Une croissance plus forte devrait porter le déficit courant de la balance des paiements autour de sa norme de 3%.
Mission : Avec les anticipations d’inflation ancrées autour de 2 % et peu de signes de pression sur la demande, l’orientation de la politique monétaire actuelle, globalement neutre, est appropriée d’après le FMI.
La croissance économique marocaine s’accélère grâce à une demande intérieure vigoureuse. C’est ce que constate le Fonds monétaire international (FMI) et ce à l’issue des consultations établies au Maroc entre une équipe des services du FMI dirigée par Roberto Cardarelli et les autorités marocaines au sujet des consultations de 2025 au titre de l’article IV. A l’issue de cette mission qui s’est déroulée du 27 janvier au 7 février, plusieurs constats ont été relevés. A commencer par l’accélération de la croissance économique, le FMI indique qu’elle s’opère dans le contexte d’un nouveau cycle d’investissement dans de nombreux secteurs. Les prévisions du FMI tablent ainsi sur une croissance de 3,9% en 2025. «Selon nos prévisions, l’activité économique aurait progressé de 3,2 % en 2024 et s’accélérera pour atteindre 3,9 % en 2025, car la production agricole rebondira après les sécheresses récentes et le secteur non agricole continuera de se développer à un rythme soutenu dans un contexte de forte demande intérieure.
Une croissance plus forte devrait porter le déficit courant de la balance des paiements autour de sa norme de 3%, par rapport à ses niveaux bas actuels, tandis que l’inflation devrait se stabiliser autour de 2 %. Les risques pesant sur les perspectives sont globalement équilibrés, avec une grande incertitude concernant l’impact économique des tensions géopolitiques et du changement climatique », indique dans ce sens Roberto Cardarelli. Et de préciser : «Avec les anticipations d’inflation ancrées autour de 2 % et peu de signes de pression sur la demande, l’orientation de la politique monétaire actuelle, globalement neutre, est appropriée». Les services du FMI partagent également la même position de Bank Al-Maghrib quant aux futures modifications du taux directeur qui doivent rester tributaires des données. «Alors que l’inflation est revenue aux alentours de 2 %, Bank Al-Maghrib devrait continuer la préparation de sa transition vers un dispositif de ciblage de l’inflation», indique-t-il.
Les équipes du FMI ont également souligné l’impact positif des réformes fiscales. Ces dernières ont permis à la fois de couvrir notamment le coût des nouvelles mesures de soutien et de réduire le déficit budgétaire en 2024 plus que prévu par la loi de Finances. «Les récentes réformes du système fiscal et de l’administration fiscale ont contribué à élargir l’assiette de l’impôt tout en réduisant la pression fiscale. Par conséquent, les recettes fiscales en 2024 ont été supérieures aux prévisions. Le déficit du gouvernement central s’élevant à 4,1 % du PIB pour l’année, contre 4,3% annoncés dans le budget 2024 », peut-on retenir dans ce sens. Pour le FMI, épargner une partie des recettes exceptionnelles, à l’avenir, contribuerait à renforcer la marge de manœuvre budgétaire. L’orientation actuelle de la politique monétaire est appropriée et doit rester fondée sur les données. «Bien que le budget 2025 confirme le rythme progressif de l’assainissement budgétaire projeté l’an dernier, un éventuel surplus des recettes devrait servir à accélérer le rythme de réduction de la dette à des niveaux plus proches de ceux d’avant la pandémie», relève-t-on du chef de mission du FMI au Maroc. Et d’ajouter que «pour continuer à financer les réformes structurelles, il faudra peut-être redoubler d’efforts pour élargir l’assiette de l’impôt et rationaliser les dépenses, notamment en réduisant les transferts aux entreprises publiques dans le cadre de la réforme en cours du secteur et en étendant l’utilisation du Registre social unifié à tous les programmes sociaux».
En parallèle, les services du FMI ont salué la réforme en cours de la loi organique relative à la loi de Finances, qui devrait introduire une nouvelle règle budgétaire fondée sur un ancrage de la dette à moyen terme. « Des progrès satisfaisants ont été accomplis dans le cadre budgétaire à moyen terme, qui inclut une évaluation des risques liés au changement climatique. Les services du FMI encouragent les autorités à s’appuyer sur ces progrès en fournissant des informations complémentaires sur l’incidence des nouvelles mesures et en quantifiant les risques liés au recours accru aux projets de partenariats public-privé (PPP)».
Selon le FMI, les réformes structurelles doivent être axées sur le renforcement de la création d’emplois, notamment en ciblant mieux les politiques actives du marché du travail, en consolidant les programmes de soutien aux petites et moyennes entreprises et en supprimant les distorsions réglementaires qui entravent la croissance des entreprises. «Pour stimuler la création d’emplois, il convient de mettre en œuvre une nouvelle approche des politiques actives du marché du travail, en se concentrant sur la main-d’œuvre perdue dans le secteur agricole en raison de la succession des sécheresses. Il faudrait s’attacher tout particulièrement à encourager la croissance des petites et moyennes entreprises (PME) et à favoriser leur intégration dans les chaînes de valeur sectorielles », précise M. Cardarelli. Les services du FMI ont salué par ailleurs les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Fonds Mohammed VI pour l’investissement, qui devrait aider les PME à accéder à des financements en fonds propres. « Parmi les mesures susceptibles d’encourager le développement d’un secteur privé plus dynamique, on peut citer le renforcement du soutien apporté aux PME dans le cadre de la nouvelle Charte de l’investissement, le renforcement des Centres régionaux d’investissement pour leur permettre d’aider les PME à accéder aux ressources financières et techniques nécessaires à leur croissance, ou encore la révision du code du travail, du système fiscal et des cadres réglementaires et de gouvernance afin d’éliminer les distorsions qui incitent les entreprises à rester petites ou informelles», explique Roberto Cardarelli, précisant qu’il sera également nécessaire que la réforme en cours des entreprises publiques vise effectivement à assurer la neutralité du marché entre les entreprises des secteurs public et privé. Notons que l’équipe du FMI s’est entretenue avec de hauts responsables du gouvernement marocain à Bank Al-Maghrib, ainsi qu’avec des représentants des secteurs public et privé.