Editorial

Aznar ne viendra pas !

© D.R

Il y a des intuitions journalistiques qui trompent rarement. Bien sûr, des confrères espagnols, qui se gaussent de bien nous connaître diront encore que c’est un nouveau coup de la «prensa alauita». Une version ibère à peine dégrossie de l’usage très tendance, chez nous, du concept historique de makhzen ravalé, comme chacun sait, à la faveur de la transition démocratique, par quelques pseudo-intellectuels approximatifs, au rang d’injure. Voilà pour la piqûre de rappel. Reste que José Maria Aznar ne va pas venir présider, avec son homologue marocain Driss Jettou, à Rabat, la Haute commission maroco-espagnole prévue pour les 8 et 9 décembre 2003. Mais, pourquoi donc ? Ce n’est pas parce que le sous-marin diesel qui peut garantir sa sécurité contre les pirates de Salé, a la pompe d’injection encrassée ou que le porte-avions à voiles qu’il souhaite emprunter pour impressionner les Moros a le mât fêlé, ce n’est pas cela du tout. La raison est simple. Nos histoires de voisinage ne l’intéressent plus. Lui, il joue avec Bush et Blair, pas avec les bougnoules. Il veut tenir son rang. Depuis qu’il a obtenu la majorité absolue au Cortès, il y a quatre ans, et bien avant, il se sert du Maroc comme argument politicien interne pour rester au pouvoir et fédérer les droites espagnoles en flattant leur racisme congénital le plus dangereux et en célébrant leur patriotisme le plus rétrograde et le plus désuet. Une posture antimarocaine réveille et galvanise mieux, et plus, un peuple qui doute. Cela lui évite une réflexion sérieuse sur l’avenir de l’Espagne en Méditerranée. N’importe quel sondeur amateur vous confirmera cela à Madrid. Le problème avec Aznar c’est que l’héritage arabe de l’Espagne est devenu un pactole électoral populiste et démagogique. En outre, si vous le permettez, pourquoi voulez-vous qu’un président du conseil espagnol qui quitte son job en mars 2004 vienne se prendre la tête avec des «Moros» qui ne lui sont plus d’aucune utilité dans sa carrière politique ? Pour le panache ? Même pas. Il préfère envoyer au contact son vice-président, et patron du Parti Populaire, Mariano Rajoy, tâter du Marocain, ça peut toujours servir pour l’avenir. Qui sait ? On aura fait quand même deux mandats avec Aznar. Un vrai bail. Au compte, on en aura eu pour huit ans et un paquet d’embrouilles. Mais, finalement on regrettera, peut-être, l’homme de Perejil. Il nous a quand même fait croire que nous étions une grande puissance militaire en exhibant ce qui reste de fonctionnel dans la glorieuse marine espagnole pour refroidir nos ardeurs expansionnistes sur un îlot fondateur de l’identité caprine en Méditerranée. Ridicule. Et l’on en passe : El Ejido, accord de pêches, Sahara marocain, l’activisme au Conseil de sécurité, l’axe d’acier Madrid-Alger… C’est sûr, ce Monsieur ne viendra pas chez nous. Même pas pour un simulacre, assez cynique, de réconciliation. Maintenant, s’il vient, il nous étonnera vraiment. Quoique…il est capable de tout, ce fier et noble andalou.

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