Editorial

Les cocus de l’Histoire

© D.R

Après la proposition inopinée de Abdelaziz Bouteflika sur la partition du Sahara, le Polisario se délite comme une motte de beurre au soleil. La panique d’un côté et la soumission passive, de l’autre, confère aux mercenaires de Tindouf une posture plus qu’inconfortable. Ils ne savent plus ce qu’ils doivent faire, penser ou répliquer.
Ils ne savent pas jusqu’à quel point la proposition de Bouteflika engage toute l’Algérie, comme ils ignorent quelle est la part des généraux dans la fabrication de cette décision. Aucune fumée blanche ne sort de la cheminée de La Mouradia et aucune rafale d’explications ne sort de l’état-major des armées à considérer que ces deux institutions soient effectivement indépendantes l’une de l’autre. Bien, on fera comme si, le revirement de Bouteflika est tellement radical qu’il a laissé sur le carreau les tenants de l’autodétermination des peuples et les sponsors zélés de la chimérique Rasd.
Premier round. Alger. Le dernier conseil du gouvernement algérien « dénonce la campagne virulente dirigée contre l’Algérie en accusant les autorités marocaines de vouloir tromper l’opinion ». Sur ce point, on est d’accord, c’est de bonne guerre. Mais la partition ce ne sont pas les Marocains qui l’ont inventée. Il faut voir du côté de la présidence. Ensuite, le gouvernement algérien souhaite « l’avènement d’une solution politique par le biais d’un accord mutuellement acceptable aux deux parties en conflit ». C’est bien, sauf que depuis la sortie bouteflikienne, l’autre partie clairement identifiée c’est, désormais l’Algérie. Après, vient la cerise sur le gâteau: le Polisario s’est laissé tondre son autodétermination sur le dos et n’émet aucune objection sur la partition. S’il le fait, il se retrouverait face à face, en fâcheuse posture, avec Bouteflika. G.W. Bush serait alors bien fondé de le considérer comme un président farfelu.
Deuxième round. Toujours à Alger. Le Comité national algérien de solidarité avec le peuple sahraoui ( Cnasps, comme ils disent) est perdu. Le 20 février, il se fend d’un communiqué hilarant de détresse. Personne ne lui a expliqué le virage présidentiel sur le Sahara marocain. Ce sont les cocus de l’histoire. Ça fait des années qu’ils ânonnent la même chose, et voilà que tout change : «…toute autre solution ne peut être envisagée qu’avec l’accord, le consentement et la participation effective pleine et entière du peuple sahraoui et de son représentant légitime le Front Polisario.» En clair, cela veut dire qu’ils sont tous doublés par Bouteflika qui les a mis hors-jeu. Ça suscite de la pitié et peut être une certaine forme de tendresse. Une marionnette à laquelle on coupe les fils est toujours gentiment pitoyable. L’Algérie et ses intérêts d’abord, le reste c’est du folklore pour des nigauds comme Mohamed Abdelaziz.
Troisième round. Bruxelles. Cette fois-ci c’est le EUCOCO, la coordination des comités européens de soutien au peuple sahraoui, qui se sent mal. Dans un communiqué daté du 22 février, les COCO, appelons les comme ça, demandent à l’Espagne de «reprendre l’initiative pour la tenue sans retard d’un référendum d’autodétermination au Sahara occidental». Rien sur la partition, et pourquoi faire appel à l’Espagne ? Alger aurait-elle trahi la cause ? On est obligé de le croire car le texte suppure d’amertume et ne pipe mot sur l’Algérie. Bien au contraire, il affirme d’une manière risible et inculte que «l’Espagne est toujours, aux termes des conventions internationales, la puissance en charge et responsable de conduire à terme le processus de décolonisation au Sahara occidental.» C’est une vraie blague belge qui ne fait rire personne. M. Pierre Galand, président des COCO, déçu d’Alger, est le seul à la trouver drôle et réécrit à la sauce belge le droit international. C’est affligeant ?
Maintenant après ces trois rounds, que dit l’arbitre ? Bouteflika mène aux points, mais il n’est pas à l’abri d’un KO. Son jeu est de plus en plus improbable et sa garde est bien basse. Un uppercut peut à tout moment lui être asséné par les galonnés et le mettre par terre pour le compte. Il y a trop de cocus dans cette histoire ? Cela devient dangereux.

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