Editorial

La foi qui sauve

© D.R

Que peut-on, pour la nouvelle année, souhaiter au Maroc ? Nos meilleurs voeux, bien sûr, de réussite et de prospérité. Plus de mobilisation pour relever les défis qui attendent. Et plus de clairvoyance et de lucidité pour le règlement de nos problèmes, par la définition d’une politique, une grande politique produit d’une grande ambition nationale, qui mettra le pays sur la voie de la croissance, de l’égalité et de la prospérité : on le voit bien, chez nous, même à l’occasion, somme toute banale, de voeux de fin d’année, le ton monte. Et l’exercice « festif » ordinaire devient rapidement un exercice imposé –par notre réalité- assez loin des figures de style habituelles.
Ce que nous souhaitons pour notre pays n’est pas extraordinaire. En fait, nous voulons qu’il consolide tous les acquis qu’il a pu engranger ces dernières années. Qu’il se projette dans l’avenir avec sérénité et confiance en soi. Et qu’il bascule définitivement et solidement dans le camp des pays où la loi s’applique, où les droits de tous sont garantis et où la liberté de s’exprimer et d’entreprendre, le respect des droits et devoirs de chacun, et la solution pacifique des conflits inhérents à toute démocratie, sont une réalité. Ce n’est pas peu demander, que tout cela, pour la nouvelle année, mais les voeux, me semble-t-il, n’engagent que ceux qui ont la foi.
Une question : comment la Côte d’Ivoire a, en 2002, sombré dans le chaos ? Poser cette question, qui peut paraître incongrue, peut ressembler à une provocation en cette période de l’année. Non, vous allez voir que l’exercice des voeux n’interdit aucune inquiétude. Bien au contraire, il cherche, en conjurant le sort par des formules convenues, à exorciser le présent.
Continuons. comment la Suisse de l’Afrique a été saisie par l’anarchie tribale, sectaire, raciste et guerrière ?
Comment le modèle économique ivoirien, tellement vanté par le passé, s’est effondré d’un seul coup en libérant des énergies négatives faites de privation, d’exclusion, de pauvreté et de haine ? Comment finalement, un pays à l’image internationale parfaite –l’avenir de l’Afrique disait-on- s’écroule tout à coup ? Il est bien difficile de trouver des réponses aisées à toutes ces questions mais l’on peut bien y réfléchir en ces temps de bilans, de sommes et de rétrospectives.
Toutefois, la leçon ivoirienne ne nous apprend qu’une chose et une seule. Tous les acquis sont fragiles sous nos contrées africaines. C’est un déterminisme sociologique et culturel. Les consolider est un travail de tous les instants car tout peut, sous l’effet d’un petit rien, basculer et faire table rase du meilleur de nous mêmes, du meilleur de nous tous.
Pour notre pays, nous souhaitons le mieux, justement, et nous voulons pour lui une évolution ambitieuse, pacifique et construite sur des fondements solides. Ceci est, bien entendu, l’affaire de tous les Marocains, mais il se trouve que les Marocains ont de nombreux problèmes, non résolus, qui les mettent à la portée et à la bonne distance de tous les aventuriers, de tous les extrémismes et de toutes les démagogies nihilistes.
Pour donner de l’espoir aux Marocains, la démocratie de notre pays n’a pas trouvé l’élite utile susceptible de la faire vivre. Ni nationalement, ni localement. Pour l’année 2003, année d’élections communales décisives, il est dramatique de faire ce constat. Alors que ce qui est en jeu est un véritable projet de société,une vision du pays dans son environnement international et une certaine idée de notre culture séculaire faite de paix, de tolérance et du souci des autres, nous sommes encore en train de nous poser des questions élémentaires sur notre démocratie malade de son élite politique. C’est, encore une fois, tout simplement affligeant.
Pour les cinq ans à venir, le gouvernement de Driss Jettou doit réussir. Nous le lui souhaitons de tout coeur. Pour les mois à venir, la confiance des opérateurs économiques marocains dans leur pays doit revenir. C’est ce que nous espérons ardemment. Pour les semaines à venir, il faut qu’un élan nouveau sorte les Marocains de leur torpeur, car aucun pays n’est à l’abri d’une crise cardiaque. Nous prions Dieu pour cela. Et pour les jours à venir, après l’extinction des lampions du Nouvel an et de leurs excès, plus aucun Marocain ne devra pouvoir encore dire : je suis exclu car je suis pauvre, je suis exclu car je suis handicapé, je suis exclu car je suis une femme, je suis exclu car je suis un enfant ou je suis exclu, sinistré, pauvre et à la rue parce que ma ville est mal gérée ou parce que les ressources de ma commune ont été dévorées par des prédateurs sans foi, ni loi. Ce sont de simples voeux, pour nous tous, formulés simplement. Encore faut-il que la foi, la vraie, habite les coeurs ! Bonne année.

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