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Modèle de développement et croissance de la population : Comment mettre à profit l’aubaine démographique

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Cette opportunité démographique est axée sur une baisse du taux de fécondité, une diminution du taux de dépendance et une augmentation de la proportion des personnes en âge de travailler.

A la croisée des chemins entre deux mondes différents, le Maroc sera impacté par les grandes tendances démographiques mondiales. «Il sera un carrefour entre deux dynamiques démographiques tout à fait opposées. Au Sud, il y aura la croissance démographique de l’Afrique subsaharienne et au Nord il fera face à l’accélération du vieillissement de la population en Europe. D’un côté, l’Afrique pourrait subir des crises politiques, socioéconomiques et humanitaires majeures y compris aussi l’augmentation de flux migratoires tandis que de l’autre côté, l’Europe aura besoin de plus en plus d’une force migratoire importante pour faire face au vieillissement de sa population», explique Luis Mora, le représentant du Fonds des Nations Unies pour la Population au Maroc, lors d’une séance d’échange organisée par la Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD) le 22 septembre 2020. Selon l’expert, le Maroc fait face à un phénomène d’aubaine démographique qui se prolongera jusqu’à 2040-2050. Cette opportunité démographique est axée sur une baisse du taux de fécondité, une diminution du taux de dépendance et une augmentation de la proportion des personnes en âge de travailler. Après avoir dressé les méga-tendances mondiales observées durant les trois prochaines décennies (urbanisation croissante, augmentation de l’espérance de vie, immigration en hausse), le représentant du Fonds des Nations Unies pour la Population a dévoilé l’impact de ces évolutions sur le Maroc et les faits à appréhender dans les années à venir. Les détails.

Ce qu’il faut corriger …
Pour intégrer la donne démographique dans le développement d’un pays, la recette est simple. En attestent les expériences d’un certain nombre de pays (comme les dragons asiatiques) et les évidences scientifiques qui en découlent. Ainsi, un tiers du développement socio-économique des pays émergents aurait été basé sur leur capacité à bénéficier du dividende démographique à travers des investissements en matière d’autonomisation, santé, éducation, emploi des jeunes et des femmes. Le Maroc a tous les éléments pour bénéficier de l’aubaine démographique mais il a des défis majeurs à surmonter dans l’immédiat. Pour luis Mora, «le Maroc est à la fin de la transition démographique. Il fait face à ce qu’on appelle l’aubaine démographique». Il s’agit d’une opportunité démographique temporaire qui va durer jusqu’à 2040 voire 2050 et après le Maroc va passer au vieillissement de sa population. En termes de chiffres, actuellement le taux de croissance démographique annuel est de 1,25%. Il s’avère aussi que l’âge moyen du 1er mariage a augmenté. Il est de 31 ans pour les hommes et de 27 ans pour les femmes. On notera aussi que le taux de célibat définitif est en hausse progressive (près de 7% des femmes et plus de 5% des hommes sont en célibat définitif). Au cours de sa présentation, le responsable onusien a également évoqué la question de la pénalisation du sexe hors mariage qui, selon lui, a des conséquences sur les politiques publiques, notamment en matière de santé, de planification familiale et sur l’accès des jeunes en général et des jeunes femmes non mariées en particulier à la santé sexuelle et reproductive.
Par ailleurs, bien que le Maroc ait réussi à réduire le taux de la mortalité maternelle, on compte 2/3 des décès dans le milieu rural. 13,4% des femmes accouchent sans l’assistance d’un personnel qualifié, 11,4% des femmes enceintes n’ont bénéficié d’aucun soin prénatal (20,3% dans le milieu rural) et 35% des femmes ont accouché à domicile. Quelques défis majeurs à relever pour l’avenir ont également été évoqués par le représentant du Fonds des Nations Unies pour la Population au Maroc comme la couverture sociale, l’assurance maladie obligatoire, la santé mentale, l’usage des drogues, l’éducation, l’avortement, l’exploitation du temps (72% du temps des jeunes est consacré à des activités non productives de bien-être social) ou encore le chômage.

Scénarios et indices
La baisse du taux de fécondité devrait permettre au Maroc de bénéficier de l’aubaine démographique. Le responsable onusien a également mis en avant les projections effectuées sur la base de 5 scénarios de fécondité en revenant sur la composante migration subsaharienne. Sans tenir compte de la composante de la migration, les effectifs de la population au Maroc passeraient en 2030 à : 38,4 millions de personnes avec un taux de fécondité de 1,2% (scénario 1), 39,6 millions de personnes avec un taux de fécondité de 1,5% (scénario 2), 40,8 millions de personnes selon un taux de fécondité de 1,8% (scénario 3), 41,9 millions de personnes en fonction d’un taux de fécondité de 2,1% (scénario 4), et 43,4 millions de personnes si le taux de fécondité est de 2,47%. En tenant compte de la composante migration africaine, le Maroc se trouvera dans une fourchette de 38 millions de personnes (avec une dynamique d’immigration similaire à l’actuelle tendance) et 56 millions de personnes (avec une dynamique d’immigration beaucoup plus importante).

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Conclusions

Il en ressort globalement quelques faits inéluctables. Le Maroc connaîtra dans l’avenir une croissance démographique, une augmentation des femmes en âge reproductif, une hausse du taux de personnes en âge d’être actifs, ce qui signifie une pression sur le marché du travail, la croissance des populations âgées de 60 ans, et un retournement de la pyramide d’âge. En revanche, deux tendances vont évoluer et vont avoir des effets sur les autres. La première concerne l’indice de la fécondité et la deuxième est liée à l’impact de la migration. Par conséquent, le modèle de développement devrait tenir en considération l’avenir démographique du Maroc à l’horizon 2030-2050, principalement l’augmentation du nombre de femmes en âge de reproduction, ainsi que le pourcentage de la population active et la population âgée de plus de 60 ans. L’évolution de la migration sera un facteur déterminant. Il faudra aussi investir dans la jeunesse. Cela devient plus critique que jamais pour réussir les défis du développement : autonomisation et droits, éducation, santé, y compris la santé sexuelle et reproductive, et emploi. Enfin, ces efforts devraient être encadrés par l’évolution de la population dans son ensemble, selon l’expert.

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