EconomieUne

Regards croisés sur l’innovation

© D.R

La société 2WLS consacre son 2ème webinaire à l’industrie, la technologie et la déréglementation

Après un 1er webinaire, dédié aux héros imperceptibles en ces temps de Covid-19, la société 2WLS, spécialisée dans les solutions de fidélité client au Maroc, vient de consacrer un 2ème à l’industrie, la technologie et la déréglementation. Un événement qui s’est penché sur les questions liées à l’innovation, à la lumière de l’actualité Covid dans le monde, marquée par des inventions même en Afrique et au Maroc. Des créativités qui ont pu voir le jour grâce à l’état d’urgence. Entre l’usage des drones dont cet état a assoupli les résistances réglementaires, l’adaptation industrielle, ayant permis au Maroc de s’illustrer dans la production de masques, ou encore l’usage à outrance de technologies jusque-là peu investies, comme l’impression en 3D, pour remettre en marche des ventilateurs ou des respirateurs en panne, les idées originales ne manquaient pas. Il était question, à travers ce 2ème webinaire, de comprendre en quoi ce qui a été permis, parfois encouragé, en tant de crise, serait interdit en temps normal.

Beaucoup plus d’innovation

«Comme une chenille qui sort de sa chrysalide pour voler de ses ailes, le monde, le Maroc, l’Afrique, sortiront de cette crise encore plus innovateurs». Ainsi s’exprime la vice-présidente de 2WLS, Siham Elmejjad, sur les perspectives de ces inventions. Par l’occasion, l’intervenante n’a pas manqué de ressortir deux expériences significatives dans le parcours de sa compagnie, jeune de 15 ans déjà. La première concerne la formalisation d’un mécanisme financier très populaire au Maroc, en l’intégrant au circuit financier formel et traçable. Il s’agit de l’opération «Daret», littéralement, «ça tourne», utilisée par près d’un million de personnes au Maroc. En effet, en se syndiquant dans cette opération, plusieurs personnes contribuent avec le même montant, mensuel le plus souvent, pour que chaque membre puisse profiter de la cagnotte, à tour de rôle. «Lorsque le projet a été finalisé, et s’agissant d’un outil financier, nous avons présenté le montage pour approbation par le système bancaire et les instances de gouvernance, qui l’ont rejeté en bloc pour vide juridique», se souvient-elle. Mme Elmejjad n’hésite pas à établir des rapports entre cette proposition et la situation actuelle. «Or, en ces temps difficiles, on voit bien comment l’identification des personnes méritant un soutien public direct s’avère compliquée», commente-t-elle. A l’opposé, la 2ème expérience du mobile banking au Kenya, lancé depuis plusieurs années, permet non seulement de profiter à 18 millions d’utilisateurs, mais également de générer près de 800 000 emplois, contribuant ainsi au tiers de la croissance du pays. Comme elle le précise, ceci a été possible grâce à une loi qui a reconnu l’unité d’argent électronique, une loi passée malgré les résistances des banques. «Cette agilité législative, nos gouvernants en ont les moyens. C’est ce qui peut ouvrir la voie à l’innovation», avance Mme Elmejjad.

Se mettre en danger pour innover

Egalement de la partie, Christian Monjou, professeur agrégé de l’Université, fait, quant à lui, un parallèle «délicieux» entre le parcours, le cheminement de l’art et l’avancée des innovations, pourvu, comme il le dit d’emblée, «qu’un leader légitime montre, en temps de crise, l’opportunité que personne ne voit encore». Pour lui, le leader légitime est doté d’un strabisme divergent « heureux ». « Peut-être nos communautés sont-elles tentées de dés-enseigner la créativité. C’est pour moi le grand danger, la standardisation, la siloisation et la dictature des process», estime-t-il. L’orateur ne manque pas également de livrer une recette. «Etre innovant, c’est se mettre en danger, au sein d’une communauté.

Cette dernière se doit d’être bienveillante envers ces perturbateurs », avance le professeur qui emprunte à l’art à l’art six gestes pour décrire l’innovation. «Le meilleur moyen pour qu’il n’y ait pas d’innovation, c’est de vouloir savoir trop tôt, trop vite, où le processus d’innovation va mener», enchaîne M. Monjou. A propos de ce 1er geste, le professeur précise également que la R&D mène à trouver ce que l’on cherche, et que l’innovation permet de trouver ce qu’on ne savait même pas qu’on cherchait. Dans le même sillage, M. Monjou revient sur le style de Zaha Hadid, qui a osé le style centrifuge, avec des bâtiments qui éclatent à partir du centre.

«Envisager le contraire, ce n’est pas forcément faire le contraire. C’est d’abord ouvrir les champs du possible», insiste-t-il pour illustrer le 2ème geste. Le 3ème étant, à son sens, la «radicalisation des intuitions». «En temps de crise, il faut que ceux qui ont des intuitions, qui n’ont pas eu l’occasion de parler, puissent enfin les exprimer», recommande Monjou. Le quatrième geste, illustré par l’œuvre de Matisse au Maroc, est qualifié par Monjou du geste «L’ailleurs». En substance, sans son voyage à Tanger, Matisse n’aurait pas pu prendre le contre-pied de ses contemporains. Le cinquième geste étant le «métissage». Quant au sixième geste, il consiste à se libérer de l’effet paralysant de «l’agencement des choses».

Un aspect social pour l’innovation

De son côté, Lionel Roure, maître de conférence au Centre National des Arts et Métiers et expert en management de l’innovation, insiste sur l’aspect social de la démarche. Pour lui, une grande proportion des projets d’innovation n’aboutit pas car conçue exclusivement sous le prisme technologique. «Ce qui est tradition aujourd’hui, était, au départ, une formidable innovation. Une innovation, c’est une insolence qui rencontre le marché», avance-t-il. Le maître conférencier insiste aussi sur l’étendue que doit prendre un projet d’innovation. Pour lui, il faut s’adresser au plus large public, en l’occurrence, les classes moyennes.

«Se réinventer, ce n’est pas ouvrir le énième point de vente ou sortir la nouvelle version d’un produit, ce n’est pas écouter les besoins et y répondre, comme ce qu’on enseigne dans les écoles de commerce, bien au contraire, c’est changer les méthodes par lesquelles on gère les situations classiquement», explique-t-il en substance. La société recherche du sens, et l’innovation attendue s’exprime d’abord en termes sociaux, avec une forte affluence vers l’économie sociale et solidaire. Tel est le propos de l’expert.
Pour rappel, les webinaires «Débats vers le haut» de 2WLS se poursuivront le 2 juin prochain avec un troisième acte dédié à l’inclusion économique par les moyens de la finance.

Articles similaires

EditorialUne

Pas de répit…

Le bilan des 30 premiers mois du mandat du gouvernement sorti des...

ActualitéUne

6ème concours marocain des produits du terroir : 7 prix d’excellence décernés

Sept prix d’excellence ont été décernés lors de cérémonie de remise des...

ActualitéUne

Le Groupe Crédit Agricole du Maroc lance son offre d’affacturage à travers sa filiale « CAM Factoring »

Le Groupe Crédit Agricole du Maroc (CAM) a lancé, jeudi à Meknès...