La structuration de la mobilité devra tenir compte non seulement des spécificités territoriales au niveau des grandes villes mais aussi des petites villes et du monde rural.
Equation : « Mobilité et connectivité : quels schémas pour le Maroc de demain ? », c’est le débat qui a été soulevé jeudi dernier par l’équipe dirigeante de La Vie Eco dans le cadre du cycle de conférences. Retour sur les faits marquants d’un sujet qui impacte la qualité de vie des citoyens marocains.
Le débat sur la problématique de mobilité et connectivité aura duré plus de deux heures tant le sujet interpelle. Il y va de la qualité de vie du citoyen marocain. Le chantier est aussi directement lié au plan de développement du Royaume. En présentant le panel d’intervenants convié à apporter un éclairage sur la question, Fadel Agoumi, en tant que modérateur et directeur général du Groupe Caractères, le soulignera d’entrée. «Ce sont 20 millions de personnes qui font appel à la mobilité. Et les deux canaux préférés des Marocains sont la voiture et le bus». La description chiffrée qu’il avancera démontre l’enjeu, en effet, de fluidifier un trafic correspondant à pas moins de 4,3 millions de véhicules ! Mohamed Abdeljalil, ministre du transport et de la logistique, maîtrisant parfaitement le sujet, plantera aisément le décor. « La mobilité est la clé du nouveau modèle de développement. Elle est au cœur des priorités du citoyen avec la santé et l’éducation. L’équation à résoudre comprend non seulement l’aménagement du territoire et de l’urbanisme, la durabilité, la soutenabilité… autant de critères qui entrent en ligne de compte pour diversifier et intensifier les moyens de transport public au Maroc», déclarera-t-il. L’orateur n’omettra pas aussi de faire remarquer que «le citoyen marocain a subi le développement de la ville».
Cette phrase très explicite renvoie directement au bien-être du Marocain. Et c’est dans ce sens que M. Abdeljalil expliquera l’intérêt d’un plan de mobilité du territoire. Il citera aussi l’exemple de la Chine qui a réussi avec sa démographie à maîtriser les coûts de sa mobilité au service du citoyen. Le ministre citera plusieurs axes nécessaires à la mise en place de schémas viables au Maroc en matière de mobilité et de connectivité. Le spécialiste de la question n’omettra pas de faire remarquer que le Maroc possède un grand actif en matière d’infrastructures grâce aux différents programmes de développement, adoptés au fil des ans. Il s’agira aujourd’hui de travailler sur des modèles de services. En clair, la structuration de la mobilité devra tenir compte non seulement des spécificités territoriales au niveau des grandes villes mais aussi des petites villes et du monde rural. Le changement du parc des cars est aussi un chantier favorable à la mise en place d’un tel processus. Concernant le concept «Smart City», son impact en termes de mobilité partagé est attendu dans un horizon de 3/5 ans. Bref, le ministre est formel : «Le Maroc a besoin de se concentrer sur sa mobilité et les résultats sont attendus dans 6 voire 7 ans ». De nouvelles approches en matière de mobilité ont été inaugurées. Ceci pour prendre des décisions mûrement réfléchies. Au ministère, l’accélération des travaux d’aménagement du territoire urbain et des zones rurales devrait aller de pair avec le processus de régionalisation avancée. La feuille de route est fin prête depuis quelques mois et devra être discutée avec la Primature.
Pour sa part, le président de la région Casa-Settat, Abdellatif Maâzouz, a introduit son discours en faisant référence à une étude diligentée pour évaluer les attentes prioritaires du citoyen. Selon les résultats émanant de ces travaux, la mobilité représente la troisième priorité des Marocains. Au-delà, le président de la région déclarera que «l’arrivée du tramway a été traduite comme de la considération au citoyen». Pour l’heure, le schéma d’aménagement du territoire de la région est prêt et intègre les routes en plus des autres activités nécessaires au développement. Le dialogue entre les agences urbaines et les ministères compétents devra faciliter sa mise en place. Il est clair que la structuration de la mobilité fait partie des prérogatives des conseils régionaux appelés à élaborer des schémas régionaux d’aménagement des territoires. Ces derniers devant tenir compte de la démographie et de l’urbanisation.
« Si on ne fait rien en ne tenant pas compte de la démographie et du pouvoir d’achat le transport public collectif risque de ne représenter à terme que 20%, voire 30% dans les meilleurs cas… ». L’homme promet un décaissement de 18 milliards de dirhams pour les 5 prochaines années. Ceci contribuera à la mise en application du schéma de mobilité pour l’axe Casablanca-Settat. De son côté, le président-directeur général du Groupe CTM, Ezzoubeir Errhaimini, a abordé la problématique liée au transport informel qui devra être étudiée dans le cadre du schéma global de la mobilité. « Des mécanismes de remplacement ou une réglementation spécifique seraient les bienvenu », recommande le patron de la CTM. A la question de Fadel Agoumi : « Est-ce qu’il y aurait une quelconque désaffection à l’égard du car? », le représentant du Groupe CTM précisera que « l’autocar continue à assurer le service et que la demande est encore réelle». L’homme fera remarquer, d’ailleurs, qu’il n’existe pas de modèle pour identifier clairement les parts de marché de chacun des modes de transport. Pour lui, « il n’y a pas de concurrence entre les différents moyens de transport ». Concernant le car à proprement dit, l’introduction du Wifi et de prise pour charger le téléphone ont été deux éléments favorables pour attirer la clientèle. Au-delà, l’expert de la question de mobilité appellera à la diversification des services de transport car les 2.200 kilomètres de rails -mise à part le tronçon de Tanger Med- datent de plusieurs décennies. La diversification des services de transport intégrant le développement des réseaux ferroviaires est nécessaire pour que le Maroc ait un modèle de développement du système de transport à la hauteur de ses aspirations.
Pour y parvenir, la définition des rôles que va jouer chaque mode de mobilité, ainsi que des attributions des régions s’impose ipso facto. Il y va de la cohérence de tout un modèle concernant la mobilité. L’exercice n’est pas simple car comme le fera remarquer le ministre de tutelle, le Maroc a fonctionné pendant des années avec le Tout voiture. Inverser la tendance supposerait un réajustement fiscal pour inciter les citoyens à aller vers le transport en commun. Au Maroc, ce cap est encore loin. L’introduction de l’hybride et de l’électrique dans le marché de l’automobile l’atteste. La prise de conscience concernant la préservation de l’environnement est, cela dit, réelle. Le Maroc tient à ce positionnement confirmé à l’époque lors de l’organisation de la COP22. Les chantiers sont ouverts.