Un éditorialiste algérien du quotidien Liberté s’étrangle. Tout seul. Il ne comprend pas pourquoi le Royaume du Maroc, à ses yeux le pays le plus arriéré, et le plus honni, du monde, ne s’enflamme pas. Pourquoi il n’est pas, déjà, à feu et à sang ? Dans son journal, ils mettent, certes, en avant la désinformation espagnole. Ils font, certes aussi, la promotion des prédictions familiales «généreuses» de Moulay Hicham et de l’amertume acide d’Aboubakr Jamai au sujet de leur pays — un avenir noir, violent et sanglant pire qu’ailleurs nous est prédit — mais ils ont l’air, tout de même, d’être déçus par la réalité des choses. Nos voisins n’arrivent pas à comprendre — leur référentiel marocain est appauvri par des années de propagande grossière — que le Maroc est entré en transition depuis près de 15 ans, et que sur ce chemin beaucoup a été fait, et beaucoup reste à faire. La construction de la démocratie n’est pas une chose aussi aisée que commander une autoroute à nos amis chinois. A l’adresse de nos confrères algériens faisons un peu de rattrapage ! Qu’est-ce-qui a été fait au Maroc, et pas chez eux, pour nous autoriser aujourd’hui, si nous le voulions, à nous réclamer d’une exception que nous rejetons, d’ailleurs, par principe ? Nous sommes contre le fait de se gausser d’une quelconque exception marocaine, nous laissons cela aux «congratulateurs» professionnels, mais nous sommes pour l’accélération de la cadence des réformes. Alors qu’avons-nous fait que nos voisins n’ont pas fait ? D’abord, nous, on n’a pas fait de guerre civile à 200.000 morts. Ce sang, il faut bien qu’il soit écopé un jour. Nos militaires sont dans leurs casernes et ne sont pas accrochés comme des mollusques au rocher du pouvoir. Nous, le seul parti unique que nous avons c’est le Trône vis-à-vis duquel tous les Marocains sont égaux selon un pacte multiséculaire. Nous sommes un vieil état, une vieille monarchie qui jouit d’un pouvoir légitime. Nous, on a des partis politiques et des syndicats auxquels les luttes, d’hier et d’aujourd’hui, ont conféré une légitimité historique et démocratique indéniable. Nous, nous avons mis sur la table nos sinistres années de plomb : lecture de la page, reconnaissance des torts, indemnisation personnelle et collective, lancement de projets de réformes constitutionnelles. Un luxe d’introspection que même nos amis espagnols n’ont pas pu s’offrir. Nous, nous avons mis le développement humain au cœur de notre stratégie de croissance. Un jour Abdelaziz Bouteflika s’est moqué des actions de la Fondation Mohammed V qui distribue de la soupe alors que, lui, distribue des appartements ! Les appartements de Boutef se sont évaporés dans la nature et le travail consolidé de la Fondation Mohammed V a inspiré un programme original comme l’INDH que toutes les institutions internationales saluent aujourd’hui. L’INDH — un filet social — permet, dans le sillage des Objectifs du millénaire, à baisser notablement la pression sociale née des convulsions de l’économie de marché. Au final, les distributeurs de Harira ont damé le pion aux extracteurs de gaz. étonnant, non? Mais arrêtons là cette énumération interminable. J’invite, simplement, mon confrère, s’il le souhaite et s’il en a l’indépendance, à venir voir de lui-même, pour se forger sa propre conviction sur le Maroc. Il aura ainsi fait un pas en avant dans la compréhension des vrais problèmes de l’Algérie.