Les événements de la mi-décembre 1990 à Fès ont éclaté après l’appel conjoint de l’UGTM (Union générale des travailleurs marocains) et de la CDT (Confédération démocratique du travail) pour une grève générale de 24 heures à travers le pays, le vendredi 14 décembre 1990. De graves incidents avaient alors éclaté dans plusieurs villes marocaines avec un « pic » à Fès et notamment dans quatre quartiers périphériques : Aouinat Lhejjaj, Bensouda, Lemrinyine et Bab Ftouh.
Pour Mohammed Titna Alaoui, à l’époque premier responsable de l’UGTM à Fès, « il est difficile de dire comment tout avait commencé». L’actuel membre UGTM à la Chambre des conseillers affirme que son syndicat avait tout fait pour attirer l’attention sur une «situation intenable» dans une «ville ouvrière oubliée, écrasée sous le poids de l’exode rural et une actualité devenue presque quotidienne de fermeture des usines et entreprises». «J’en garde un souvenir d’amertume et je préfère tout oublier », ajoute Mohammed Titna Alaoui, détenu pendant plus de vingt jours avant d’être relaxé faute de preuves. Ce 14 décembre 1990, se souvient-il, il a été convoqué par Moulay Mehdi M’Rani, gouverneur de Fès et arrêté sur-le-champ.
Ledit gouverneur, selon Titna Alaoui, aurait aggravé la situation le jour de la grève. Les Fassis se souviennent qu’il a pris la décision de confier la conduite des bus de la Régie autonome de transport urbain à des éléments des Forces auxiliaires. Les tickets étaient fournis à l’oeil. Les déplacements auraient facilité l’embrasement. Car, le mot d’ordre des deux syndicats était de faire de Fès une ville morte et que chacun reste chez soi.
L’étincelle serait partie de Aïn Kadouss avec un policier qui tire sur la foule. Des tirs similaires sont attribués à la Gendarmerie royale à Bensouda. Samedi 15 décembre 1990, l’armée intervient, artillerie lourde et chars à l’appui pour ramener le calme.
A l’époque, les autorités donneront le chiffre de 5 morts et 130 blessés. Avant qu’une commission d’enquête dirigée par feu Maâti Bouabid ne rectifie les choses et parle de 40 morts. L’IER, le 28 novembre 2005, a annoncé l’identification de 106 tombes appartenant aux victimes de ces événements et ce suite aux actions menées par un groupe d’investigation dirigé par Abdelaziz Bennani, l’ex-patron de l’OMDH. Les travaux de cette équipe ont abouti à l’identification de 106 tombes dont les 99 du cimetière de Bab El Guissa. Les sept autres tombes appartiennent à des victimes non identifiées enterrées au cimetière Boubker Ben Larbi près de l’hôpital Khattabi. Des épitaphes ont été gravées sur ces tombes en présence des familles des victimes.