi coaché et mentoré une vingtaine de femmes chefs d’entreprises. De même, nous avons déployé un demi-million d’euros dans cette action-là», conclut Marie Alexandra Veilleux-Laborie.

Régler le problème de l’exclusion financière : Appel à une stratégie nationale pour la femme

Au cours de cet échange, Leila Doukali, présidente de l’AFEM, a mis l’accent sur la nécessité de mettre une place une véritable stratégie nationale de soutien pour la femme. Résiliente, la femme participe incontestablement à la relance économique malgré le coup porté par la Covid-19. La présidente de l’AFEM a souligné que «parmi les freins qui sont liés à la création d’entreprises, l’accès du financement est en haut de la liste. En effet, la femme marocaine a rarement des garanties à offrir aux institutions bancaires et ne dispose pas toujours de la mise au départ en apport personnel. Relever le défi de l’inclusion financière de la femme est un véritable challenge si l’on veut réussir le pari d’un nouveau modèle de développement pour notre pays et je peux dire aujourd’hui que malheureusement c’est loin d’être gagné». Elle a rappelé dans ce cadre le constat actuel qui fait état d’un taux d’octroi de financement en baisse de 8% pour les TPME en 2018. «Malheureusement beaucoup de ces femmes chefs d’entreprises au Maroc sont des TPME. On ne cesse de dire que les TPME sont le poumon économique de notre pays, il serait temps qu’on les accompagne comme il se doit mais avant tout on ne peut pas parler d’inclusion financière sans régler le problème d’exclusion financière», ajoute-t-elle.

Cela se traduit par les statistiques. «Au Maroc, le taux de création d’entreprises par les femmes a reculé. En 2015, il était à hauteur de 12%, ce qui était déjà un niveau faible et en 2018, nous sommes à 10%». Laila Doukali est également revenue sur les blocages à l’accès au financement dans le monde par les femmes. Elle a évoqué à cet égard le manque de confiance des investisseurs. Par ailleurs, les disparités au niveau territorial au Maroc persistent, notamment dans le rural où beaucoup de femmes portent leurs familles et ont besoin de soutien financier. L’acte d’entreprendre au Maroc pour la femme est un véritable parcours du combattant du fait aussi de son environnement social. «Les institutions bancaires devraient mettre en place une stratégie d’accompagnement et d’encouragement de création d’entreprise par la femme. Elle est rigoureuse cette femme. Elle est audacieuse et elle est surtout solvable. La femme marocaine souhaite de plus en plus son autonomie financière et son émancipation», conclut-elle.

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Un enjeu crucial pour le Maroc

Pour Sophia Benamar, responsable de programme au sein d’ONU-Femmes il y a un vrai intérêt économique à autonomiser les femmes et à leur permettre d’avoir un accès au financement. «ONU-femmes a accompagné le gouvernement marocain pour la publication d’un plan intégré d’autonomisation économique avec une vision très claire à l’horizon 2030».

La responsable onusienne a indiqué par ailleurs qu’au-delà des obstacles à l’accès aux services financiers, il faut s’assurer que ces derniers sont adaptés et abordables, qu’ils prennent en compte les besoins des femmes, et les barrières réglementaires et sociales qui existent pour les femmes marocaines. Pour elle, il faut également accroître les connaissances des femmes par la formation afin qu’elles puissent savoir utiliser les mécanismes de financement.

Parallèlement, la diversification des produits financiers est nécessaire. Elle relève aussi le fait que les systèmes d’évaluation des crédits et les systèmes de garanties doivent être plus adaptés à la situation des femmes. Dans le même sens, elle préconise d’accélérer la numérisation des services financiers pour permettre une meilleure inclusion des femmes à l’image de certaines success stories en Afrique.

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