EconomieUne

Manuels scolaires : Aucune hausse de prix en vue

© D.R

Entretien avec Camille Hoballah, président de l’Association marocaine des éditeurs

A l’approche de chaque rentrée scolaire, les parents appréhendent la hausse des prix des manuels qui sont une principale composante du cartable scolaire. Dans cet entretien, Camille Hoballah, président de l’Association marocaine des éditeurs, et gérant des éditions Afrique Orient, nous plonge dans les rouages de cette industrie pour comprendre le processus de tarification et de production des livres scolaires. L’occasion étant également d’établir un état des lieux de ce secteur peu connu du grand public.

ALM : A la veille de la rentrée scolaire, la question de la hausse des prix des manuels refait surface. Avant d’aborder ce point, pourriez-vous nous détailler le processus de tarification d’un livre scolaire au Maroc ?

Camille Hoballah : Le manuel scolaire fait, en effet, partie des articles à caractères social dont le prix est fixé le gouvernement sur proposition d’une commission interministérielle et ces prix sont publiés au Bulletin officiel. Donc, nous ne pouvons nous amuser sur la fixation du manuel scolaire. Cela sous-entend uniquement les livres qui contiennent le logo du ministère de l’éducation nationale et du préscolaire ainsi que le numéro d’homologation imprimé au bas de la couverture des manuels. La présence de ce label stipule que le prix est fixé par l’autorité gouvernementale en l’occurrence la commission interministérielle. Il est à souligner que c’est l’Association marocaine des éditeurs qui, à l’époque en 2002, avait négocié ce prix avec le ministère de tutelle. Dans l’ensemble, il y a trois niveaux de tarification. Le prix du livre scolaire du primaire est plus bas et ce compte tenu du volume important des tirages. Le tarif du collégial est légèrement supérieur et ceux du secondaire légèrement supérieurs à ceux du collège étant donné que le nombre de pages est bien plus important et le nombre de tirage beaucoup plus bas.

Qu’est-ce qui caractérise un manuel scolaire marocain ?
Je citerai en premier son prix compétitif. Le rapport qualité /prix est très performant. Il est vraiment très bas comparativement à tous les livres scolaires qui viennent de l’étranger. Les livres scolaires marocains ne représentent que 10 % du prix public d’un livre scolaire étranger. Ils n’excèdent pas une moyenne de 25 dirhams particulièrement pour le primaire.
Comme je vous ai expliqué, plus nous montons dans l’échelle des livres scolaires, plus les tirages baissent et les prix augmentent, mais ils restent très abordables. De même, le livre scolaire marocain se caractérise par sa multiplicité. Le livre unique n’est plus d’usage au Maroc et ce depuis longtemps. Certes, il existe une différence de contenus mais les éditeurs sont obligés de s’aligner sur le même prix.

Juste pour rassurer les parents à la veille de cette rentrée. Les prix restent inchangés…
Aucune hausse de prix n’est à relever ! Les tarifs pratiqués aujourd’hui sont ceux d’il y a 20 ans. Nous espérons que le cours du papier baisse pour que nous puissions retrouver nos marges. A noter que le gouvernement a réitéré cette année sa subvention pour pallier la hausse du papier. Certes, nous avons revendiqué une augmentation notamment en ce contexte d’inflation, mais le gouvernement a préféré accorder en contrepartie de la hausse de tous les intrants, une subvention de 25 % du prix du livre en nous demandant de maintenir les mêmes prix. Même les parents qui ont des enfants scolarisés dans le privé, ils achèteront les manuels au tarif du public imprimé au dos de la couverture. Pour les parents des élèves du public ils doivent savoir que ces manuels sont donnés gracieusement par l’INDH aux élèves et collégiens de l’école publique et ce dans le cadre de l’Initiative royale « 1 million de cartables » qui désormais est élargie à 4,5 millions d’élèves au niveau national.

Comment évolue le chiffre d’affaires du secteur dans ce contexte ?
Pour ce qui est du livre scolaire, nous réalisons pour le moment un chiffre d’affaires stable. Il oscille entre 400 et 500 millions de dirhams. Ce chiffre d’affaires est réparti sur 41 éditeurs. Il est évident que des éditeurs ont plus de livres que d’autres mais aucun d’entre eux ne détient un pourcentage supérieur à 15 %. Il est à préciser que le chiffre d’affaires évolue pour les autres segments. Après tout, l’éditeur est généraliste. Il peut faire en parallèle des livres de jeunesse, des cahiers de vacances, des publications parascolaires ou encore des cahiers pratiques. C’est un secteur très vaste. L’évolution du chiffre d’affaires dépend ainsi de la philosophie de l’éditeur ainsi que de sa stratégie éditoriale. Cependant pour le livre scolaire, il n’y a pas d’évolution car les prix sont toujours les mêmes. Parfois, le chiffre d’affaires peut baisser jusqu’à 30 % à cause des livres d’occasion qui sont redistribués aux élèves.

Généralement, quand entamez-vous les préparatifs pour la rentrée scolaire ?
Il faut savoir que le cycle de production d’un livre scolaire est long. Nous entamons les démarches à la fin de chaque rentrée. Nous écrivons au ministère de l’éducation nationale à partir du mois de novembre pour nous remettre un avenant pour chaque titre. Cet avenant nous garantit qu’il n’y a pas de changements à apporter et nous autorise à réimprimer le livre dont l’éditeur a l’homologation. Nous avons près de 394 titres de livres scolaires qui sont répartis entre 41 éditeurs. Une fois les avenants délivrés, nous commençons l’impression à partir de janvier ou février et ce jusqu’à fin août. Nous éditons une fois par an avec un surplus allant de 5 à 10 % pour garantir la disponibilité en manuels tout au long de la saison scolaire.

Et si jamais un changement s’opère au niveau du contenu ?
Le ministère ne délivre pas d’avenants pour le titre où il y a des changements partiels. L’éditeur fait appel à sa commission d’auteurs pour apporter les corrections ou modification exigées par le Ministère. L’éditeur soumet au Ministère des exemplaires avec les modifications réclamées qui subissent une évaluation puis approbation ou rejet par le Ministère. L’accord est suivi par la délivrance de l’avenant puis le démarrage de l’impression.

La préférence nationale est désormais un impératif. Quelles ont été les retombées de cette orientation sur votre activité ?
Le principe de la préférence nationale a été très bénéfique pour nous. Auparavant seulement 40 % des manuels scolaires étaient conçus au Maroc. Aujourd’hui la totalité de la production se fait au niveau national. D’ailleurs cela été une revendication de longue date émise par notre profession. Cette orientation a rapidement dynamisé le secteur. Je peux vous confirmer que tous les imprimeurs ont investi durant ces deux dernières années. Environ 5 rotatives rentreront au Maroc . Ce sont des machines qui nécessitent de lourds investissements mais qui permettront aux imprimeurs de gagner en temps et en productivité. Une rotative assure jusqu’à 40.000 tirages à l’heure en recto-verso. Ainsi, nous pourrons être plus compétitifs et pourquoi pas demain aller vers l’export et sceller des partenariats avec l’Afrique dans le même sillage prônée par la stratégie royale.

Que revendiquent aujourd’hui les professionnels du secteur ?
Il faut savoir que notre secteur dépend de deux départements ministériels, à savoir le ministère de l’éducation nationale et le ministère de la culture. Il est vrai que les choses vont bon train avec le département de l’éducation nationale mais du chemin reste à parcourir. Nous aspirons avoir une place en tant que professionnels au sein du Conseil supérieur de l’enseignement pour apporter notre savoir-faire acquis depuis plus de 40 ans. Nous souhaitons également être associés à l’initiative visant à introduire le livre culturel à l’école publique à travers la création des bibliothèques de classes. Pour ce qui est du ministère de la culture, nous revendiquons à ce que le Salon international du livre revienne à Casablanca sous une configuration digne de la métropole et de son rayonnement culturel. En bref, nous ambitionnons qu’il y ait davantage de communication, de dialogue et de partenariat avec le secteur public.

Related Articles

ActualitéUneVidéos

Le round-up de l’actualité de la semaine pour rester informé

Retrouvez l’essentiel des informations développées dans nos éditions quotidiennes et nos différentes...

ActualitéUne

SM le Roi Mohammed VI adresse un message de félicitations à Sa Sainteté le Pape Léon XIV

Sa Majesté le Roi Mohammed VI, Amir Al-Mouminine, que Dieu L’assiste, a...

EconomieUne

Pour Karim Zidane, les Marocains du Monde représentent un levier stratégique majeur de développement

Les Marocains du Monde (MDM), forte communauté de près de 6 millions...

SociétéUne

Opération Marhaba 2025 : Les prévisions annoncent une hausse de 4% des passagers et de 5% des véhicules

Les discussions lors de cette rencontre ont porté sur les dispositifs opérationnels...