Le projet de réforme de l’audiovisuel semble sortir enfin de l’ornière et se mettre sur la voie législative qui devrait lui donner corps. De toutes parts on est tenté de dire : Enfin! Mais, les difficultés de mettre en oeuvre une telle réforme sont multiples et s’enchevêtrent. Elles sont, premièrement, d’ordre politique. Ici comme ailleurs lorsqu’on parle de champ audiovisuel, on pense d’abord et avant tout à la télévision. Parce qu’elle est la plus visible, parce qu’on lui prête tellement et parce qu’elle «rend fou» tout simplement. Dans les circonstances de l’alternance politique d’il y a quatre ans, la télévision a suscité à la fois des appétits, des controverses, des appréciations et des chamailleries, souvent excessives. Larbi Messari, dans son approche consensuelle d’ancien secrétaire général du Syndicat national de la presse marocaine où tout le monde lui reconnaît un talent et une compétence certaines, n’a pas pu recueillir autour de ses avant-projets visant la réforme de l’audiovisuel national l’adhésion et les soutiens politiques qu’il fallait, y compris parmi sa propre famille politique.
Ultérieurement, on se rendra compte que le travail de défrichage, de concertation tous azimuts et de collecte des expertises fait sous l’autorité du prédécesseur de Mohamed Achâari, a permis de mieux investir dans la méthode et d’avancer dans la réflexion de manière décisive.
Si, jusqu’à présent le projet de réforme n’est connu que dans ses grandes lignes et par oui-dire (ce qui est un grand paradoxe s’agissant d’un projet dédié à l’information et à la communication), il s’agit de la mise en oeuvre concrète du dispositif juridique d’un grand chantier sur lequel le gouvernement Youssoufi s’était beaucoup engagé et qui tient réellement à coeur au premier ministre qui l’a rappelé récemment encore dans son entretien à un quotidien étranger. Cet attachement s’explique par la prise de conscience chez tous les responsables que le champ audiovisuel ne peut être maintenu, sous quelque prétexte que ce soit, hors de l’évolution des institutions du pays et de ses mécanismes économiques. Le secteur est à la fois une butte témoin et un laboratoire où les ambitions de modernité, de diversité, d’initiative privée et de créativité doivent trouver un champ de déploiement et d’épanouissement. Les débats et propositions constructives qui ne manqueront pas d’accompagner la mise en oeuvre de ce chantier traduiront aussi l’état d’esprit dans lequel la classe politique dans son ensemble aborde la grande question de la place des médias dans la vie d’une nation.