Le souci d’assurer une interconnexion entre les bassins hydrauliques pour une meilleure distribution de l’eau reflète les préoccupations du Royaume à garantir un approvisionnement continu en eau potable et d’irrigation.
Crise hydrique : Les changements climatiques ont carrément bouleversé le rapport des êtres humains à l’eau en tant que ressource vitale. Un peu partout sur le globe terrestre, les pénuries sont en excès et les catastrophes se multiplient. Le Maroc ne fait pas exception à la règle et développe plusieurs alternatives pour affronter la réalité.
A cause d’un certain nombre de facteurs naturels et humains, notre pays traverse une crise hydrique avec une diminution alarmante des ressources en eau, passant de 2.560 m³ en 1960 à seulement 606 m³ en début 2024. Avant tout il faut souligner la vision claire et pertinente de SM le Roi Mohammed VI vis-à-vis de la problématique de l’eau, sa rareté et l’optimisation de son utilisation (voir encadré). En plus de son importance vitale à l’existence humaine à un moment où l’insécurité alimentaire est une question pressante à l’échelle internationale, l’eau joue un rôle fondamental dans plusieurs secteurs d’activité. De l’avis des experts, le souci d’assurer une interconnexion entre les bassins hydrauliques pour une meilleure distribution de l’eau reflète les préoccupations du Royaume à garantir un approvisionnement continu en eau potable et d’irrigation. Il ne faut pas non plus oublier le chantier de développement des stations de dessalement de l’eau de mer lancé par le Maroc considéré extrêmement pertinent, en raison de la rareté de cette ressource vitale, relevant l’importance de ce genre de projets pour tout pays, en misant sur les investissements dans les nouvelles technologies dédiées.
Cela dit, les formes inédites des changements climatiques ces dernières années suscitent une grande crainte universelle : des sols craquelés dans la Corne de l’Afrique, le blizzard recouvrant de neige les palmiers à Los Angeles ou encore les gondoles de Venise gisant dans des canaux asséchés. Sous l’impulsion Royale donc, le gouvernement marocain s’est doté d’un plan d’action exhaustif destiné à contrer les défis posés par la diminution des ressources hydriques. Le plan vise à assurer que la pénurie d’eau ne freine pas le développement économique et social du Maroc. Il repose sur plusieurs axes stratégiques, notamment l’augmentation de la capacité de production d’eau dessalée à plus d’un milliard de mètres cubes annuellement, destinée à divers usages tels que l’eau potable, l’industrie, le tourisme, et l’irrigation. D’autres mesures comprennent la redistribution d’eau entre les bassins hydriques, la préservation des nappes phréatiques critiques, et l’amélioration de l’efficacité des réseaux de distribution d’eau potable, avec un objectif d’efficacité fixé à 80% d’ici 2030. Ainsi, le Maroc s’est lancé dans la réalisation de projets ambitieux pour affronter ces défis. L’utilisation des eaux usées traitées pour l’irrigation et le développement de projets de dessalement d’eau de mer sont parmi les initiatives majeures.
Par exemple, la région de Rabat-Salé-Kénitra est devenue pionnière dans l’utilisation des eaux usées traitées pour l’irrigation, tandis que des accords avec l’Office chérifien des phosphates ont été signés pour augmenter l’approvisionnement en eau dessalée pour Safi et El Jadida. Plusieurs mesures urgentes sont proposées, dont l’amélioration de l’offre en eau par la désalinisation de l’eau de mer et le traitement des eaux usées qui sont prioritaires. La gestion de la demande en eau implique également une réduction de la consommation d’eau pour l’irrigation, l’arrosage, et l’usage domestique quotidien, en promouvant des cultures adaptées au climat et en sensibilisant à une consommation d’eau responsable. Il faut dire par ailleurs que la présente sécheresse est caractérisée par sa durée exceptionnelle de sept saisons consécutives, marquant ainsi la période de sécheresse la plus longue de l’histoire du pays. En effet, sur cette période, le cumul des précipitations moyen s’est établi à 127 mm, comparé à une moyenne de 183 mm observée sur la période étudiée, représentant ainsi une baisse significative d’environ 30 %.
Extrait du discours Royal de la fête du Trône juillet 2024
Mise à jour « (…) Nous n’avons eu de cesse de souligner la nécessité d’une mise en œuvre optimale des différentes composantes du Programme national pour l’approvisionnement en eau potable et l’irrigation 2020-2027, lequel a contribué, par la grâce de Dieu, à atténuer la gravité de la situation hydrique. Vu l’accroissement des besoins et des contraintes, Nous insistons sur l’impératif d’une mise à jour continue des leviers de la politique nationale de l’eau et sur la définition d’un objectif stratégique, quelles que soient les circonstances: garantir l’eau potable à tous les citoyens et couvrir 80% au moins des besoins d’irrigation sur tout le territoire national. A cet égard, il est indispensable de parachever le programme de construction des barrages, en donnant la priorité aux projets programmés dans les régions connaissant d’importantes précipitations. En accord avec Notre Vision stratégique volontariste et ambitieuse, Nous appelons à accélérer la réalisation des grands projets de transfert d’eau entre les bassins hydrauliques, en assurant la connexion entre le bassin de Oued Laou-Larache et Loukous et celui de Oued Oum Er-Rbia, en passant par les bassins Oued Sebou et Bouregreg. Ces projets permettront l’exploitation d’un milliard de mètres cubes d’eau qui se perdaient dans la mer et garantiront une répartition spatiale équilibrée des ressources hydriques nationales. Par ailleurs, la réalisation des stations de dessalement de l’eau de mer doit être accélérée, selon le programme arrêté à cet effet pour assurer la mobilisation annuelle de plus de 1,7 milliard de mètres cubes. À l’horizon 2030, le Maroc pourra ainsi couvrir plus de la moitié de ses besoins en eau potable à partir de ces stations, irriguer d’importantes superficies agricoles et renforcer de cette manière sa sécurité alimentaire.»
Face à la raréfaction le Maroc développe des alternatives
Le Royaume est donc entré dans un cycle de stress hydrique structurel. La problématique est en train de prendre des envergures tellement inquiétantes que de nombreuses régions du pays ont observé, l’été dernier, des réductions de débit, voire carrément des coupures d’eau. Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a déjà évoqué l’urgence de la situation, en publiant un rapport qui évalue le potentiel du Maroc en ressources hydriques renouvelables à 22 milliards de m³ par an, soit 606 m³ par habitant. Le rapport souligne la tendance à la baisse des ressources disponibles depuis 1945, la raréfaction et la répartition inégale des ressources en eau de surface, ainsi que le recul alarmant des niveaux des eaux souterraines. Par conséquent, plusieurs villes marocaines ont pris des mesures pour faire face à la pénurie d’eau, suivant les directives de SM le Roi Mohammed VI. Ces mesures visent à rationaliser la consommation d’eau en réponse à une sécheresse prolongée qui a affecté les ressources en eau. En outre, le développement des ressources en eau non conventionnelles est érigé en priorité, pour permettre au Royaume de faire face à l’exacerbation du stress hydrique causée par plusieurs facteurs : sécheresse, pression sur la ressource, augmentation démographique, gaspillage, etc.
A l’heure actuelle, le dérèglement climatique est une réalité. L’adaptation devient donc une nécessité. Y faire face est une cause universelle, car de l’urgence climatique, on fait face désormais à un choc climatique. La situation du Maroc est symptomatique d’une pénurie d’eau douce qui s’aggrave, amplifiée par la pression démographique. Des services à l’agriculture, de l’industrie au tourisme, tous les secteurs d’activité sont menacés. Les chiffres font peur. Le Royaume entre dans sa septième année consécutive de sécheresse, une phase critique que le pays n’a jamais connue auparavant. Les barrages ne sont remplis, en moyenne, qu’au quart de leur capacité, tandis que les nappes phréatiques voient leur niveau baisser. Aujourd’hui, la dotation annuelle en eau par habitant dans le Royaume est légèrement supérieure à 600 m3, c’est-à-dire quatre fois moins qu’il y a 60 ans. Devant cette inquiétante raréfaction de l’eau, le Maroc développe plusieurs alternatives telles que la réutilisation des eaux usées, la déminéralisation des eaux saumâtres et le dessalement des eaux de mer.
Parmi ces alternatives il y a la construction de plus de 153 stations d’épuration des eaux usées urbaines d’une capacité de 3,38 millions de m3 depuis le lancement du Plan national d’assainissement liquide en 2006, la réalisation de 10 stations de déminéralisation des eaux saumâtres et par la réalisation de 14 stations de dessalement de l’eau de mer (9 sont déjà en service permettant de produire 147 millions de m3 d’eau par an et 5 sont en cours), 20 nouvelles stations de dessalement de l’eau de mer sont programmées d’ici 2050 pour atteindre la capacité de production annuelle de plus d’un milliard de m3 par an en eau. Tous ces projets rentrent dans le cadre de la mise en œuvre du Programme national pour l’approvisionnement en eau potable et l’irrigation 2020-2027 et du Plan national de l’eau 2020-2050. Parallèlement à ces plans, le Maroc poursuit le déploiement du Programme national d’assainissement mutualisé lancé en 2019, pour promouvoir la réutilisation des eaux épurées, particulièrement en milieu rural.
Près d’une cinquantaine de projets de réutilisation des eaux usées ont été réalisés ou sont en cours de réalisation au niveau national. En gros, le Maroc table sur la fourniture de 100 millions de m3 d’eaux usées traitées par an, d’ici à 2027. En 2050, ce chiffre devrait passer à près de 340 millions de m3 par an, soit un taux de réutilisation des eaux usées de l’ordre de 80%. Il convient de rappeler ici que grâce à la vision Royale, le Maroc a été parmi les premiers pays à lancer des initiatives multilatérales pour lutter contre le stress hydrique, comme l’Initiative pour l’adaptation de l’agriculture africaine, lancée lors de la COP22 à Marrakech en 2016.
Lutter contre le stress hydrique structurel
Politique ambitieuse En réalité la pénurie d’eau s’explique d’abord par les baisses graduelles, d’environ 2 à 3 mètres annuellement, des niveaux de la nappe phréatique, puis également par un constat frappant : les volumes globaux d’eau stockés dans les réservoirs ont été divisés durant seulement environ 4 ans. Le Royaume a depuis longtemps pris conscience de cette problématique et a entrepris au cours des dernières décennies une politique ambitieuse en matière de barrages. Les investissements réalisés, qui ont permis jusqu’à présent de répondre à la majorité des besoins en eau potable et en irrigation, semblent atteindre bientôt leur limite. Raison pour laquelle le Maroc avait initialement lancé un Plan national de l’eau 2020-2050 qui met notamment l’accent sur la mobilisation des ressources en eau non conventionnelles telles que le dessalement d’eau de mer, une technologie qui offre un réel espoir pour les zones côtières les plus arides.