Economie

Les capitaux arabes… vers quelle destination ?

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Si, comme le dit l’adage, la science politique repose sur l’art du politiquement possible, il en va de même pour la science économique qui reposerait sur l’art de l’économiquement possible. Les expériences passées ont démontré que les peuples ne pourraient aspirer à une existence concrète et active que s’ils construisaient une base économique leur apportant protection et leur assurant continuité ainsi que prospérité. Ces mêmes expériences ont également prouvé que toute négligence ou carence, en matière de concentration et de fortification de cette base économique, pourraient avoir des conséquences néfastes dans une ère où le monde vit une course vers le meilleur afin de garantir une vie prospère. Quant aux conséquences négative, si elles n’engendrent pas un état de paralysie totale, elles bloqueraient le processus de développement et perpétueraient le statu quo. Les tentatives des pays arabes d’atteindre des taux de croissance économique élevés, qui seraient à même de raccourcir la distance qui les sépare du monde riche et industrialisé, sont devenues des tâches assez ardues et ce, du fait de la rareté ainsi que du manque de capitaux susceptibles de mener à l’atteinte de cet objectif. En dépit des aides octroyées par les pays industrialisés, les institutions de l’ONU ainsi que toutes les caisses arabes, les besoins en moyens de financement des pays arabes demeurent en perpétuelle croissance à cause des problèmes suivants : 1. L’augmentation alarmante des taux de croissance démographique au sein des pays arabes. 2. Les importations des pays arabes progressent à une cadence largement supérieure à celle du taux de croissance économique et le taux de croissance des dépenses de l’Etat représente le triple du taux de croissance économique. 3. L’incapacité du commerce extérieur arabe à élargir sa part dans le commerce international. 4. La mauvaise gestion par les pays arabes des crédits dont ils ont bénéficié, ce qui a augmenté les charges financières dues à l’endettement. Le capital financier, étant une part essentielle à toute opération de production, doit abonder afin de faire aboutir plusieurs programmes liés au développement. Et malgré l’importance des aides financières octroyées par les caisses et les institutions financières aux pays arabes, les charges du service de la dette sont en constante augmentation, exerçant ainsi une pression sur les économies des pays arabes à percevoir de nouveaux crédits. Ceci parce que les services liés à la dette ont égalisé, voire même dépassé le montant de nouveaux crédits dont pourraient bénéficiés lesdits pays. Ces faits nous mènent donc aux constats suivants : – Le traitement du problème lié au développement ne se fait pas à travers des méthodes de travail archaïque et inefficaces, qui ne tiennent pas en compte les besoins et les données liés au présent ainsi qu’à l’avenir. – L’insuffisance des capitaux constitue une entrave majeure au développement. – Les sources traditionnelles d’obtention de capitaux sont devenues insuffisantes face à l’envergure prise par l’enjeu du développement dans les pays arabes. Il serait donc justifiable de se poser la question suivante : quel(s) serait(aient) la (les) solution(s) potentielle(s) ? Les problèmes que connaissent les pays arabes sont du même ordre général que ceux vécus par les pays en voie de développement. Ces problèmes se caractérisent, entre autre, par la mauvaise répartition des ressources ainsi que de la population entre les différentes régions et l’existence de conflits économiques ainsi que politiques entre pays limitrophes, entravant ou ralentissant le processus de développement desdits pays. Par ailleurs, il existe un contraste entre, d’une part, certains pays arabes ayant un déficit en capitaux liés à l’investissement et, d’autre part, d’autres pays arabes qui en ont un excédent. De ce fait, l’encouragement à l’afflux de cet excédent vers les pays manquants de moyens de financement est devenu un enjeu primordial et ce, de par la mise en place d’un environnement en même temps sain et propice aux investissements aptes à attirer ces capitaux, permettant ainsi à leur détenteur de réaliser des profits conséquents, encourageants et dépourvus de risques. Si les pays arabes n’arrivent pas à réaliser, dans les vingt années à venir, de considérables progrès dans les domaines économique, scientifique et technologique, leur développement deviendra une pure chimère. En effet, le taux de croissance démographique actuel des pays arabes figure parmi les taux les plus élevés à travers le monde, et si la situation économique dans ces pays demeure inchangée, l’avenir sera décuplé par la pauvreté, l’analphabétisme et une plus ample disparité sociale. Il est ainsi devenu plus que nécessaire de faciliter la libre circulation des capitaux au sein des pays arabes et de leur procurer un environnement aussi attirant qu’adéquat. Parallèlement à cela, les pays sont appelés à développer un partenariat entre eux, en vue de créer un espace économique arabe commun et toute hésitation en ce sens aura des conséquences néfastes sur le futur. Les événements du 11 septembre qu’ont connus les Etats-Unis d’Amérique, ainsi que la campagne médiatique de dénigrement contre les Arabes qui en a découlé, eurent pour conséquence d’indexer les Arabes de terroristes et de bailleurs de fonds pour le financement du terrorisme international. De ce fait, il est plus que jamais indispensable de rapatrier les capitaux et les ressources arabes à l’étranger. Selon la presse, on assiste dernièrement à un mouvement dans ce sens et on estime les montants retirés à quelque 200 milliards de dollars ; ce qui nous oblige, nous en tant que pays arabes, à penser que ces deux trillions de dollars, que possèdent les pays arabes à l’étranger en tant qu’investissement, appartiennent soit à des particuliers ou à des gouvernements. Il est indubitable que les échecs des pays arabes à avoir des institutions financières et économiques prospères, des marchés financiers modernes et des juridictions aussi bien transparentes qu’attirantes afin d’absorber ces capitaux, sont les causes derrière la fuite de ces capitaux arabes vers l’étranger à travers les canaux suivants : 1. Les dépenses oisives. 2. Les investissements dans des projets à l’étranger. 3. Le placement dans des institutions financières occidentales et internationales. Tous ces moyens ont fait que les pays arabes sont devenus incapables de contrôler et de bénéficier de ce mouvement migratoire de leurs capitaux et ressources vers l’extérieur, sachant que ceux-ci peuvent être utilisés directement ou indirectement contre leurs intérêts vitaux. Tant que les capitaux arabes demeurent à l’étranger, et tant que les mentalités des responsables des pays arabes n’évoluent pas, ne suivant donc pas les changements et les mutations qui se déroulent ailleurs dans le monde, les pays arabes passeront à côté de l’opportunité de suivre les tendances actuelles du développement. De ce fait, il est devenu nécessaire, voire indispensable, pour les pays arabes de créer une stratégie commune de haut niveau, en vue d’une action collective capable d’orienter le monde arabe vers ce qu’il y a de mieux et de rompre avec le cercle vicieux de la pauvreté qui l’entoure. Cependant, il faut d’abord organiser des débats et des tables rondes à travers lesquels participeront des opérateurs aussi bien du privé que du public, afin de parvenir à des réponses et de trouver des solutions adéquates aux deux questions centrales qui suivent : Primo : Comment crée-t-on un environnement, des politiques et des initiatives assez fiables, transparentes et efficaces, qui soient en mesure d’attirer les capitaux arabes vers leurs pays d’origine ? Secondo : Comment crée-t-on des moyens, des instruments et des projets rentables et modernes permettant d’absorber l’excédent de capital financier arabe ?
Par Ali Bajaber
• Secrétaire général du Club des investisseurs arabes au Maroc

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