Provoqué à deux reprises par un repris de justice, cet employé perd tout contrôle de ses nerfs et le roue de coups. Il ne le relâche qu’une fois qu’il voit le sang couler de sa tête. Malheureusement le mal était fait.
C’est un jeune homme résigné et abattu qui se présente devant les trois magistrats de la chambre criminelle près la Cour d’appel de Casablanca. Cet employé de trente-et-un ans avoue sans détour son crime.
«J’ignore ce qui m’est arrivé ce jour-là, M. le président, pour commettre ce crime», déclare-t-il d’un ton triste tout en fondant en larmes. Le président lui demande de se calmer. Il lui accorde une pause de trente minutes.
Tous les témoins s’accordent à dire que le mis en cause, poursuivi en état d’arrestation pour coups et blessures ayant entraîné la mort sans l’intention de la donner, était un jeune homme sans problème, jouissant d’une bonne réputation, prêtait main forte à ses voisins du quartier et respectait tout le monde. Il donnait même aux enfants des cours de soutien bénévolement.
«Je regrette de l’avoir tabassé au point qu’il a perdu sa vie», s’exprime-t-il devant la Cour tout en affirmant qu’il n’avait nullement l’intention de le tuer.
Effectivement, les témoins affirment que le mis en cause venait de rentrer chez lui lorsque la victime a commencé à jeter des pierres en direction de la porte de son domicile tout en l’injuriant avec des mots obscènes et calomnieux. Les jeunes du quartier ont essayé de le calmer mais en vain. Au contraire, la victime, un jeune homme de vingt-deux ans, repris de justice, qui semblait être sous l’effet de la drogue, a repris de plus belle ses provocations.
«Licencié en économie, il est employé dans une entreprise et il vient, il y a quelques mois, de demander en mariage une de ses collègues», le présente son avocat de la défense tout en ajoutant que son client semble avoir perdu tout contrôle de ses nerfs. Autrement dit, le mis en cause a été provoqué par la victime, ajoute l’avocat de la défense.
Effectivement, la victime a commencé à traiter sa mère et ses deux sœurs de prostituées qui sont à la portée de tout le monde. Dans un état hystérique, il a ouvert la porte de son domicile et s’est jeté sur la victime. Il l’a tabassé sauvagement pour finir par lui cogner la tête contre le trottoir. Certes, les badauds ont tenté d’empêcher que l’irréparable se produise. Mais c’était trop tard puisque dans sa furie il ne l’a relâché qu’une fois avoir remarqué le sang couler de sa tête. La victime a rendu l’âme en route vers l’hôpital Ibn Rochd.
«Mon client, M. le président, a expliqué aux enquêteurs de la police judiciaire que le mobile principal de cet incident n’est autre que le harcèlement subi par sa fiancée», révèle l’avocat de la défense qui réclame de faire bénéficier le mis en cause des circonstances atténuantes.
Quant au représentant du ministère public, il s’est contenté de demander l’application de la loi. La Cour, après les délibérations, l’a finalement condamné à cinq ans de réclusion criminelle.