à Bachkou, l’un des plus anciens et célèbres bidonvilles de la capitale économique, les baraques résistent toujours. Les plans de relogement tombent à l’eau, étonnamment, l’un après l’autre. Aspirant depuis des années à une vie digne, une partie des habitants de «Kariane Bachkou» se trouve toujours contrainte de vivre dans des habitats insalubres et ne comprend pas les raisons du blocage que connaît actuellement leur situation. Indignés, des habitants de ce bidonville se posent de plus en plus la question légitime de savoir où réside le problème? Qu’est-ce qui empêche d’aller de l’avant dans les plans mis en place au fils des années pour en finir, une fois pour toutes, avec ce véritable «point noir» du tissu urbain casablancais ? En réalité, des dizaines de dossiers à «Kariane Bachkou» sont toujours bloqués. D’abord, il y a le problème des familles qui vivaient ensemble dans la même baraque et qui revendiquent aujourd’hui le droit légitime d’avoir des logements séparément. Ensuite, il y a un cas encore plus injuste. Il s’agit des commerçants qui exercent dans des locaux patentés du bidonville et ce depuis plusieurs années. Aujourd’hui, ils ne savent plus à quel saint se vouer. «Ces commerçants se trouvent d’un seul coup privés de leur gagne-pain. Comment se fait-il qu’on les laisse aujourd’hui livrés à leurs propres sorts ?», se demande un habitant du bidonville. Pour résoudre ces deux dossiers épineux de «Kariane Bachkou», une commission d’arbitrage a été mise en place par l’ex-gouverneur de la préfecture d’arrondissements de Casablanca-Anfa, Khalid Safir. Cette commission d’arbitrage avait pour mission principale de régler cette injustice et liquider les dossiers bloqués. Toutefois, avec la nomination, début janvier, de Khalid Safir au poste de secrétaire général du ministère de l’Economie et des Finances, la commission a été annulée. Et c’est ainsi donc que l’affaire a pris un tournant judiciaire avec un recours aux tribunaux pour reloger les bidonvillois. Des atermoiements à n’en pas finir dans la gestion de ce dossier qui montrent et démontrent que les raisons derrière cette situation se situent à un autre niveau. Selon des observateurs, la source du blocage est d’ordre purement politique. «La source du blocage se rapporte probablement à une affaire de règlement de compte politique envers le parti de l’Istiqlal», explique une source proche du dossier. Ce constat n’a rien d’étonnant, étant donné que trois Istiqlaliens, et non des moindres, sont directement concernés par le dossier de «Kariane Bachkou». Il s’agit d’Ahmed Kadiri, président de l’arrondissement de Maârif, Yasmina Baddou, députée de la circonscription d’Anfa et Taoufik Héjira, ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme. Selon la même source, certaines parties chercheraient, en bloquant les plans de relogement à Bachkou, à faire comprendre aux Casablancais que le parti de l’Istiqlal, à travers ces trois responsables qui s’occupent de la gestion des affaires locales dans cette partie de la ville de Casablanca, est incapable de régler leurs problèmes. Le malheur dans l’histoire de ce bidonvillle c’est que face à cette situation de blocage, ce sont les attentes et les aspirations légitimes des habitants des Carrières Bachkou qui sont sacrifiées sur l’autel des petits calculs de politique politicienne.
L’extravagante plainte d’Al Omrane Au moment où tout le monde sait que le bidonville de Bachkou fait l’objet d’une opération de délogement à l’amiable dans le cadre du projet «Villes sans bidonvilles», le Groupe immobilier public Al Omrane semble ne pas être au courant de l’existence de gens résidant sur ce terrain alors que c’est lui qui s’est chargé de les reloger. Dans la plainte déposée contre des habitants censés bénéficier de l’opération relogement, Al Omrane indique qu’il a été surpris de découvrir que des gens y habitent. «Le plaignant, propriétaire du terrain objet du titre foncier N° 3682/71 de la propriété dénommée «Bachkou-L’Etat»… et ce afin d’y réaliser un projet résidentiel sur hautes instructions royales… a été surpris de découvrir que des étrangers occupent ce terrain sans fondement légal…», indiquent les plaintes déposées auprès du tribunal de première instance de Casablanca. Ainsi, le texte est d’abord abusif puisqu’il induit en erreur la justice en affirmant que le terrain était censé être vide alors qu’il est occupé par un bidonville depuis plusieurs décennies et, ensuite, en évoquant des instructions royales en les détournant de leurs objectifs. Car, les instructions du Souverain adressées au Groupe Al Omrane sont essentiellement de «reloger les habitants des bidonvilles dans des habitations dignes» et non pas de «construire un projet résidentiel» en expulsant les gens à travers des procès sous motif d’instructions royales. Tout le monde connaît la Haute sollicitude dont SM le Roi entoure les couches défavorisées et nul ne peut tolérer de tels abus de la part de ceux qui sont chargés de la mise en œuvre du programme «Villes sans bidonvilles». |