Economie

Visibilité réduite avec l’Europe

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ALM : L’élargissement de l’Union européenne vers les pays de l’Est constitue-t-il une menace pour le Maroc ?
Driss Ben Ali : Il ne fait aucun doute que l’élargissement de l’Union européenne se répercutera sur ses relations avec le Maroc. La menace provient du fait que, sur plusieurs niveaux, les pays de l’Est sont plus compétitifs que le Maroc. Ces pays disposent d’un fort capital humain. car il ne faut pas oublier que les systèmes des ex-pays socialistes ont réussi tôt l’alphabétisation de leurs populations. De ce fait, ces pays représentent une concurrence sérieuse. D’un autre côté, il faut savoir que les investissements européens qui vont vers ces pays engendrent une haute valeur ajoutée. Par contre, ceux qui vont vers les pays du Maghreb sont d’une faible teneur. Aujourd’hui, la mondialisation laisse très peu de marges aux économies qui ne disposent pas d’un excellent savoir faire et qui ne se sont pas préparées à la logique de libre-échange qui prédomine actuellement. Dans un contexte où il y une offre excédentaire de qualifications, il est clair que le Maroc se trouve dans une situation bien difficile.
Pensez-vous que cette situation soit due à des «failles» dans la politique européenne de coopération et une insuffisance de l’aide au développement vis-à-vis du Maroc ?
Je pense que le Maroc n’exploite pas suffisamment toutes les possibilités qui se présentent à lui avec l’Europe. Si l’on prend le volet de l’aide au développement par exemple, on voit que ce créneau est investi par beaucoup d’ONG bidons qui font de la chasse aux fonds communautaires et ce, à des fins qui ne relèvent pas que de l’intérêt général. Ceci n’exclut pas le fait qu’il existe des projets sérieux qui répondent parfaitement à l’esprit de cette dynamique de coopération. Mais, le problème, à mon avis, est que le Maroc ne dispose pas de la visibilité et du sérieux nécessaires pour optimiser un apport dont il a pourtant bien besoin. À cela s’ajoute le manque de politique prospective qui permet au pays de situer ses besoins et ses priorités. S’il est vrai que le Maroc dispose d’une stratégie d’ouverture sur son environnement, celle-ci demeure insuffisante tant qu’il n’y pas de visibilité dans nos rapports avec l’Europe.
Cette absence de visibilité ne risque-t-elle pas d’avoir des répercussions négatives ?
Certainement. Mais, il ne faut pas oublier que le Maroc est engagé dans une perspective d’ouverture économique aussi incontournable qu’irréversible. C’est un défi. Et un défi, il faut le relever. Simplement, nous ne somme pas suffisamment préparés à cette perspective, telle qu’elle est actuellement menée. Il faut savoir que dans une logique de libre-échange, les pertes sont immédiates tandis que les gains sont progressifs. Comment gérer la transition ? Telle est la question qu’il faut désormais se poser. Parmi les pertes immédiates qui seront visibles, on peut citer la montée du chômage et la disparition de certains secteurs, improductifs ou tout simplement non compétitifs. À terme, ce scénario est dangereux. Avec un taux de chômage dans les villes qui s’élève aujourd’hui à 19%, les risques de son amplification sont énormes. Le problème, encore une fois, est justement l’absence d’une politique capable de garantir une transition,tout en limitant les dégâts que cette dernière risque d’entraîner. Les autorités sont conscientes de cette situation, mais les mesures prises jusque-là restent largement insuffisantes.
Ce qui m’étonne dans ce cadre c’est le discours de certains responsables qui relève plus du darwinisme économique, voir du technocratisme primaire, sans se soucier des grave conséquences que peut engendrer une telle vision à l’échelle de l’Etat.

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