Corruption
Un ingénieur et un technicien ont transformé un certificat administratif gratuit en source d’extorsion. Ils exigeaient un pot-de-vin pour délivrer le document indispensable au relogement.
A Aïn Harrouda, une ville située à dix-sept kilomètres au nord de Casablanca et relevant de la préfecture de Mohammadia, s’érigent les immeubles du grand projet de relogement des habitants qui s’inscrit dans le cadre du programme de lutte contre l’habitat insalubre. Les bénéficiaires attendent impatiemment d’entrer en possession de leurs nouveaux appartements. Pour ce faire, ils doivent d’abord obtenir, sans aucun frais, un certificat de fin de travaux, un document attestant de la conformité du bâtiment et aux normes exigées. Mais des rumeurs couraient faisant état que pour obtenir ce certificat, il fallait payer une somme de mille trois cents dirhams, ni plus ni moins.
Une somme qui sonnait comme un passage obligé, même pour ceux qui avaient scrupuleusement respecté toutes les règles. L’homme qui tenait les ficelles était un ingénieur architecte, chef d’un bureau d’études chargé par la Société d’aménagement de Zenata de superviser les chantiers. À ses côtés, un technicien, plus discret mais tout aussi impliqué, chargé d’approcher les bénéficiaires, de sonder leurs inquiétudes, de leur faire comprendre que sans «un petit geste» leur dossier risquait de traîner, voire d’être annulé. Mais, dernièrement une femme, l’une des bénéficiaires, a refusé de se taire.
Exaspérée par l’arrogance du technicien, elle a composé le numéro vert de la présidence du ministère public, celui qui sert à dénoncer les faits de corruption. Mobilisés, les gendarmes d’Aïn Harrouda ont alors tendu un piège à l’ingénieur et son complice. Tout a été minutieusement préparé : le rendez-vous, le lieu et l’argent. Le technicien, confiant, croyait conclure une transaction de routine. Alors qu’il s’apprêtait à toucher les 1.300 dirhams, les gendarmes ont surgi pour l’arrêter en flagrant délit. Quelques heures plus tard, au poste des gendarmes, il a craqué. Oui, il travaillait pour son supérieur. Oui, l’ingénieur savait tout. L’enquête a progressé rapidement. L’ingénieur a été convoqué, interrogé, puis arrêté à son tour. Devant le procureur du Roi de Mohammadia, les deux hommes ont tenté de minimiser les faits, mais les preuves parlaient d’elles-mêmes. Le juge d’instruction a ordonné leur détention préventive, avant qu’ils soient traduits devant la chambre correctionnelle près le tribunal de première instance.













