Editorial

A boire et une nuit d’hôtel…

© D.R

Les ex-maîtres d’oeuvres du projet balnéaire de premier ordre de Taghazout se croyaient intouchables dans ce pays. Pourtant ils sont en cours d’être dessaisis du projet. Le motif est simple : non-respect du cahier des charges. Adil Douiri, le ministre du Tourisme, qui avait martelé devant l’opinion publique à plusieurs reprises qu’il ne tolérerait aucun manquement au contrat d’aménagement a tenu parole. Au-delà de la résolution du ministre, l’Etat marocain face à des intervenants qui se gaussaient abondamment de leurs entrées dans les sphères du pouvoir et de leur puissance irrésistible, a tenu bon. Il a refusé de se laisser soumettre à des forces aussi glauques que troubles. C’est un fait remarquable et inédit. Un acte fondateur d’un Etat de droit économique. La société Palais des Roses, bien connue à Agadir, n’a donc pas tenu ses engagements. Ses difficultés à assumer ses responsabilités dans ce projet important proviennent globalement de la dégradation des relations entre Cheikh El Kamel de Dallah El Baraka et de son associé, à la surface financière moindre, le docteur Azzedine Lakhouaja. L’attelage s’est brisé non seulement à cause de l’amplitude énorme sur le plan financier entre une fortune mondiale et un intermédiaire qui a certes beaucoup d’entregent mais qui est devenu, tellement son ambition personnelle s’est affûtée, encombrant voire dangereux pour celui qui l’a fait. Le bilan est désormais connu. Un scandale hôtelier d’un autre âge nommé Palais des Roses à Agadir auquel nous avons réservé plusieurs éditions de ALM, et une éviction en bonne et due forme des deux protagonistes du projet décisif de Taghazout. Dans les faits, cette intifada de l’Etat marocain vient résonner comme une profession de foi en direction des investisseurs. Le Maroc est un pays ouvert dans lequel les opportunités d’investissement sont colossales mais tout cela doit se réaliser dans les normes incontournables de transparence, de rigueur et de respect des engagements des uns et des autres. Il n’y a désormais plus de place aux improvisations exotiques du management à l’orientale fait de dîners joyeux, d’intérêts mêlés à l’envi et de mélanges hardis des genres. Certainement que le groupe Dallah El Baraka reste le bienvenu au Maroc, il peut même participer au nouveau tour de table de Taghazout, mais Cheikh El Kamel devra à l’avenir éviter la mise en avant de structure moins hasardeuse et plus professionnelle. La société Palais de Roses n’était pas sérieuse dès le départ. Pour un projet de l’envergure de Taghazout, on ne pouvait pas décemment associer une personne morale de calibre international et une personne physique du calibre d’un ex-secrétaire devenu associé, par la force des choses. On regrettera seulement le fait qu’il y a à peine 24 heures on lisait encore dans un grand quotidien francophone de la place un article dithyrambique dans une tentative pitoyable de tromper les lecteurs et de réparer l’irréparable, sur Azzedine Lakhouaja et son oeuvre. Mais, malheureusement, les faits sont têtus et la réalité incontournable. Quand sur le front de la transparence, la vérité avance ce sont des journalistes qui tombent, premières victimes de dommages collatéraux très peu déontologiques. Un des protagonistes de cette affaire a dit un jour avec beaucoup de délectation : «Au Maroc, un journaliste, je lui paie à boire, je lui offre une nuit d’hôtel et je lui fais écrire ce que je veux.» Mais là, apparemment, cet axiome ne s’est pas vérifié. Peut-être que, simplement, notre pays est en train de changer.

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