Economie

Le «racket» se délocalise au Maroc

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Avec la «mondialisation», des prédateurs vagabondent, à l’affût de législations plus ou moins laxistes. Face à la grande Europe, qui prend forme à grands pas, les textes de loi tendent vers une harmonisation progressive. Donc, pour certains, motivés par l’appât du gain, il est tout à fait naturel de « délocaliser » les pratiques frauduleuses, au même titre que les délocalisations légales. C’est le cas de la vente pyramidale, une branche de la vente directe, condamnée par l’ensemble des législations des pays modernes mais pratiquée en toute impunité au Maroc. Une opération pyramidale est un stratagème, mis en oeuvre par une personne ou un groupe de personnes, en vue de faire de l’argent. Il s’agit d’un mécanisme selon lequel les organisateurs de systèmes « commerciaux » ou « d’investissement » s’enrichissent par le biais d’une progression géométrique, en percevant une somme d’argent des personnes qu’ils ont recrutées. L’activité de certaines sociétés, récemment implantées au Maroc, et spécialisées dans les cosmétiques, la diététique ou l’hygiène peut être assimilée à cette démarche. À l’examen des méthodes employées par l’une de ces sociétés, ayant son siège à Casablanca, une question se pose : l’activité principale étant focalisée sur le recrutement, et non sur la vente, la démarche déployée est-elle légale ? Cette société vend des franchises pour la commercialisation de la marque d’un savon qui possède « des qualités non contenues dans les autres produits disponibles sur le marché (non abrasif, non toxique, non caustique…) ». Ces franchises sont autant de positions qui permettent à leur acquéreur d’avoir un stock de marchandises qu’il peut écouler directement auprès du consommateur, à l’aide de distributeurs gérants se situant aux paliers supérieurs. Les présentations aux nouveaux adhérents se déroulent généralement au domicile des nouvelles cibles. La première position, pour adhérer, qui correspond à celle de détaillant, coûte 10 000 DH. Cette position donne droit à la vente libre, à la possibilité d’association, à la formation (à l’aide des gérants), puis à une remise de 20 %, en cas de rachat, et enfin à une commission de 5 % sur les détaillants filleuls. Le seconde position, dénommée grossiste, vaut 15 200 DH. Elle offre les mêmes droits que ceux d’un détaillant, sauf que le stock équivaut au montant déboursé, tout en faisant bénéficier son détenteur d’une remise de 30 %, puis d’une commission de 5 % sur les ventes des entrées directes (détaillants) ainsi qu’une autre commission de 5 %, sur les ventes des entrées indirectes (les détaillants des détaillants). Les différents niveaux sont tellement respectés que la recrue n’arrive à la troisième et dernière position (distributeur gérant) que s’il est déjà grossiste et que son agent qualificateur (son premier invité) occupe, soit la position de détaillant, soit celle de grossiste. « Cette position, qui coûte 32 000 DH, offre des rémunérations alléchantes : 40 % de remise sur les flacons de 400 cl à usage domestique, 40 % de remise sur les bidons de 5L et 20L à usage industriel, 10 % sur les ventes des grossistes situeés aux paliers inférieurs, 15 % sur les ventes des détaillants, 3500 DH de prime, si on aide un grossiste à faire le passage à gérant, 1 % sur les ventes de la première génération de gérants, 3 % sur la seconde génération et enfin 5 % sur la troisième », nous explique un membre de cette société, complètement hypnotisé par l’appât du gain mais qui avoue avoir déboursé 40.000 DH dans l’acquisition de produits stockés à domicile ! Toutefois, une chose est sûre : les systèmes pyramidaux ne sont pas commercialement viables. En ce qu’ils nécessitent un apport continuel de nouveaux participants prêts à entrer dans le système et à s’enrichir en recrutant à leur tour d’autres nouveaux participants. Comme le nombre de personnes pouvant être recrutées n’est pas infini, les derniers arrivés ont arithmétiquement de moins en moins de chances de s’enrichir. Ce système a par conséquent une espérance de vie limitée, et les derniers à y participer n’ont pratiquement aucune chance de récupérer les frais engagés pour y entrer et encore moins de chance de tirer profit du système. En plus, les constats enregistrés ailleurs laissent présager qu’on veut mettre le nez dans leurs affaires, les dirigeants risquent fort de mettre la clé sous la porte, et jouer la fille de l’air en emportant la mise récoltée. Espérons que ce sera le cas… non pas pour encourager la fraude, mais plutôt pour la faire cesser… en attendant une législation plus ferme en la matière !

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