Editorial

Le verrou démocratique

© D.R

Est-ce que le Maroc ressemblera politiquement, après les élections législatives du 27 septembre 2002, à la Suisse ou à la Suède ? Est-ce que tous les espoirs mis dans ce scrutin décisif vont nous permettre d’opérer une bonne fois pour toutes une mise à niveau politique salutaire qui nous sortira des méandres d’une vie politique qui cultive l’arriération sociale et culturelle et le sous-développement économique ?
À la lecture du discours royal du 20 août 2002, ces questions se posent immédiatement à l’esprit. Plus, l’allocution royale est tellement claire, cohérente et fondatrice d’un Maroc nouveau que tous les Marocains appellent de leurs voeux que l’espoir immense qu’elle porte en elle est rapidement remplacé par une sourde inquiétude si le rendez-vous du 27 septembre devait être, effectivement, raté.
S.M. Le Roi Mohammed VI n’a laissé aucune zone d’ombre sur ses convictions, sur ses choix ou sur sa résolution. Dans la conjoncture précise que vit notre pays, aucun espace « politique » susceptible d’être rempli par la surenchère politicienne, la tactique partisane de courte vue ou les manipulations électoralistes n’a été laissé vacant par le Souverain.
Après ce discours royal, aucun interstice ou entrebâillement ne permet à des forces régressives quelles qu’elles soient de s’infiltrer dans un projet de société qui se veut résolument démocratique, ouvert, moderniste et novateur.
Pas de démocratie pour les non-démocrates. Cette affirmation solennelle du souverain vient à point nommé rappeler un dogme fondamental et une doctrine essentielle qui fondent la vision démocratique du chef de l’État telle qu’elle se déploie depuis trois années de règne. Les non-démocrates qu’ils soient d’extraction obscurantiste ou extrémiste, qu’ils soient de nature nihiliste et puérilement aventurière, ne pourront se jouer de la démocratie marocaine pour la confisquer. La porosité, parfois constatée, d’un système politique en transition démocratique ne peut servir d’encouragement à quiconque pour priver le grand nombre de ses droits par le tapage et la provocation, pour travestir ses valeurs et son identité par des accointances exogènes coupables ou pour railler ses institutions les plus sacrées sous couvert d’une pseudo modernité non assimilée et importée.
Les réponses à ces dérives, malgré l’énormité et parfois l’ampleur de la provocation qui cherche à favoriser une dérive régressive de l’État, seront apportées par la loi dans un cadre d’un État de droit qui se consolide de jour en jour. Sur ce point fondamental, il apparaît que la démocratie marocaine à la faveur ou non d’élections générales se défendra sur la base de ses valeurs et de la loi.
Ceux qui, aveuglés par leur pertinence habituelle, ont vu dans les actions menées par les services nationaux de sécurité contre la dérive criminelle de certains activistes islamiques marocains une manoeuvre préélectorale en ont eu pour leurs frais. Il est évident, à travers le discours du Souverain, qu’un projet de société basé sur le progrès et l’émancipation, sur une vision sociale fondée sur la tolérance et la solidarité et sur un attachement aussi explicite et solennel à l’État de droit, ne peut se régler sur une conjoncture aussi aléatoire que banale sous nos cieux et qui relève surtout de la gestion ordinaire des affaires de la cité même dans ce qu’elles ont de plus complexe ou de plus dramatique.
Il faut savoir raison garder. La lutte contre tous les extrémismes n’est pas une question d’opportunités électorales ou non. C’est une politique de sécurité globale définie par l’État et mise méthodiquement en oeuvre par des services de sécurité professionnels et dévoués. Il ne s’agit pas d’autre chose.
Par ailleurs, sur les autres points majeurs de l’allocution du souverain : la nature des candidats et de l’élite politique, le rôle des partis dans le choix des hommes et la confection de programmes crédibles, l’engagement de l’administration et la promotion d’une nouvelle citoyenneté, l’on peut constater que le tour de la maison Maroc a été soigneusement fait. Charge pour l’administration, les candidats, les partis politiques et les citoyens électeurs d’être à la hauteur du rendez-vous. Même si la Suisse ou la Suède, comme modèles, ne seront pas pour nous une réalité de demain mais chaque pas que nous ferons dans ce sens pour nous rapprocher de la construction d’une démocratie authentique comptera dans la mise à niveau de nos moeurs électorales.

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