Driss Jettou est dans l’obligation d’aller chercher, sur le plan formel, une majorité à la chambre des représentants. C’est cette majorité, en votant, qui lui permettra de mettre en oeuvre le programme économique et social qu’il présentera devant la chambre.
Or le paradoxe de Driss Jettou est qu’il n’est pas un Premier ministre issu d’une formation politique. C’est d’ailleurs, le sens de sa nomination. Il est obligé d’avoir des alliances objectives, souvent sur la base de divers compromis, avec des partis politiques présents au Parlement, auxquels il a proposé des postes ministériels. Le résultat, certainement pas très brillant, on le connaît, désormais. Il traduit surtout la crise profonde que vit la classe politique marocaine et son indigence à se projeter utilement dans l’avenir du pays et son incapacité à être à l’écoute des citoyens. C’est tout. Ils sont là uniquement pour quémander des postes ministériels au mépris de toute forme de dignité et de respect pour les Marocains. Moi d’abord, ensuite mes intérêts, ma famille et mes amis. C’est cette méthodologie qui a été opposée à Driss Jettou. Elle a de quoi inquiéter. Puisqu’on ne peut jamais constituer une majorité parlementaire honnête et sincère sur des calculs aussi sordides que dégradants.
Mais, au-delà de tout cela, le Premier ministre était dans l’obligation de composer pour pouvoir compter sur une majorité, quelle que soit finalement sa nature, pour pouvoir après la déclaration de politique générale devant les représentants initier, dans les meilleurs délais, les grands chantiers qui l’attendent.
C’est, en définitive, le destin naturel d’un Premier ministre non engagé politiquement -il ne fera quand même que de la politique- que d’aller chercher ses soutiens sur la base de conditions et de critères qu’ils ne maîtrisent pas tous. Souvent, ils lui sont imposés par les tiers.
Driss Jettou pouvait-il imposer un cabinet intégralement technocratique et aller la main sur le coeur, au nom du patriotisme, chercher une majorité au Parlement ? Cela n’était pas possible car les partis politiques, tous, étaient remontés et ne voulaient que des postes ministériels. La part du gâteau électoral, s’il ne se traduit pas directement en portefeuille ministériel, ressemblerait à du vulgaire pain perdu.