La Banque centrale sera habilitée au contrôle en vertu de la loi de protection du consommateur
Finances : Bank Al-Maghrib se dote des moyens pour mieux contrôler la commercialisation des crédits gratuits ou à 0%. La Banque centrale revient à la charge alors que ses appels à l’ordre restaient le plus souvent lettre morte. Eclairages.
La Banque centrale sonne la fin de la récréation au sujet des faux crédits gratuits. Il y a quelques années, la Banque centrale avait attiré l’attention de certains acteurs sur le marché sur l’utilisation abusive parfois par certains acteurs du marché des crédits à 0%. Dans certains cas, ces crédits n’ont de gratuit que le nom puisque les clients se retrouvent à payer des frais cachés qui font office d’intérêts déguisés. Le hic, c’est que les rappels à l’ordre de BAM restaient le plus souvent des lettres mortes. Et pour cause. Certains profitaient du vide juridique pour continuer les mêmes pratiques sachant que les crédits gratuits sont régis par un autre texte, à savoir la loi sur la protection du consommateur alors que les prestations et autres services bancaires sont encadrés par la loi relative aux établissements de crédit et organismes assimilés.
Un texte qui encadre également l’action de la Banque centrale. Ainsi, BAM se trouvait les poings liés en quelque sorte face à certaines pratiques qui profitaient d’une zone grise née d’un vide juridique. Qu’à cela ne tienne! Bank Al-Maghrib revient à la charge par le biais de la future loi sur la protection du consommateur. Un projet de loi est actuellement soumis au Secrétariat général du gouvernement en prélude de son introduction dans le circuit d’adoption législative. Les responsables ont profité de l’occasion de la mise à jour de la loi sur la protection du consommateur pour mieux encadrer la commercialisation des crédits gratuits sur le marché national et mieux lutter contre les faux crédits à 0%.
De nouvelles dispositions ont été introduites à la mouture déposée par le ministère de l’industrie et du commerce à l’avant-projet de loi sur la protection du consommateur. Des nouveautés qui permettent enfin à la Banque centrale d’encadrer ce genre de produits financiers largement utilisés par les acteurs du marché.
Définition
La première nouveauté concerne l’introduction d’une définition exacte par le biais de la future loi de ce que doit être réellement un crédit gratuit. Alors que dans la législation en vigueur, l’article 100 de la loi 31-08 édictant des mesures pour la protection du consommateur dispose que le crédit gratuit est «tout crédit remboursable sans paiement d’intérêts», l’avant-projet de loi actuellement au Secrétariat général du gouvernement ajoute des détails supplémentaires. L’article 100 amendé stipule ainsi que «le crédit gratuit est tout crédit remboursable sans paiement d’intérêts ni autres frais supplémentaires».
Actuellement, les clients sont obligés parfois de payer ce qui est communément appelé «des frais de dossiers» avant d’obtenir leur crédit présenté comme gratuit. Plus loin encore, la nouvelle loi donne des prérogatives supplémentaires à la Banque centrale. L’article 166 bis stipule dans le nouveau texte qu’il sera «dévolu à Bank Al-Maghrib de contrôler la conformité des établissements de crédits et organismes assimilés aux dispositions de la présente loi».
Dans la législation en vigueur, l’article 166 dispose que «outre les officiers de la police judiciaire, les enquêteurs spécialement commissionnés à cet effet par l’administration compétente sont qualifiés pour procéder à la recherche et à la constatation des infractions aux dispositions de la présente loi. Ils doivent être assermentés et porteurs d’une carte professionnelle délivrée à cet effet par l’administration compétente, selon les modalités fixées par voie réglementaire. Les agents visés au présent article sont astreints au secret professionnel sous peine des sanctions prévues à l’article 446 du code pénal».
Nouvelle manche
C’est donc une nouvelle manche qui se profile à l’horizon entre la Banque centrale et certains acteurs du marché utilisant abusivement la mention du «crédit gratuit». Pour rappel, un courrier avait été envoyé fin 2018 aux sociétés de financement et concessionnaires de voitures pour se conformer aux dispositions des articles 100, 101 et 102 de la loi sur la protection du consommateur.
L’article 101 en vigueur actuellement dispose que «toute publicité effectuée dans le lieu de vente comportant la mention «crédit gratuit» ou proposant un avantage équivalent doit indiquer le montant de l’escompte consenti en cas de paiement comptant. Toute publicité comportant la mention «crédit gratuit» doit porter séparément sur tout produit, bien ou service». Pour sa part, l’article 102 de la même loi stipule que «lorsqu’une opération de financement comporte une prise en charge totale ou partielle des frais de crédit, le fournisseur ne peut demander à l’emprunteur ou locataire une somme d’argent supérieure au prix moyen».
Cependant, ces articles manquaient de clarté en l’absence d’une définition claire du crédit gratuit sans oublier que la Banque centrale n’est pas clairement autorisée à intervenir et contrôler dans la loi 31-08 édictant des mesures pour la protection du consommateur, sous sa forme actuellement en vigueur. A noter enfin que le Secrétariat général du gouvernement (SGG) avait mis en ligne, sur son site Internet, un avant-projet de loi modifiant et complétant la loi n° 31-08 édictant des mesures de protection du consommateur.
Le texte était soumis aux commentaires du public jusqu’au vendredi 30 juin 2023. La loi n° 31-08 édictant des mesures de protection du consommateur est destinée à compléter le dispositif juridique existant en matière de protection du consommateur et met en place un cadre favorable pour la promotion du rôle des associations de protection du consommateur. Le texte vise à assurer une information claire, objective et loyale au consommateur (prix, étiquetage, conditions de vente) ; renforcer la protection des intérêts économiques du consommateur (interdiction ou réglementation de certaines pratiques commerciales) ; rééquilibrer les relations consommateur-fournisseur (interdiction des clauses abusives, garantie, crédit). Il est question de renforcer le mouvement consommateur en permettant aux Associations de protection des consommateurs d’être reconnues d’utilité publique et autorisées à ester en justice les droits garantis aux consommateurs, le droit à l’information: fournir au consommateur toutes les informations nécessaires avant la conclusion d’un contrat de vente.
La future loi introduit une définition exacte à la notion du crédit gratuit qui ne doit comporter plus aucun frais caché ou déguisé. (D.R)
Avant-projet de loi
Législation
Le ministère du commerce et de l’industrie avait annoncé, il y a quelques semaines, l’élaboration d’un avant-projet de loi visant la mise à niveau des dispositions de la loi 31.08. Le nouveau texte prévoit notamment l’introduction de nouvelles définitions liées aux gestionnaires de plateformes de commerce en ligne, à la livraison, à la liquidation et aux pratiques commerciales trompeuses.
Il institue aussi l’obligation pour les gestionnaires de plateformes de commerce en ligne de fournir certaines informations aux consommateurs sans oublier l’extension des dispositions concernant la livraison, initialement applicables aux contrats conclus à distance, à tous types de contrats.
Le législateur va également introduire une définition d’un prêt gratuit comme un prêt remboursé sans intérêts ni autres frais en plus de l’autorisation donnée aux agents de Bank Al-Maghrib pour contrôler la conformité des établissements bancaires et des établissements de crédit aux exigences de la présente loi. Enfin, le nouveau texte prévoit la création du Conseil consultatif supérieur de la consommation.
Nouveautés de l’avant-projet de loi
Solde
L’avant-projet de loi déposé au Secrétariat général du gouvernement encadre les opérations de soldes en fixant leurs périodes notamment.
Contrôle
Autorisation des agents de Bank Al-Maghrib à contrôler la conformité des établissements bancaires et des établissements de crédit aux exigences de la nouvelle loi.
Pratiques commerciales
Introduction de nouvelles définitions concernant les plateformes de commerce en ligne, la livraison, la liquidation et les pratiques commerciales trompeuses.