Démantèlement d’un réseau de traite d’êtres humains

Trois femmes se présentaient comme bienveillantes, promettaient des contrats de travail lucratifs et une vie meilleure dans le Golfe. Mais derrière les sourires et les fausses promesses, se cachait une machine bien rodée de manipulation et d’exploitation sexuelle.

Le mercredi 30 juillet, le soleil était au zénith à Rabat lorsque trois femmes ont franchi les portes de la Cour d’appel. Entourées de policiers, têtes basses, elles doivent comparaître devant le parquet général. Une femme d’une cinquantaine d’années, sa fille, ressortissante marocaine en Arabie Saoudite et une amie de la famille, âgée d’à peine vingt ans ; trois femmes unies par un lien criminel, à savoir celui d’un réseau de traite humaine.

Tout a commencé à l’aéroport international Mohammed V de Casablanca. Une jeune femme, vingtenaire, qui faisait l’objet d’une note de recherche lancée contre elle par la police judiciaire préfectorale à Rabat, est arrêtée lorsqu’elle s’est apprêtée d’embarquer à bord de l’avion à destination de l’Arabie Saoudite. En effet, cette jeune vingtenaire n’était pas une fugitive ordinaire, mais détenait les clés qui vont sauter les verrous d’une affaire qui était bien scellée, celle de traite d’êtres humains. C’est elle qui allait permettre aux enquêteurs de remonter les fils d’une toile tissée depuis belle lurette et qui fait l’objet de plusieurs plaintes portées par des victimes, toutes des jeunes femmes, souvent issues de milieux précaires, séduites par la promesse d’un avenir doré dans les pays du Golfe, la promesse d’être employées dans des métiers de la coiffure, de la cuisine ou de l’hôtellerie, honnêtes et bien payés. Seulement, une fois arrivées sur le sol promis, c’était un tout autre monde qui les attendait.

A Tiflet, Khemisset, Salé et à d’autres villes, cette jeune femme arrêtée à l’aéroport Mohammed V, la femme quinquagénaire et sa fille qui vit en Arabie Saoudite proposaient des contrats de travail. Si les deux premières assuraient l’intermédiation, la troisième se chargeait de recrutement après une conversation directe via WhatsApp. C’est elle qui rassurait les rêveuses d’une belle vie, leur promettait monts et merveilles, mais leur expliquait que rien n’est gratuit. Chaque candidate devra lui payer une somme de 50 mille dirhams où lui signe un papier de reconnaissance de dette, bien légalisé.

Seulement, à l’atterrissage, le rêve s’évaporait. Les passeports se confisquaient, même parfois les téléphones portables. Et les jeunes rêveuses se retrouvaient séquestrer, surveiller et exploiter sexuellement. Elles sont obligées d’accepter d’être livrées à un client soit sur la base d’un mariage temporaire, soit se prostituer simplement, sans qu’elles ne touchent le moindre sou. Car l’argent partait directement aux poches de la proxénète qui est installée en l’Arabie Saoudite arguant qu’elle devait rembourser la dette de 50 mille dirhams, les frais de voyage et d’autres charges. Bref, elles, les malheureuses, sont prises au piège, mais l’une d’elle est arrivée enfin de fuir et retourner au Maroc pour dénoncer ce réseau de traite d’êtres humains. D’autres victimes se sont manifestées ensuite pour que la machine policière soit mise en branle.
Les trois femmes sont maintenues en détention préventive par le parquet général près la Cour d’appel à Rabat qui les a mises ensuite entre les mains du juge d’instruction.