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Driss Chouika : «Le cinéma a toujours été au-dessus des courants politiques»

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ALM : Des observateurs voient dans le dernier décret du ministère de la communication une occasion pour les islamistes d’imposer leur vision pour un art propre. Qu’en pensez-vous?
Driss Chouika : Le texte en soi n’évoque pas expressément le terme «d’art propre» ou «conforme au précepte de l’Islam». Objectivement, il n’y a ni directive ni mesure qui tendent vers une telle vision du cinéma. Il s’agit d’un décret général qui reconduit le plan d’aide, et comprend les mesures réglementaires pour permettre le développement du cinéma national. Toutefois, derrière tout texte juridique, il y a les auteurs et leur intention politique. A ce niveau, la tentation de promouvoir un art propre pourrait exister. Mais, je tiens encore une fois à préciser que le dernier décret adopté par le ministère de la communication a été élaboré de manière collégiale et les professionnel y ont pris part, et plusieurs des mesures et amendements qu’ils ont proposés notamment ceux de la chambre de production de film dont je fais part ont été retenus.

L’application du texte ne risque pas de favoriser cette tendance qu’on souhaite imposer aux cinéastes ?
Le plus important reste à venir. Parce qu’on attend toujours comment ce texte va être appliqué, les conditions qu’il imposera, notamment après l’élaboration du cahier des charges par le CCM. Et c’est là que les choses peuvent se compliquer. Et puis aussi c’est vrai que c’est le ministre qui nomme les membres des commissions de sélection de films. Cela peut quelquefois influencer le choix des films, mais il faut dire que la nomination à ces commissions se fait sur propositions des membres des chambres des professionnels regroupées par le CCM. Et les professionnels sont déterminés à défendre leurs acquis.

Dernièrement, le long métrage  «Un film» de Mohamed Achaour s’est vu refuser les recettes après production par la Commission d’aide à la production cinématographique nommée par le ministre de la communication. Qu’en pensez-vous?
Effectivement c’est un film qui a été produit grâce aux fonds et ressources propres du réalisateur. La commission d’avance sur recette a toujours eu pour tradition d’encourager de tels films, dont les réalisateurs qui s’autoproduisent. Mais cette fois, si nous avons été surpris de voir que le film de Mohamed Achaour, ainsi que celui de Mohamed Karat n’aient pas bénéficié de soutien. C’était une première, et nous avons en tant que professionnels relevé cette aberration au ministère et au CCM. Parce que tout film a son public et a par conséquent le droit d’être encouragé. On ne va quand même pas demander à tous les réalisateurs de faire le même film, la diversité est ce qui distingue notre cinématographie et elle doit être encouragée. Hélas nous avons vu dans une telle sanction une décision arbitraire et les prémices d’imposer une vision du cinéma qui n’est pas partagée par tous.

Au final, est-ce que les craintes qu’avaient les professionnels dès l’accès du PJD au gouvernement se sont-elles dissipées ou confirmées aujourd’hui ?
Les craintes que les professionnels avaient au début se sont dissipées grâce à leur présence effective. Aujourd’hui, le secteur ne craint rien tant que cinéastes, critiques, journalistes défendront le cinéma et ses acquis. Le cinéma c’est un moyen de promouvoir la culture et l’image du pays. Le cinéma a toujours été au-dessus des courants politiques. Un film comme «Derb El Foukara» de Mohamed Regab n’était pas du goût du pouvoir politique lors de sa parution, cela ne l’a pas empêché d’exister, et d’être un pionnier en ce qui concerne les films traitant la thématique des années de plomb.

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