Editorial

Chaud Business

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Laurent Gerra n’est pas un comédien français neutre. Il a certes un talent indéniable d’humoriste, mais ses prises de position publiques montrent, pour ce qui le concerne, une absence totale de distance à l’égard du conflit israélo-palestinien. Il est libre de soutenir avec ostentation la politique que mène en Israël Ariel Sharon. Comme le sont, libres, les Marocains qui ont manifesté pacifiquement leur désaccord avec lui. À une posture militante déclarée a répondu un engagement militant public. La mécanique est connue dans toutes les démocraties. Où est le mal ?
Maintenant il faut savoir que, dans cette affaire sensible, l’art de Laurent Gerra n’est pas en cause. Cela veut dire que ce qui s’est passé ne relève nullement de la censure. Ce qui est en cause c’est qu’il est difficile, en ces temps de parabolisation sauvage des sociétés, pour un artiste de créer une frontière étanche entre son oeuvre, ou supposée telle, et ses convictions idéologiques ou politiques qu’il exprime souvent publiquement.
Laurent Gerra sait, parce qu’il connaît le pays, que le Maroc est une terre de paix, de tolérance, d’ouverture à l’autre et de coexistence culturelle et cultuelle. Mais ce qu’il devrait aussi savoir, c’est que notre pays a historiquement beaucoup donné à la paix au Moyen-Orient sans que cette générosité ne se départît jamais d’un soutien actif, total et indéfectible au peuple palestinien et à son droit à un État avec Al Qods comme capitale. Et cela n’est pas une affaire d’humour, c’est l’engagement d’un peuple.
Cette donnée fondamentale a été oubliée par les promoteurs du spectacle de Laurent Gerra qui n’en est pas, par ailleurs, à sa première prestation dans notre pays. Ils ont pris, par insouciance, un risque majeur qui peut être, à la limite, considéré comme une provocation de présenter, de nouveau, un artiste dont les positions sur un sujet difficile et dramatique heurtent la sensibilité des Marocains.
La vitalité de l’intégrisme islamiste ou la radicalité de certaines associations de soutien à la Palestine ou à l’Irak n’y sont pour rien, dans cette affaire, à moins de vouloir caricaturer la réalité des faits et occulter leur profondeur dramatique.
Nous sommes à la veille d’une guerre américaine, illégale, unilatérale et injuste, contre l’Irak. Dans cette très mauvaise conjoncture, nous devrions, tous, nous opposer à tous ceux, quel que soit leur bord, qui veulent, par des actes inconsidérés ou irresponsables, exacerber les extrémismes. Que Laurent Gerra nous excuse, on rira plus tard.

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