Editorial

Bref aperçu de la démocratie israélienne

© D.R

Cinq cent-deux adultes israéliens ont été interrogés, avec une marge d’erreur de 4,5%, par un institut de sondage pour le compte du journal Yédiot Aharonot sur leur confiance à l’égard d’Ariel Sharon. Près de 68% le considèrent comme un bon Premier ministre et 61% le considèrent capable de diriger le pays avec succès. Par contre 76% des Israéliens se déclarent insatisfaits de sa gestion de l’économie de leur pays. Une semaine avant, cette fois-ci pour le quotidien Maariv sur pratiquement la même question 48% des Israéliens étaient contents de la manière dont Sharon opère, 43% mécontents et 9% sans opinion.
Là on voit bien fonctionner le modèle « démocratique » israélien dans toute sa splendeur. Ce ne sont pas les sondages qui sont en cause, mais l’état complètement délétère de l’opinion qui oscille entre la croyance aveugle dans Ariel le messie du terrorisme d’État et l’inquiétude profonde que cette même confiance irrationnelle installe dans les esprits. La vérité que veulent dans ce cas occulter les Israéliens eux-mêmes, c’est que Sharon ne leur a amené ni la sécurité, ni la paix. Ils le savent, confusément. Ils n’osent pas encore le reconnaître tant qu’ils n’ont pas encore une alternative crédible et opérationnelle. Mais c’est le problème de leur «démocratie» à eux. Elle doit leur offrir le Grand Israël, Jérusalem, les colonies, l’élimination d’ Arafat, l’extermination des Palestiniens, l’effacement du fait national palestinien etc. C’est un programme, aussi. Sauf que la démocratie « modèle » qui doit le réaliser fera toujours appel au terrorisme d’État et à des criminels comme Sharon. Un autre exemple. Leur ministre de la Défense Binyamin Ben Eliezer déclare que la position des Américains est très « dure » envers Yasser Arafat. Il dit même que Dick Cheney, le vice-président des USA lui aurait déclaré : «Pour ce qui me concerne, vous pouvez le prendre (Yasser Arafat)».
Ce n’est pas fini, il ajoute après avoir rencontré Donald Rumsfeld, le secrétaire d’État américain à la Défense, et Condoleezza Rice, la conseillère de G.W. Bush : «ils m’ont clairement dit que parler à Arafat c’est perdre son temps et Dick Cheney a été le plus extrémiste sur ce point ». Et tout cela, bien entendu, fait un grand tapage dans la presse israélienne. Du grand art démocratique. Adopter une politique de terrorisme d’État aveugle, sanguinaire et criminelle pour neutraliser un adversaire engagé dans une guerre de libération nationale, vendre cette même politique à son tuteur américain et finalement faire endosser et assumer directement à ce tuteur cette même politique.
C’est fort. Binyamin Ben Eliezer peut même s’offrir le luxe de trouver l’attitude américaine «extrémiste» dans une sorte de compassion calculée ou de cruauté humaniste. C’est du sionisme politique dans ce qu’il a de plus caricatural, de plus dévoyé et de plus, historiquement, contre-productif. Il s’agit de paix, ni Washington, ni Tel-Aviv ne veut le comprendre. Sharon et ses amis sont en train de faire perdre à G.W. Bush les dernières onces de crédibilité qu’il pouvait avoir. Aucun président américain par le passé n’a subi l’influence sioniste d’une manière aussi directe, aussi dangereuse pour les Etats-Unis et pour la paix dans le monde.
C’est effarant. L’incompétence potentielle que l’on prêtait à G.W. Bush après sa discutable élection se matérialise d’une manière académique sur le dossier palestinien. Et Arafat n’y est pour rien.

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