Emploi

Indemnité pour perte d’emploi : Les explications de Ahmidouch

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ALM: L’indemnité du chômage est l’une des principales réalisations des dernières années. Est-ce qu’elle a déjà commencé à fonctionner ? Concrètement comment ça se passe?
 

Said Ahmidouch: Tout d’abord, il y a lieu de préciser que la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) a mis en place une indemnité pour perte d’emploi et non pas une indemnité de chômage. L’indemnité pour perte d’emploi est basée sur une logique assurantielle alors que l’allocation chômage sur une logique d’assistance sociale.
L’indemnité pour perte d’emploi a pour objet d’assurer un minimum de revenu pendant une période de temps limitée (6 mois maximum) pour le salarié qui perd de manière involontaire son emploi à condition de justifier une période d’assurance minimale au régime de sécurité sociale géré par la Caisse nationale de sécurité sociale (salariés permanents). Cette indemnité vise essentiellement l’accompagnement des bénéficiaires ayant une ancienneté suffisante pour qu’ils puissent réintégrer le marché du travail. C’est pourquoi, durant la durée d’indemnisation, le bénéficiaire peut bénéficier des services d’orientation et recevoir une éventuelle formation qui va lui faciliter son retour au marché de l’emploi. Pour bénéficier de cette indemnité, l’intéressé remplissant les conditions précitées doit déposer une demande à l’agence CNSS de son choix, dans un délai ne dépassant pas 60 jours à compter de la date de perte d’emploi.
 
Le faible taux de la couverture sociale dans notre pays pose problème. Est-ce que la Caisse nationale de sécurité sociale pourra jouer un rôle pour élargir ce taux ? Et comment ?

Durant les dix dernières années, le Maroc a vécu un tournant dans le domaine de la sécurité sociale. C’est ainsi que notre pays a mis en place, pour la première fois, en 2005, un système de couverture médicale de base pour les salariés du secteur public et privé et le Régime d’assistance médicale qui a été élargi à l’ensemble de la population économiquement démunie à partir de 2011. Ceci a permis de porter le taux de couverture médicale de 15% en 2005 à 59% en 2014. A cela s’ajoutent les efforts déployés par la Caisse nationale de sécurité sociale dans le domaine de la couverture sociale des salariés du secteur privé, ce qui a permis de porter le taux de couverture de cette population de 45% en 2005 à 81% en 2014. Néanmoins, le taux de couverture sociale de l’ensemble des travailleurs marocains n’a évolué que de 25 à 35% sur la même période, niveau qui reste inférieur au niveau enregistré par certains pays maghrébins, notamment en Algérie et en Tunisie.
 

Comment expliquez-vous cette situation ?

ça s’explique essentiellement par l’absence, jusqu’à présent, d’une couverture sociale et médicale pour les travailleurs marocains non salariés qui représentent 57% de la population active occupée. C’est pourquoi, et afin d’améliorer le niveau de couverture sociale au niveau de notre pays, la mise en place dans les meilleurs délais d’un régime particulier de couverture sociale et médicale pour cette catégorie de population s’impose. Ce chantier est lancé par le gouvernement depuis quelques mois et a été confié à une commission interministérielle dont la Caisse nationale de sécurité sociale est un membre très actif. Le travail de cette commission a permis aujourd’hui d’élaborer le projet de loi cadre qui sera examiné lors de cette session parlementaire et l’objectif du gouvernement est de mettre en œuvre ce nouveau régime vers la fin de cette année ou au plus tard le début de l’année prochaine. Bien sûr, la Caisse nationale de sécurité sociale ne ménagera aucun effort pour réussir la mise en œuvre progressive de ce nouveau régime comme elle l’a fait par le passé pour le chantier de l’assurance maladie obligatoire (AMO).
L’idée est de commencer immédiatement par les métiers organisés, les autres métiers suivront au fur et à mesure du degré d’organisation.

La récupération par les personnes qui n’ont pas pu atteindre la barre des 3.240 jours de travail de leurs cotisations est une autre nouveauté. Combien de personnes sont-elles aujourd’hui concernées par cette mesure et quel en est le coût pour la CNSS ?

La mesure du remboursement des cotisations salariales est prévue pour les assurés qui ont cessé toute activité salariée et ayant atteint l’âge de la retraite sans réunir la période minimale d’assurance ouvrant droit au bénéfice d’une pension. Cette mesure est entrée en vigueur en juillet 2014. Depuis le démarrage de cette prestation et à fin mars 2015, la Caisse nationale de sécurité sociale a effectué près de 33.000 remboursements pour un montant de 148 millions de dirhams. Le stock des bénéficiaires potentiels de cette mesure est estimé à près de 490.000 pour les deux premières années et un flux annuel de 50.000 bénéficiaires. Le coût des deux premières années a été estimé par la Caisse nationale de sécurité sociale  à près de 1 milliard de dirhams.

Alors que le gouvernement parle de la réforme du système de retraite en raison de problèmes dans plusieurs caisses, quelle est la situation pour la Caisse nationale de sécurité sociale  et comment la réforme pourra-t-elle se décliner pour vous ?

Actuellement la Caisse nationale de sécurité sociale se porte plutôt bien. Les différentes études actuarielles réalisées en interne ou au sein de la commission technique de la réforme des retraites montrent que les cotisations de la branche des pensions ne suffiront plus à faire face aux prestations à partir de 2026.
Néanmoins, faut-il préciser que le maintien de l’équilibre financier au-delà de l’horizon de 2060 nécessiterait d’augmenter le taux de cotisation actuel de 2 points en passant de 11,89 à 14%. Ceci est possible et pourrait se faire progressivement sur un horizon de 5 à 10 ans. Il existe également d’autres paramètres sur lesquels la Caisse nationale de sécurité sociale peut agir dans le cadre de la réforme paramétrique, notamment l’allongement de la durée minimale de cotisation pour le bénéficiaire d’une pension, la revalorisation du plafond de sécurité sociale et son indexation sur un indicateur reflétant l’évolution des salaires et le taux de remplacement avec l’âge légal de départ à la retraite.

La Caisse nationale de sécurité sociale est également habilitée à contrôler la déclaration par les employeurs de leurs salariés. Comment comptez-vous renforcer votre contrôle ?

Le système de contrôle des déclarations faites par les employeurs a connu une refonte structurelle depuis 2007. Ce contrôle a été centralisé au niveau d’une entité spécifique qui établit la programmation et l’organisation des opérations d’inspection et de contrôle. Aujourd’hui, le contrôle ne se fait plus par une seule personne mais par des équipes et le ciblage se base sur des études sectorielles et le croisement des données internes avec des données externes. Cette façon de faire permet d’identifier les phénomènes de sous-déclaration, non-déclaration et sur-déclaration. Parallèlement, nous nous basons également sur les réclamations des assurés. Ce système transparent et efficace nous a permis d’atteindre des réalisations supérieures avec moins d’inspecteurs et de contrôleurs.

Vous fixez un plafond de 6.000 dirhams pour les retraités du privé. Le temps n’est-il pas arrivé pour revoir ce plafond ?

Le  plafond a été fixé, depuis 2002, à 6.000 dirhams et n’a pas évolué depuis malgré l’évolution continue des salaires des cotisants, ce qui constitue une aberration et impacte négativement le niveau des pensions des futurs retraités. C’est pour cela et afin de ne pas programmer un appauvrissement des futurs pensionnés que nous continuons à militer pour son relèvement tout en l’indexant sur un indicateur qui reflète mieux la réalité de l’évolution des salaires, tel que le salaire moyen ou médian des salariés déclarés ou le Smig comme c’est le cas dans d’autres régimes nationaux et internationaux.

L’indemnité pour perte d’emploi a démarré en décembre 2014, quel bilan en faites-vous ?

Depuis son entrée en vigueur le 1er décembre 2014, la Caisse nationale de sécurité sociale a reçu près de 4.000 dossiers dont 2.278 sont acceptés pour un montant à servir sur 6 mois de 32 millions de dirhams, et pour le reste des dossiers, les bénéficiaires ne remplissent pas les conditions exigées pour en bénéficier. Il y a lieu de noter néanmoins que la contribution de l’Etat n’est toujours pas reçue par la Caisse nationale de sécurité sociale.

Y a-t-il du nouveau concernant les créances antérieures des entreprises ?  

Le nouveau concerne l’application par la Caisse nationale de sécurité sociale à partir du 17 mars 2015 des dispositions de la décision du ministre de l’emploi et des affaires sociales et du ministre de l’économie et des finances, sur proposition du conseil d’administration de la Caisse nationale de sécurité sociale, portant sur la remise des pénalités de retard et des frais de recouvrement des cotisations sociales.

Cette mesure qui porte sur les arriérés de 2005 et antérieurs a pour but d’encourager les entreprises à redresser leur situation envers la Caisse nationale de sécurité sociale et s’étalera sur une période limitée à une année.
 

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