Six mois à peine après le trajet inaugural du navire Willis sur la ligne Dakar-Ziguinchor, la Somat (Société maritime de l’Atlantique) atteint son rythme de croisière. Le Conseil d’administration tenu hier, mardi 28 mars 2006 à Dakar, en présence notamment de Toufiq Ibrahimi, P-dg de la Comanav, actionnaire majoritaire avec 51% du capital et des administrateurs du port autonome de Dakar et du conseil des chargeurs sénégalais (49%), a approuvé à l’unanimité l’élargissement des activités de la société aux pôles fret et manutention. Il s’agit d’importantes évolutions, explique, Nour Eddine El Melouki, directeur général de la Somat. «Avec le Willis, qui est avant tout un navire passager, nous avons très vite été submergés par la forte demande du fret». Face à cet afflux, les chargeurs sont obligés d’attendre leur tour des jours durant, à moins de traverser la Gambie et d’affronter une infrastructure routière en mauvais état. L’idée du staff de la Somat est d’affréter un «navire roro», qui permettrait ainsi d’embarquer directement les camions et les remorques.
C’est le seul moyen de répondre aux besoins croissants des demandes de trafic entre la région de Casamance et le reste du Sénégal. Plus économique que la route, le trajet Dakar-Casamance est aussi plus rapide. Le Willis couvre la distance en 12 heures.
En élargissant ses activités au pôle fret, lequel, contrairement au pôle passager (service public, subventionné par l’Etat sénégalais), sera soumis au prix du marché, la Somat s’offre aussi les opportunités d’ouvrir un corridor pour capter le fret
des pays avoisinants, en particulier la Guinée, et de faire par la même occasion le «feedering» pour les grandes majors (Maersk est très intéressée).
Même raisonnement en ce qui concerne l’activité de la manutention. Une demande dans ce sens a été adressée aux autorités sénégalaises compétentes. «Sachant que dans la structure du transport maritime au Sénégal, la manutention représente 40% des coûts, nous ne pouvions pas ne pas nous intéresser à cette activité», déclare Ousmane Touré, directeur adjoint de la Somat. L’activité de la manutention au Sénégal, —complètement libéralisée, se caractérise par une forte atomicité et un retard technique énorme, ce qui n’est pas sans réduire la fluidité du trafic maritime. D’autres projets, non encore finalisés pour le moment, sont «dans le pipe». Cas de la traversée Dakar-Gorée. «Nous soumissionnerons dans les prochaines semaines, dès que l’Etat sénégalais procédera à un appel d’offres», explique El Milouki. Le grand chantier -encore au stade de projet- reste sans conteste le projet de bateau-taxi entre Dakar et sa banlieue. Ce serait une bonne alternative à la circulation urbaine à Dakar, qui connaît continuellement de gros bouchons.
Pour le moment, la ligne Dakar-Zigunichor reste l’activité principale de la Somat qui y opère avec le Willis, un bateau indonésien affrété et remis en état par la Comanav. Cela, en attendant l’acquisition par la Somat d’un navire neuf, actuellement en construction dans un chantier naval allemand. La livraison est prévue d’ici 20 mois. En attendant, la Somat qui compte 70 salariés, répartis en personnel navigant et sédentaire, compte faire tout ce qui est en son possible pour booster le taux de remplissage, aujourd’hui oscillant autour de 55%.
Si les touristes et la classe moyenne ont massivement répondu à l’appel du nouveau service, et au confort d’un navire bien équipé, en revanche, les couches populaires sont encore hésitantes. Le souvenir du naufrage du Joola, qui constitue la plus grande catastrophe moderne de l’histoire de la navigation maritime (devant le Titanic) est encore présent dans les esprits. «Le démarrage a été difficile mais aujourd’hui, les tendances sont très bonnes», estime M. El Mellouki.
Côté sécurité, la Somat opère quasiment comme les avions avec un système de réservation très moderne. Chaque passager doit se faire enregistrer au niveau de l’un des guichets de la compagnie avec une franchise limite de 20 kilos. Un système automatique de contrôle du poids prévient tout risque de dépassement. Les passagers qui accèdent à la salle d’embarquement sont isolés de tout contact avec l’extérieur. Leur acheminement vers le bateau se fait au moyen de deux bus loués par la Somat. Un système de suivi par satellite permet de suivre le bateau tout le long de son trajet. La position est communiquée aux autorités portuaires toutes les deux heures. L’augmentation de la composante touristique dans le nombre des passagers pousse les dirigeants à réfléchir à des formules de packages en partenariat avec les tour-opérateurs et les agents de voyages. Le projet
de commercialisation des week ends vers Cap Skrine, qui compte le meilleur Club Med d’Afrique, est finalisé. L’offre constituera l’une des grandes nouveautés de la Casamance.