Editorial

Éditorial

Le prince Moulay Hicham vide son chargeur sur le pays. Au plus mauvais moment. En pleines émeutes embrasant le monde arabe. C’est dire le fossé abrupt qui le sépare désormais, et pour très longtemps, du Maroc de son cousin le Roi Mohammed VI. Le prince avance maintenant démasqué. Projet contre projet, la qualité, dont il excipe mollement, d’universitaire neutre spécialisé dans le monde arabe, ne trompe personne. Dans l’interview qu’il a donnée au quotidien espagnol El Pais, il commence par livrer des généralités : «Le Maroc présente davantage de médiation sociale entre le pouvoir politique et les masses mais ces médiations sont sérieusement décrédibilisées.» Ensuite, il embraye sur une critique «hygiéniste», à la banalité partagée,  en guise d’argument d’autorité, pour mieux cerner le Souverain : «Le fossé entre classes sociales sape la légitimité du système politique et économique. Les diverses formes de clientélisme dans l’appareil d’état mettent en péril sa survie.» Maintenant que le dispositif est en place, Hicham Ben Abdellah, toute à sa haine dynastique, et à sa frustration successorale, va ouvrir le feu comme un serial killer de supermarché américain : «Si la majorité des acteurs politiques reconnaissent la monarchie, il n’en demeure pas moins vrai qu’ils sont mécontents de la vaste concentration du pouvoir dans l’exécutif.» Il aurait fait mieux s’il était en position, devrions-nous penser ? C’est une utilisation abusive à des fins personnelles d’un débat politique constitutionnel légitime dans le pays. Cela devient une fusillade avec prise d’otage. Mais ce qu’il  pense être un coup de grâce arrive. Il présente, peut-être, un peu de nouveau par rapport aux discours du passé récent, une petite trace infime de bienveillance,  mais il ne faut pas se leurrer, c’est une perfidie pour mieux  achever son œuvre de disqualification : «Indépendamment des qualités humaines de l’individu, et même s’il s’agit d’un monarque éclairé, l’étendue du pouvoir monarchique depuis l’indépendance est incompatible de fait avec cette nouvelle dimension. Et la dignité du citoyen est devenue aujourd’hui fondamentale.»
Opposer la dignité du citoyen au Projet de Mohammed VI est malhonnête  intellectuellement. C’est une contrevérité absolue. Il le sait, tout à son amertume, et il force le trait du ressentiment. Au final, tout le raisonnement tombe à l’eau. Dans toutes les dynasties, celle des Alaouites n’y échappe pas, il y a des branches mortes. Celle de Moulay Hicham l’est. Elle ne le conduira jamais au pouvoir — quelle improbable révolution miserait sur un prince défroqué?— quel que soit l’ordre de succession que lui attribuent des journalistes vicieux et complaisants. Il profite d’une conjoncture difficile — une «fenêtre de lancement» comme il aime à dire — pour porter un grave préjudice moral à sa famille et à son pays. C’est, au final, du très mauvais «Iznougoud», le calife qui veut être à la place du calife, au stade terminal.

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