C’est en juin 2010 que Janane a perdu son père. Comme sa mère et son frère aîné, elle n’a pas pu retenir ses larmes. Elle a trop pleuré. C’était dur pour elle, à l’instar de sa mère et de son frère, de perdre celui qui travaillait pour subvenir à leurs besoins, celui qui l’aimait follement, celui qui ne pensait qu’à elle et son frère ainsi que sa mère, celui qui a consacré sa vie à eux, celui qui n’épargnait aucun effort pour les rendre heureux. Nous sommes au douar Laâouamer, dans la commune rurale Jakma Ouled Rahal, à Berrechid. C’est là que Janane a vu le jour le 1er novembre 1995, qu’elle a appris à marcher, à jouer avec ses petites voisines, à courir les champs agricoles et à prononcer les premiers mots. Mais Janane qui n’était pas une fille studieuse n’a pas appris à déchiffrer les lettres de l’alphabet , les mots et les phrases. Parce que ses parents ne l’ont pas conduite à l’école. Peut-être parce qu’ils n’avaient pas d’argent nécessaire pour se charger des fournitures scolaires. Peut-être parce que l’école était loin de chez eux. En fait, Janane ne faisait rien. Après la mort de son père, elle restait chez elle sans mettre les pieds dehors de son domicile. En conséquence, elle s’occupait des tâches domestiques. Août 2010. Depuis deux mois, Janane est orpheline de père. Sa mère, Fatiha, avait encore les vêtements du deuil. En fait, elles étaient encore sous le choc. Elles recevaient encore les condoléances des proches. Abdelhadi et ses parents sont-ils arrivés, ce jour de l’été, à présenter eux aussi leurs condoléances ? Peut-être oui. Mais, la mère, Fatiha ne les a jamais vus. Elle était certaine qu’ils n’étaient ni des membres de leur famille, ni des voisins ou encore des proches. Qui sont-ils ?
«Nous sommes venus pour demander ta fille en mariage», a affirmé la mère d’Abdelhadi, âgé de vingt-quatre ans. La mère de Janane les regardait sans dire le moindre mot. La mère d’Abdelhadi lui a expliqué que son fils Abdelhadi, était un jeune homme qui jouit d’une bonne réputation au douar El Fakra, dans la commune rurale Riah, à Berrechid, gagne dignement sa vie et qui rêve de partager son foyer avec Janane. Mais, elle n’a pas pris en considération le fait que la fille était encore mineure. Bref, elle était à son quinzième printemps. Un argument qui était sans importance même pour la mère de Janane qui semble être consentante. Aussitôt, Abdelhadi a commencé à préparer les documents nécessaires pour établir l’acte de mariage. Seulement, il a été informé qu’il devait avoir l’autorisation du juge de la famille puisque la fille est mineure et n’a pas atteint l’âge de se marier. Recourant au juge de la famille, celui-ci ne lui a pas autorisé le mariage avec Janane. Elle est retournée chez elle en attendant qu’elle atteigne l’âge légal pour se marier avec Abdelhadi. Seulement, celui-ci semble être impatient. Quelques jours plus tard, Abdelhadi et sa mère ont rejoint leur future belle-famille et ont demandé à Fatiha de permettre à sa fille, Janane, de les accompagner afin de lui acheter des effets vestimentaires. Fatiha n’a pas refusé. Elle leur a permis d’emmener sa fille. Aussitôt, Abdelhadi a conduit Janane chez son frère, demeurant à Casablanca. Chez lui, il l’a obligée à lui céder. Après, il l’a conduite ensuite à Berrechid pour la violer une seconde fois chez lui. Ensuite, il l’a conduite chez un gynécologue qui l’a examinée et a attesté que sa virginité avait été consommée. Et enfin, il l’a conduite chez sa mère pour lui affirmer que sa fille n’était plus vierge. Une plainte a été déposée par la mère de Janane. Les gendarmes de Nouasseur ont entamé une enquête judiciaire. Ils ont convoqué Abdelhadi et l’ont soumis aux interrogatoires. Il a nié être son violeur et a affirmé qu’elle entretenait des relations avec des jeunes de son douar.