Economie

Simon Gray : «Le Maroc devra probablement s’appuyer davantage sur la mise en oeuvre de réformes de son économie»

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ALM : Comment évaluez-vous la compétitivité économique du Maroc?
Simon Gray : Le Maroc sort d’une décennie de performances macroéconomiques solides. La croissance du Maroc a été soutenue, avec une moyenne annuelle de 4,9% sur la période 2001-2010, nettement supérieure à la moyenne de 2,8% des années 1990. Cette performance a permis au Produit intérieur brut (PIB) réel par habitant de presque doubler au cours de la dernière décennie, pour atteindre 2.370 dollars américains en 2010. Cependant, l’aggravation de la crise mondiale et la hausse significative des prix des matières premières ont fragilisé la marge de manœuvre des autorités marocaines. La croissance économique reste, quant à elle, en deçà des attentes par rapport aux montants des investissements, ce qui suggère l’existence d’inefficacités qui limitent la performance de l’économie.  L’existence de ces obstacles limite l’impact des nombreux plans de développement économique sectoriels mis en place (Pacte Emergence, Maroc Export et Plan Maroc Vert) : les lois et les réglementations de l’environnement des affaires nécessitent un réajustement, les compétences recherchées par les entreprises sur le marché du travail sont difficiles à trouver, l’accès aux terrains et aux financements reste problématique pour les PME, et le système judiciaire reste peu fiable pour la résolution rapide des litiges commerciaux. La compétitivité a ainsi été affectée et la croissance de ces deux dernières décennies a essentiellement été tirée par la demande intérieure. Cependant, l’expérience internationale montre qu’une croissance tirée seulement par la demande intérieure ne permet pas de maintenir des taux de croissance élevés. Ce modèle entretient des faiblesses dans le système de production de l’économie marocaine en l’orientant dans des activités traditionnelles à faible valeur ajoutée.

Sur quelles bases peut-on améliorer la compétitivité du Royaume?
Le Maroc devra probablement s’appuyer davantage sur la mise en œuvre de réformes de son économie plutôt que sur des dépenses supplémentaires pour concrétiser ses objectifs de développement. Les priorités pourraient concerner le défi de la croissance et le rôle du commerce et du développement du secteur privé, la réforme des finances publiques, avec une attention particulière au financement du système de protection sociale et aussi la gouvernance et la justice. Le Maroc pourrait bénéficier d’un renforcement de son intégration économique avec ses voisins régionaux, l’Union européenne, les États-Unis, et avec d’autres régions du monde qui disposent d’une croissance et d’une demande intérieure potentiellement élevée.

Quel serait l’apport de cette intégration?
Cette stratégie d’intégration offrirait un cadre de référence pour la mise en œuvre de politiques intérieures complémentaires, visant à améliorer la compétitivité (notamment la politique de concurrence, la passation des marchés publics, la protection des consommateurs). Une étape-clé sera la mise en œuvre du mandat confié au Conseil de la concurrence, notamment par le biais de l’adoption de la nouvelle loi qui prévoit spécifiquement l’indépendance du Conseil de la concurrence et élargit ses prérogatives. Cet avant-projet donnerait au Conseil de la concurrence le pouvoir d’enquêter et de sanctionner les pratiques anticoncurrentielles, telles que les ententes illicites et l’abus de position dominante, et de contrôler les opérations de concentration et les monopoles. Un accès élargi aux instruments financiers pour les PME représenterait également une avancée notable pour promouvoir la croissance du secteur privé. Malgré des améliorations notables, le système financier ne sert pas encore suffisamment les PME, ni une part importante des ménages à faibles revenus.

Quelles sont les opportunités du Maroc dans ce contexte économique instable?
Par rapport aux autres pays de la région, le Maroc bénéficie d’une image favorable auprès des investisseurs internationaux en raison de sa stabilité institutionnelle et de la direction réformatrice prise par Sa Majesté le Roi et les décideurs politiques. Toutefois, les réformes économiques et sociales nécessaires seront complexes à mettre en œuvre, mais doivent être lancées, bien que sur des phases progressives.

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