Le secteur de l’aéronautique en Tunisie et ses prestations en matière de transport aérien sont en pleine expansion comme en témoigne la confirmation d’une commande ferme de 16 avions Airbus la semaine dernière par le transporteur public Tunisair, permettant à la compagnie de développer son marché long-courrier et de donner un nouvel élan aux sous-traitants nationaux.
A l’occasion du salon de Farnborough en Grande-Bretagne, Tunisair a confirmé l’achat de 16 avions Airbus : trois gros-porteurs A330-200, trois long-courriers A350 et de dix A320, une transaction évaluée à 1,94 milliard de dollars qui portera la parc national à 30 avions. Tunisair et sa filiale Sevenair, qui assure les vols intérieurs, comptent actuellement 21 porteurs Airbus.Un accord de principe sur cette vente avait été conclu en avril mais n’avait pas été confirmé jusqu’à la semaine dernière. Selon l’accord, la majorité des avions seront livrés à Tunisair à l’horizon 2011.
La confirmation de la commande est tombée au cours d’une semaine chargée pour la compagnie aérienne nationale, qui vient d’annoncer une baisse de ses profits pour l’exercice 2007, motivée par une baisse du trafic passagers et une hausse du prix du pétrole. Si le chiffre d’affaires annuel de Tunisair reste stable, le résultat net affiche une baisse entre 2006 et 2007,
passant de 37 millions de dollars à 28 millions de dollars, tandis que les coûts ont augmenté de quelque 2,6 millions de dollars selon les estimations. Le trafic passagers a quant à lui enregistré un léger repli de 5%.
En dépit de ces résultats décevants pour 2007, la compagnie semi-privée a mis en place un vaste programme de renouvellement et de renforcement de sa flotte. Les nouveaux avions commandés permettront au groupe de renforcer son offre long-courrier vers l’Amérique du Nord et l’Asie. La compagnie aérienne a également annoncé son intention de lancer une augmentation de capital pour le porter à 84 millions de dollars par l’incorporation de la somme de 14 millions de dollars. Tunisair, chef de file du transport aérien national avec une part de marché de plus de 35%, détient par ailleurs 51% du capital de Mauritania Airways, renforçant ainsi son positionnement régional.
Si la stratégie de développement de Tunisair s’avère impressionnante en soi, le marché du transport aérien tunisien dans son ensemble connaît une évolution remarquable. Le pays compte six aéroports internationaux mais ils sont limités par leur capacité d’accueil face à l’accroissement des flux des visiteurs. L’aéroport international Habib Bourguiba à Monastir, par exemple, devrait faire l’objet de travaux d’extension très attendus suite à l’attribution l’année dernière de la concession portant sur l’exploitation de l’aéroport durant
quarante ans à l’opérateur turc TAV. D’une capacité de 3,5 millions de passagers par an, l’aéroport de Monastir est actuellement le premier du pays en termes de trafic avec plus de 4,2 millions de passagers sur un total de 10,5 millions de passagers, selon les statistiques gouvernementales. TAV a également remporté la concession relative à la construction puis l’exploitation du nouvel aéroport d’Enfidha, situé à l’est du pays. Le nouvel aéroport, qui est entré en activité le 24 juillet dernier, sera essentiellement dédié à l’acheminement des touristes et devrait pouvoir accueillir 7 millions de passagers par an dans un premier temps. La concession des deux aéroports tunisiens s’élève à 840 millions d’euros d’après les
estimations.
Selon la presse locale, les deux compagnies privées tunisiennes, spécialisées dans les vols charters, sont actuellement en cours de négociations pour joindre leurs forces. Karthago Airlines, basée à Djerba, et Nouvelair, à Monastir, ont engagé des discussions en vue d’une éventuelle fusion tandis qu’une nouvelle compagnie «low cost» prépare son entrée sur le marché tunisien. SBA Airlines, joint-venture entre investisseurs tunisiens et étrangers privés, devrait obtenir toutes les autorisations nécessaires et prendre son envol sur une base régionale d’ici à la fin de l’année 2008.
Le secteur de l’aéronautique en Tunisie, qui n’en est à ses balbutiements, est aussi en plein essor. D’après la presse locale, la signature du partenariat industriel avec Tunisair permettra à Airbus de créer 200 emplois en Tunisie dans le secteur aéronautique. Apparemment, cette disposition est appelée à remplacer les 1200 emplois initialement prévus au terme de la réalisation d’une nouvelle usine par Latécoère, équipementier aéronautique français. Mais le projet fut abandonné suite à la rupture des négociations entre Latécoère et Airbus qui envisageaient le développement des opérations industrielles du fournisseur en France. Latéocère, déjà présent en Tunisie où il possède deux unités de production spécialisées dans le câblage, compte 800 postes d’emploi et prévoit d’embaucher 200 personnes supplémentaires.
L’industrie aéronautique mondiale accuse un réel retard de livraison, le carnet de commandes de Boeing et d’Airbus étant plein jusqu’en 2012. Cependant, l’envolée des coûts des matières premières – l’aluminium a enregistré une hausse de 90% – s’est répercutée de manière sensible sur la chaîne d’approvisionnement, renchérissant les coûts et retardant des livraisons. Par conséquent, les industriels commencent à se tourner vers les pays à bas coûts. Parallèlement, la hausse de la demande en avions au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, conjuguée à l’augmentation des coûts logistiques, encourage les équipementiers aéronautiques à se tourner vers des pays à l’image du Maroc et de la Tunisie, où la main-d’oeuvre hautement qualifiée est amplement reconnue pour ses compétences technologiques, sans compter que la main-d’oeuvre tunisienne vaut nettement moins chère que celle d’Europe, aussi bien de l’Ouest que de l’Est.
• Oxford Business Group
30 juillet 2008