La nuit des Jamours tourne à la foire d’empoigne. Les uns, les organisateurs, veulent du direct. Les autres, les gars de la télé, veulent être sûrs de ne pas avoir à diffuser sans filet un produit long, bavard, obséquieux, sentencieux ou faussement confraternel. Ils font valoir un droit de montage qui est à la télévision, toutes choses étant égales par ailleurs, ce que le droit de cuissage -ou de jambage- est à la culture du Moyen Âge : le seigneur se donnant le droit d’honorer le premier la mariée lors de la nuit de noces d’un serf ou d’un vassal. Voilà pourquoi les histoires de Jamours finissent toujours mal, en général. L’événement qui consiste à donner des prix à des copains qui font des émissions de télé sans fâcher les autres copains qui font aussi des émissions de télé, a été, donc, ajourné. Tout cela devrait, théoriquement, nous faire une belle jambe s’il n’y avait pas, aujourd’hui, cette chose qui vexe sérieusement les Marocains, qu’est le mépris médiéval dans lequel le tient la racaille comique qui truste la production dans les chaînes publiques, au moins, pendant ce mois de Ramadan. Désormais, chez nous, la critique des programmes de télé ne relève plus de l’analyse pluridisciplinaire des expressions artistiques par des intellectuels qualifiés, elle relève, plutôt, du Code de procédure pénale ou, par mansuétude, de la Cour des comptes.