Les prochaines élections communales vont-elles régler le problème de la gouvernance des grandes villes marocaines ? La réponse est nette. C’est non. Deux données majeures justifient cette affirmation lapidaire. La première, c’est la difficulté pour l’élite locale de se frayer un chemin vers les Conseils. Cette difficulté est aggravée par la prééminence des notables ou leur domination, sans partage, sur la vie politique locale. Les partis politiques eux-mêmes sont obligés de reproduire ce système, à l’origine féodale mais qui, parfois, prend des allures carrément mafieuses, pour obtenir des résultats honorables dans des localités rétives à toute implantation politique. Tant que les élites instruites, ouvertes sur la modernité et convaincues des valeurs de la démocratie seront éloignées des Conseils, nous aurons une vie locale au-dessous du niveau requis pour créer le progrès et, surtout, le partager. La deuxième donnée qui rend encore plus improbable la gestion des villes est le mode de scrutin en vigueur. C’est un mode qui ne permet pas l’émergence, nette et sans fioritures, d’un leadership légitime et indiscutable. On vote pour des conseillers dans les quartiers — des circonscriptions assez réduites — pour les envoyer au Conseil. Et là, à la faveur d’alliances, souvent personnelles puisque les voix sont individuelles et peu partisanes, on élit, en amont, par des procédures informelles, aussi douteuses qu’opaques, un Président-compromis ou un Maire-otage. C’est le principe de la pochette-surprise qui prédomine. On ne sait jamais, à l’avance, de quoi ces convulsions «démocratiques» vont accoucher. Peut-être que le Maroc qui maintient cet état de fait n’a pas encore décidé de se doter d’une vraie démocratie locale, forte, propre et véritablement représentative.