EconomieUne

Production, tarifs, ONEE… le diagnostic du conseil de la concurrence

© D.R

En vertu des dispositions de l’article 4 de la loi n° 20-13 relative au Conseil de la concurrence telle qu’elle a été modifiée et complétée par la loi n° 41-21, le Conseil de la concurrence s’est autosaisi pour avis afin de procéder à une analyse de la situation de la concurrence dans le marché de l’électricité, en profonde transformation. Les détails.

Le secteur de l’électricité à la loupe du Conseil de la concurrence. Ce dernier vient de publier un avis très attendu sur la question. Le Conseil a jugé opportun de s’interroger sur le fonctionnement de ce marché, afin d’examiner les facteurs limitant une plus grande ouverture à la concurrence et d’envisager les pistes de réflexion, en mesure de faire évoluer les conditions concurrentielles dans ce marché et de le rendre plus ouvert à l’investissement et plus compétitif. Plusieurs départements ministériels, organismes institutionnels et acteurs économiques, actifs dans le secteur de l’électricité, tels que les opérateurs métiers, ont été entendus dans le cadre de plus d’une vingtaine d’auditions, suivies de nombreux échanges d’informations par écrit, sous forme de demandes d’information et de questionnaires. «Durant les cinq dernières années et à l’exception de l’année 2020 qui a enregistré une baisse de la demande de l’énergie électrique, en raison du contexte de la crise sanitaire relative à la Covid-19 qui a causé l’arrêt d’une bonne partie de l’activité économique nationale, l’énergie nette appelée d’électricité s’est inscrite dans une tendance haussière de près de 3% en moyenne annuelle, passant ainsi de 37 444 GWh en 2018 à 43 991GWh en 2023», précise le Conseil. Et de poursuivre: «L’énergie nette appelée dépasse le niveau de la production nationale d’électricité constituant un ratio de plus de 102%. L’énergie nette appelée en 2023 était de l’ordre de 43 991 GWh, tandis que la production nationale d’électricité n’était que d’environ 42 870 GWh. Ceci signifie que la production d’électricité au Maroc en cette année n’a pas suffi à garantir les besoins de la demande nationale, qui est donc satisfaite en partie par le recours aux importations». Cela dit, l’augmentation presque régulière de la demande nationale trouve ses explications essentiellement dans le dynamisme de l’économie nationale, la politique de déploiement des grands projets d’infrastructure et aussi dans l’augmentation de l’urbanisation, l’amélioration du niveau de vie et la politique volontariste de l’État qui s’est traduite par la quasi généralisation de l’électrification rurale (taux d’électrification rural de 99,86%).

Fragilités
Pour le Conseil de la concurrence, la solidité financière et, par conséquent, le modèle économique de l’ONEE restent fragiles, car la rentabilité économique des dix dernières années affiche généralement des taux négatifs. Même lorsqu’ils sont positifs, ces taux demeurent faibles, ne dépassant pas les 1,6%. Les dettes de financement ont atteint 57 MMDH à fin 2021, auxquelles il convient d’ajouter 41 MMDH de la dette sociale relative à la Caisse interne de retraite, portant la dette globale à plus de 100 MMDH et un taux d’endettement de 65%. La fragilité de la situation financière s’accentue en cas de contexte défavorable, tel que la succession des années de sècheresse et la flambée des prix des combustibles importés, comme observé en 2022. Cette année là, tous les indicateurs financiers de l’Office se sont rapidement et substantiellement détériorés, engendrant un résultat net déficitaire de 20 MMDH et un taux d’endettement total de 66% (dette globale/ total actif). «Les marges de manœuvre de financement de l’ONEE se sont nettement réduites et son niveau de dépendance financière vis-à-vis des tiers a considérablement augmenté, mettant la solvabilité de l’Office à rude épreuve. Pour faire face à cette situation critique, l’ONEE a sollicité à plusieurs reprises des interventions de l’État pour le soutenir financièrement. Le dernier exemple remonte au mois de mai 2023, où le gouvernement a débloqué une rallonge budgétaire de 4 MMDH. Mais ces mesures ponctuelles et d’urgence restent partielles et ne parviennent pas à résoudre la problématique structurelle que pose le modèle économique de l’Office», explique la même source. Pour les responsables du Conseil, «il est nécessaire de revoir en profondeur le modèle actuel afin de dynamiser la concurrence sur le marché de la production d’électricité et d’accélérer le processus des réformes engagées. Cela passe par la définition d’un modèle cible en ligne avec les Hautes Orientations Royales, visant à rendre le fonctionnement de ce marché davantage efficace». Afin de permettre à l’ONEE de mener à bien ses missions dans le cadre de la nouvelle configuration, le Conseil de la concurrence trouve qu’il est impératif de décongestionner l’Office de sa dette colossale actuelle, qui s’est accumulée au fil des années. Cette mesure est essentielle et conditionne la réussite du modèle proposé. En ce qui concerne l’activité de production, le Conseil propose qu’elle soit portée essentiellement par le secteur privé. Le Conseil de la concurrence a proposé un certain nombre de recommandations et mesures visant à décliner un nouveau modèle. Il est question ainsi de procéder au dégroupage des activités de service public (transport) et celles des activités marchandes (production, distribution et fourniture) au sein de la chaîne de valeur du marché. Cette séparation vise à accroître davantage la transparence sur le coût réel de l’électricité. «En ce qui concerne la production, le marché devrait être porté, d’un côté, par des auto-rproducteurs industriels et domestiques ainsi que des producteurs privés qui génèrent de l’électricité à partir de sources renouvelables et la commercialisent selon les conditions tarifaires convenues avec les acheteurs intéressés. Ce mode de production devrait gagner en importance avec l’accélération et la promotion des projets renouvelables», explique la même source. Et d’ajouter: «Pour ce qui du segment de transport, le Conseil souligne la nécessité d’opérationnaliser, avec un délai maximal défini, la création de l’entité indépendante relative au gestionnaire du réseau national du transport d’électricité (GRT) prévue par la loi n°48-15».

Système de tarification
Situation financière. Pour le Conseil de la concurrence, le redressement de la situation financière de l’ONEE et l’amélioration de la transparence sur le marché national de l’électricité ne peuvent se faire sans une révision du système de tarification actuel. En effet, le système actuel a un caractère fixe qui ne permet pas de refléter les coûts de revient réels et fonctionne avec un mécanisme de péréquation et de subventions croisées entre tranches de consommation (et même entre activités: l’électricité subventionne l’eau). De ce fait, l’application d’un modèle basé sur la transparence de la méthodologie de fixation des tarifs, accompagnée de procédures claires dans leur révision, est indispensable pour concrétiser les objectifs de réforme du marché et encourager à la rationalisation des usages. Le modèle tarifaire cible doit répondre, in fine, à l’impératif fondamental de refléter les vrais coûts de production du kWh d’électricité de nature à répercuter les coûts en amont sur le consommateur final. Il doit prendre en compte les préoccupations économiques et sociales des différents consommateurs, à savoir la préservation de la compétitivité des entreprises et du pouvoir d’achat des ménages vulnérables.

Articles similaires

ActualitéUne

Opération Transit 2024: Réunion à Tanger de la commission mixte maroco-espagnole

La commission mixte maroco-espagnole de Transit s’est réunie, lundi à Tanger, sous...

EconomieUne

Transport aérien : Royal Air Maroc et la confrérie Mouride signent une nouvelle convention de partenariat

Royal Air Maroc (RAM) et la Confrérie sénégalaise des Mourides ont signé,...

RégionsUne

La police de Beni Mellal célèbre le 68ème anniversaire de la DGSN et fait son bilan

En présence du wali de la région Beni Mellal-Khénifra, gouverneur de la...

ActualitéUne

10ème Forum mondial de l’eau: Le Maroc participe à une réunion de haut niveau

Le Maroc a pris part lundi à une réunion de haut niveau...

EDITO

Couverture

Nos supplément spéciaux

Articles les plus lus