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Cadrage : Délicat

Lorsque les parents de la petite Loubna, victime d’un crime abject, récemment à Oujda, ont découvert une partie de leur chair, froissée et sacrifiée sur l’autel d’un appétit monstrueux, ils ont dû, et ils doivent encore, en vouloir à la terre entière et surtout à l’auteur de ce forfait innommable. Ils doivent certainement ressentir la haine et nourrir un fort sentiment de vengeance et de revanche à l’endroit du criminel et appeler de leur tréfonds meurtri tous les maux et toutes les foudres de la justice des hommes et de Dieu sur la tête de l’auteur de leur calvaire. Ils ne peuvent certainement pas lui souhaiter moins que la mort. Voilà, le mot est lâché.
Les envies de faire payer le criminel qui a osé porter la main et la souillure sur l’innocence d’un brin de fille sont tout à fait compréhensifs et rien ne peut ni excuser, ni justifier un crime aussi monstrueux, comme de nombreux autres crimes qui se surpassent en horreur et en révulsion.
Mais, justement il ne s’agit certainement pas pour nous, dans ce dossier délicat et sensible à l’extrême, de justifier quoi que ce soit, ni de pardonner, ni de trouver des excuses à un quelconque crime. Il n’est pas non plus dans notre intention de nous substituer à la justice ou de peser sur son cours d’une quelconque manière.
En posant le problème de la peine de mort et en souhaitant ouvrir le débat sur cette question, délicate et sensible au plus haut degré, nous voulons d’abord dire qu’on ne pourra pas faire l’économie de la réflexion et de la discussion sur un sujet aussi capital. Dire que la différence réside justement entre, d’une part, la réaction instinctive, affective, passionnée et revancharde, d’un individu, d’une famille, d’un clan, à la limite, et d’autre part, celle d’une société organisée, régie par des règles, dont la plus noble et la plus majestueuse est celle de la justice.
Celle-ci, malgré ses imperfections et ses défaillances, symbolise l’accès d’une communauté à une forme d’organisation qui aide, entre autres, à maîtriser et à réguler les rapports entre les uns et les autres, y compris lorsqu’ils atteignent des extrêmes de haine et de confrontation, et à mettre en place des dispositifs de répression, de punition et de châtiment proportionnel au délit et au crime commis.
Or, la discussion sur la peine capitale est un débat qui va au-delà de la justice et pose le problème de la dignité humaine, qui est niée au sens absolu du terme, lorsqu’une société accepte de donner la mort, sciemment, avec des moyens et des instruments légalisés et ritualisés. Au Maroc où le débat sur la dignité du citoyen est posé avec acuité, y compris en milieu carcéral où se déroule actuellement une vaste campagne de sensibilisation et de réhabilitation de cette dignité, le débat sur la peine de mort s’inscrit dans le droit fil de la responsabilité vis-à-vis des valeurs humaines d’une société. Lorsque celle-ci accepte passivement de faire de l’administration de la mort un instrument de justice humaine, elle prend le risque de nier une partie de son humanité.

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