Editorial

Attention au protocole !

Connaissez-vous le protocole de Kyoto ? Peu de choses, comme tout le monde. Et pourtant, il est très important pour l’avenir de l’humanité et de ses activités. Figurez-vous que toutes les émissions de gaz liées aux activités humaines seront réglementées. On ne peut plus dorénavant lâcher dans la nature n’importe quel gaz, n’importe comment et n’importe où.
C’est clair chacun aura son quota de gaz à respecter, sinon ce sont les sanctions internationales qui tombent. C’est du sérieux, je vous dis !
Vous pensez que le Maroc n’étant pas un pays industrialisé, nous sommes, donc, peu concernés par ce protocole. Vous vous trompez. L’effet de serre concerne l’ensemble de la planète. Au moins, devant cet effet-là, nous sommes tous égaux. «On produit peu ou rien chez nous, alors comment voulez-vous que nous contribuions à l’effet de serre par des gaz qui n’existent pas ?» La question est pertinente, mais elle oublie l’essentiel : nous pétons beaucoup et on rote pas mal aussi. Nous libérons de facto des gaz. L’aérophagie de nos concitoyens est séculaire. Ils en lâchent des caisses. Un couscous plus un litre de leben et une petite sieste rapide, et la fermentation est assurée. Un tagine aux petites pommes de terres et aux olives vertes accompagné de trois litres de Coke et de 5 pains ronds à la farine, et l’usine est en marche.
C’est l’équivalent de la production d’une centrale nucléaire de première génération dans l’ex-bloc de l’Est. Ça dégage.
Maintenant, tout cela est fini. Avec le protocole de Kyoto, d’abord il faut s’excuser après avoir pété, même si vous êtes tout seul. Ensuite, cela n’est possible qu’une fois par vingt-quatre heures, uniquement les jours où vous êtes ouvrables. Les réunions des bureaux politiques des partis marocains seront extrêmement surveillées, surtout les vendredis après-midi, jours de couscous. Un dispositif spécial pour le PJD sera mis en place pour le même jour, d’autant plus que les gandouras des militants encouragent par leur confort naturel – ablutions mises à part -une activité aréophagique assez prosélyte.
Au RNI, la vigilance est de mise, compte tenu de l’âge moyen des responsables. Avec l’expérience, on se lâche plus facilement, même si on prétend être du centre. L’Istiqlal, lui qui vit dans une bulle nationaliste a plus de mouron à se faire. L’effet de serre est déjà très avancé dans ce parti. Ils se serrent tous les coudes pour rester au gouvernement.
Quant à nos amis de l’USFP, c’est carrément Essaouira, la ville du vent. Ce qu’ils dégagent ces derniers temps, ce n’est plus de la transition démocratique mais du pur transit intestinal. Pour ceux qui ignorent encore l’origine des guerres intestines de ce parti, ils sont maintenant édifiés.
Quant à notre société civile – c’est-à-dire une femme très libérée, un journaliste indépendant féru de l’article 19, un bourgeois gentilhomme en décennie sabbatique, un gauchiste de salon pas trop cher à nourrir, un républicain d’occasion, mais aussi une bonne et un militant associatif de terrain en 4×4 Cayenne – elle se la pète beaucoup. À elle seule, cette noble société savante, ces derniers temps, elle produit le tiers du gaz émis sur le plan national. C’est vous dire l’influence qu’elle exerce sur l’effet de serre-moi-la-louche. Rien que Mohamed M’Jid, à lui seul – au fait, il nous manque beaucoup ces derniers temps, j’espère qu’il va bien – fournissait de quoi alimenter les turbines d’électricité d’une ville moyenne comme Bejaâd.
Et le Makhzen me diriez-vous, légitimement, qu’est-ce qu’il dégage ? D’abord du respect et de l’estime, je ne veux de problèmes avec personne. Et ensuite franchement, rien. C’est interdit de lâcher quoi que ce soit. Idem pour les Mokhaznis du Méchouar qui ont pourtant de la ressource. Il y a un protocole tellement strict qu’à côté, celui de Kyoto paraît une franche rigolade de potaches. Allez lâchez-vous et à demain.

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