Fin de mission pour Ahmed Lekhrif. Sa Majesté le Roi Mohammed VI a congédié, lundi, le secrétaire d’Etat auprès du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération. Selon un communiqué relayé par la MAP, la décision royale intervient dans un contexte où, « le gouvernement de Sa Majesté le Roi a appris que, depuis plusieurs mois, les autorités espagnoles accordaient la nationalité espagnole à plusieurs responsables marocains » et que «cette procédure serait justifiée par la responsabilité de l’Espagne vis-à-vis des régions du Royaume du Maroc alors sous protectorat espagnol». Ahmed Lekhrif fait partie des hauts responsables marocains ayant obtenu la nationalité espagnole, à ceci près que ce dernier avait acquis cette nationalité alors qu’il avait été nommé secrétaire d’Etat auprès du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération. «La nationalité espagnole de M. Lekhrif pose plus d’un problème, à plus forte raison le poste particulier qu’il occupe en tant que secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères du Royaume du Maroc», explique un observateur. «Les autorités espagnoles ont lancé courant 2008 à Laâyoune une vaste opération visant à octroyer la nationalité espagnole à des Marocains d’origine sahraouie nés sous l’occupation espagnole du Sahara marocain», rappelle la même source. Cette procédure se base sur une jurisprudence prononcée par un tribunal madrilène qui a estimé que le fait d’être né sous l’occupation espagnole du Sahara marocain accorde le droit à la nationalité espagnole. Il s’agit d’une aberration, estime-t-on du côté des juristes marocains, puisqu’il s’agit d’une première au niveau international. «Tous les ressortissants des pays anciennement colonisés pourraient, en se basant sur la logique employée par les juges espagnols, demander la nationalité du pays qui colonisait leur territoire», explique un juriste marocain.
D’autre part, il est à signaler que l’usage diplomatique au Maroc veut que les responsables des Affaires étrangères n’aient pas une double nationalité. «Un responsable marocain, qui occupe un poste dans un département de souveraineté, soit le ministère des Affaires étrangères, est censé avoir uniquement la nationalité marocaine», précise un spécialiste des affaires diplomatiques.
Ahmed Lekhrif, que SM le Roi avait nommé fin 2007 secrétaire d’Etat auprès du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, est né en 1953 à Smara. Après des études primaires à Smara et secondaires à Laâyoune, M. Lekhrif a fait un détour par Madrid où il décroche en 1976 une licence en philosophie (Université Complutense). De 1976 à 1978, il a exercé en tant que professeur de langue espagnole (deuxième cycle) à l’école « La Paz » relevant de la mission culturelle espagnole à Laâyoune. De 1978 à 1986, il a occupé le poste de directeur d’un établissement scolaire à Laâyoune avant d’être nommé délégué régional du ministère du Tourisme dans la même ville jusqu’en 1997. M. Lekhrif a été élu en 1983 vice-président du conseil municipal de Laâyoune, puis membre de la Chambre des conseillers en 1997, membre de la commission des relations extérieures et de la défense et vice-président du groupe d’amitié maroco-espagnol au sein de la même Chambre. S’agissant de son activité partisane, M. Lekhrif est membre du conseil national et du comité central du parti de l’Istiqlal, parti du Premier ministre Abbas El Fassi. Originaire des provinces du Sud du Royaume, M. Lekhrif est également membre du Conseil royal consultatif pour les affaires sahariennes (Corcas). Il était chargé au département des Affaires étrangères du volet académique du dossier du Sahara, marquant son passage par des participations à des conférences internationales sur la question de l’intégrité territoriale du Maroc.