Nous sommes à la chambre criminelle près la Cour d’appel de Casablanca. Au box des accusés, Farid et Abdellah se tenaient debout sans tourner leurs têtes vers l’assistance parmi laquelle se trouvaient les six victimes qui ont répondu à la convocation de la Cour. Accusés de vol qualifié, coups et blessures, ces deux repris de justice se disculpaient tout au long de l’examen de leur dossier. Tout au long de leurs interrogatoires, ils déclaraient ne jamais avoir agressé, maltraité ou menacé quelqu’un. Selon le procès-verbal dressé par la police judiciaire, ils ont perpétré plus d’une dizaine d’agressions à main armée à l’aide de couteaux. Leurs victimes n’avaient aucun intérêt à les accuser gratuitement. Qui étaient ces deux repris de justice ?
Farid est né en 1980 dans l’ancienne médina de la métropole économique. Après un parcours scolaire très court, de quatre ans, il a tourné le dos à l’école. Ses parents n’ont pas réussi à le convaincre de reprendre ses études, ne serait –ce que pour terminer la phase primaire. Dans son quartier, Farid avait de mauvaises fréquentations. Il avait appris tous les vices susceptibles de le jeter dans le gouffre de la délinquance. En commençant par les cigarettes, il a fini par le haschich et les comprimés psychotropes et parfois la colle à dissolution plus connue sous le nom de « Silicioune ». Sans emploi et issu d’une famille indigente qui ne peut lui fournir l’argent nécessaire pour sa consommation quotidienne de haschich et autres produits, il accompagnait de jeunes délinquants qui lui avaient appris les b.a.-ba des agressions. Au fil du temps, Farid était devenu un véritable professionnel. En quelques instants, il délestait sa victime de tout ce qu’elle avait sur elle. Pire encore, quand sa victime manifestait la moindre résistance, il n’hésitait pas à la maltraiter et la blesser avec un couteau qu’il portait toujours sur lui. Après avoir été arrêté une première fois, puis une deuxième fois, il avait rencontré Abdellah. Ce jeune homme, âgé de vingt-deux ans, avait déjà purgé deux peines d’emprisonnement ferme ; une première de trois mois et une seconde d’un an. Orphelin de père, il était resté entre les mains de sa mère qui déployait tous ses efforts pour prendre soin de lui et subvenir à ses besoins. Malheureusement, à son adolescence, il avait abandonné définitivement sa mère pour se jeter entre les bras des délinquants. Comme Farid, il avait commencé à consommer tout ce qui pouvait l’aider à oublier la réalité. Et par conséquent, il a commencé à agresser les victimes pour avoir de l’argent. Quand Farid et Abdellah ont été arrêtés, ils venaient d’agresser une femme qui passait, très tôt le matin, au boulevard Mohammed V à destination de l’établissement bancaire où elle travaille. Elle était, elle aussi, parmi les victimes qui avaient présenté leurs témoignages devant la Cour. Le duo, Farid et Abdellah, ont été condamnés à deux ans de prison ferme, assortis d’une amende de deux mille dirhams chacun.