Azzouz Awane : La publication de ce projet de loi revêt une extrême importance à nos yeux. C’est une victoire, un soulagement pour notre association et toutes les victimes des morsures de chiens. Nous avons, dès la création de notre association en 2008, appelé à l’adoption d’une telle loi qui protège les personnes des dangers des chiens et met fin à un vide juridique qui laissait les coupables dans l’impunité. Le combat de notre association est passé par plusieurs étapes. Nous avons en janvier 2011 réussi à collecter près de 15.000 signatures de personnes. Il y a aussi eu une circulaire de l’ancien ministre de l’intérieur, Chakib Benmoussa, qui interdit les chiens dangereux, mais celle-ci n’a pas été appliquée. Il y a eu quelques propositions, notamment celle du député Faouzi Chaâbi qui contenait 52 articles, ainsi que la nôtre qui proposait 27 articles. Aujourd’hui nous sommes heureux de voir que les dispositions de notre proposition de loi convergent avec celles du projet de loi 56.12. Nous espérons que cette loi entrera bientôt en vigueur.
Quels sont les cas recensés par votre association?
Les cas sont nombreux et chaque jour la presse relaye des faits divers causés par des chiens. Je cite le récent cas d’un policier à Beni Mellal qui a été obligé d’utiliser son arme à feu pour neutraliser le chien d’un trafiquant de drogue sur le point d’être arrêté. Aussi celui à Salé d’une femme âgée qui a péri de morsures causées par les chiens de son petit-fils. Notre association a été contactée par les parents d’un enfant de 4 ans dont les cordes vocales ont été déchirées par un rottweiler. Il y a aussi une femme qui a été violée par un délinquant la menaçant avec son chien. Nous avons été contactés par un homme qui a perdu ses organes génitaux. Les cas graves sont nombreux et souffrent souvent d’un manque de reconnaissance et de soutien dû au vide juridique et à l’impunité des coupables. Et à ce jour, ces chiens dangereux sont vendus en toute liberté chaque dimanche dans plusieurs marchés, notamment celui de «Laqriâa» à Casablanca.
Votre fille a aussi été victime de l’attaque d’un chien en 2008. Pouvez-vous nous parler de son cas et de l’évolution de sa situation aujourd’hui?
Le 27 janvier 2008, alors qu’elle jouait avec des patins à roulette dans notre quartier (Islan à Casablanca), Najwa, ma fille, a été attaquée par le chien d’un voisin. Elle avait à peine 9 ans. Elle a dû subir une série d’opérations, dont quelques-unes non dénuées de complications et de fautes médicales. Les conséquences étaient graves. Six mois après, les médecins ont été dans l’obligation d’amputer sa jambe, ceci sans parler d’un retard de deux années dans sa scolarité. Plus tard, Najwa a participé à une émission de la télé andalouse à la suite de laquelle elle a été prise en charge par une association espagnole qui lui assure chaque année un voyage pour l’installation d’une prothèse. Aujourd’hui Najwa a 14 ans. Malgré les contraintes, elle réussit à surpasser cette épreuve grâce notamment à son intelligence, sa force mentale, sa joie de vivre. Ceci, en plus d’un accompagnement psychologique adéquat ainsi qu’un soutien sans faille de sa famille. Aujourd’hui ma fille vit normalement, elle est brillante dans ses études, fait de la musique, du théâtre. Je suis fier d’elle, j’attends beaucoup de choses d’elle.