Editorial

Mercedes ou BMW ?

La Primature et le ministère des Finances ont, sérieusement, réagi à l’annonce par la presse de l’achat par le gouvernement de nouvelles voitures pour les ministres et secrétaires généraux. On a eu droit à un vrai démenti en bon uniforme. L’information relayée par la presse est au mieux un canular par temps d’austérité budgétaire ou au pire– cela arrive – une manipulation. Donc sur le fond, il faut l’admettre, cette information s’est révélée fausse sauf pour le cas de quatre voitures de ministres – dont celle de Karim Ghallab, ministre notamment des Transports et de l’Equipement – largement amorties. La voiture de Karim Ghallab datait du temps où Rachidi Ghazouani était responsable de ce département. En conséquence, les voitures ont été normalement changées, par le truchement de l’Office national des transports (ONT) dans l’orthodoxie comptable et budgétaire la plus admise. On n’en parle plus. Il faut probablement souligner que cette question a été mal posée depuis le départ. L’important n’est pas de savoir en quoi roule un ministre, mais pour qui il roule et à quelle vitesse. Maintenant, pour redevenir sérieux, cette affaire pose un autre problème. Celui des marques. De quel droit se permet-on de changer des Mercedes contre des BMW ? Pour moins que cela dans des pays similaires, des référendums ont été organisés. On ne joue pas impunément avec la sensibilité et les habitudes des citoyens. Soit nous sommes en démocratie, comme on nous le rappelle souvent, alors il faut respecter la voix du peuple. Soit nous sommes encore dans les années de plomb, comme on veut nous le faire, parfois, croire, et l’on se demande alors pourquoi il n’y a que les voitures qui changeraient. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre, mais moi, en tout cas, je me comprends. Pour approcher cette question très scientifique, il faudrait à mon sens voir dans quoi roulera Salah El Ouadie, le nouveau membre de la haute autorité de l’audio visuel ou Driss Benzekri, le secrétaire général du CCDH. Cela aura véritablement du sens puisqu’on en est, malheureusement, là. À présent sur le pan strictement automobile, il faut dire que la Mercedes est une voiture excellente sur laquelle il n’y a aucune objection à faire. Elle tient son rang. Mais, il faut surtout admettre que la BMW Série 7 a, actuellement, des arguments imparables. Hi-tech, robuste, raffinée et d’un confort assez inédit. Un vrai salon ambulant à l’ambiance finement feutrée qui réconcilie les passagers, ministres ou pas, avec les codes route. Ouvrons la plaquette commerciale de cette noble machine. Qu’est-ce qu’on y lit avec délectation : «Alliant architecture moderne et extrême qualité des matériaux, la nouvelle BMW Série 7 est une nouvelle référence en termes de luxe et de confort. Son habitacle offre un intérieur au design épuré qui donne immédiatement des sensations d’espace et de liberté.» Voilà pour la forme. Maintenant pour la substance on lit avec une saveur indiscutable: « Le V8 animant la BMW Série 7 allie puissance et intelligence de la manière la plus fascinante qui soit. Il présente toutes les qualités d’un moteur souverain : sa puissance, son fonctionnement de velours, sa spontanéité et son mordant dès les bas régimes répondent à toutes les exigences que l’on peut formuler envers un huit cylindres BMW. » Ce n’est plus la présentation d’un véhicule racé, c’est une vraie déclaration gouvernementale. Un vrai programme de gouvernement. Voire, un projet de société. Le programme de Driss Jettou tient là en quelques petites lignes. Tout dans la saveur, la délectation et la gouvernance confortable. Si avec tout cela ses ministres ne sont pas transportés par des élans créatifs et résolument réformateurs, c’est que l’ONT leur a fourgué des «Palio» customisées B.M. Ce n’est pas correct. Il ne faut jamais rappeler à un ministre d’où il vient.

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