Economie

La Grande-Bretagne nationalise Bradford & Bingley

La crise financière ne cesse de faire des victimes au Royaume-Uni, où le gouvernement, tirant les leçons de la lente agonie de Northern Rock, a nationalisé lundi la banque en difficulté Bradford & Bingley, et cédé ses meilleurs actifs au groupe espagnol Santander. B&B est le quatrième établissement de la City à faire les frais de la crise du crédit depuis le début de l’année. Sa nationalisation suit celle de Northern Rock en février, le rachat en catastrophe de HBOS par sa rivale Lloyds TSB, annoncé il y a deux semaines, et celui d’Alliance & Leicester, vendue également en urgence à Santander. Accusés d’avoir tergiversé lors du sauvetage de Northern Rock, qu’ils ne se sont résolus à nationaliser à contrecoeur qu’après cinq mois de crise, le Premier ministre Gordon Brown et son chancelier (ministre des Finances) Alistair Darling ont cette fois pris le taureau par les cornes.
En accord avec la Banque d’Angleterre et l’Autorité des services financiers, les meilleurs actifs de B&B ont été cédés pour 612 millions de livres (773 millions d’euros) à Santander, et ses 20 milliards de livres de dépôts ont été transférés à sa filiale britannique Abbey. L’Etat, qui a donné sa garantie au transfert, conserve quant à lui la partie la plus risquée de B&B: son portefeuille de prêts, qui inclut 41 milliards de livres de crédits immobiliers. Comme Northern Rock, sa rivale tristement célèbre, B&B est une ancienne société mutualiste d’épargne immobilière (« building society ») remontant au XIXe siècle. Comme elle, Bradford & Bingley avait jeté aux orties son statut mutualiste et cédé aux sirènes du privé, en se transformant en 2000 en une banque cotée en Bourse. Comme elle, son passage dans le secteur privé a été suivi d’une ascension fulgurante, qui l’a vue se hisser au rang de numéro un du marché des prêts à l’investissement locatif, une activité aujourd’hui sinistrée par l’éclatement de la bulle immobilière en Grande-Bretagne. Et comme sa rivale de Newcastle, B&B s’est retrouvée doublement sanctionnée par la crise du crédit. L’établissement a vu ses comptes plonger dans le rouge sous l’effet du renchérissement brutal de son financement, et son cours de Bourse a été divisé par 15 sur les douze derniers mois. Et B&B, après avoir échoué à faire entrer à son tour de table le riche fonds d’investissement américain TPG, un moment tenté de jouer les chevaliers blancs, a eu le plus grand mal à boucler un plan de recapitalisation de 400 millions de livres.
Peine perdue, l’aggravation de la crise financière à Wall Street, qui a encore augmenté ses coûts de refinancement, a entraîné ces derniers jours son cours de Bourse dans une nouvelle spirale baissière, et Bradford & Bingley a dû annoncer jeudi la suppression de plus de 10% de ses effectifs, sans parvenir à enrayer sa chute. Le chancelier Alistair Darling a défendu la nationalisation de la banque qui, comme le plan de sauvetage américain, verra «ce bon vieux contribuable racheter les déchets toxiques», selon l’expression de Mike Estrey, directeur de la recherche de la maison de courtage Fyshe. «Le gouvernement a pris des mesures rapides et décisives pour soutenir le système (bancaire), qui aurait été complètement déstabilisé si on avait laissé Bradford & Bingley s’effondrer», a déclaré M. Darling à la BBC.
Pendant que le contribuable risque de payer les pots cassés, Santander semble réaliser une très bonne affaire. En additionnant les actifs d’Abbey, d’A&L et ceux de B&B (dont il conservera l’enseigne), le groupe espagnol contrôlera 10% du marché bancaire, où il comptera 1.286 succursales et 24 millions de clients.


•  Frédéric Pouchot (AFP)

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