Philippe Troussier devrait avoir plein de gens qui lui envieraient son nouveau statut et surtout ses pantagruéliques émoluments et autres avantages gracieusement concédés par notre si généreuse fédération de football. Nos ministres en premier lieu appelés à gérer des tas de dossiers, y compris leur chef qui s’est engagé dans un long et harassant processus de négociations avec les centrales syndicales du pays. Le tout pour des indemnités qui ne représentent rien face à celles auxquelles a droit Philippe Troussier. L’heureux élu de la Fédération de football a droit à un salaire mensuel de 42.000 euros sans parler d’une multitude d’avantages en nature, déplacements et autres indemnités. Il a eu, en plus, les mains libres pour le choix de son staff technique de 21 intervenants marocains, mais français également. Dans le lot, on retrouve un médecin et un kinésithérapeute dont les services seront facturés 500 euros par jour chacun hors frais de déplacement et d’hébergement.
Il est vrai, nous dira-t-on, que partout dans le monde, le sélectionneur national a droit à tous les honneurs y compris sonnants et trébuchants. Sauf que, au Maroc, le jeu ne semble pas valoir la chandelle, une telle débauche de moyens. La raison est toute simple : M. Troussier a été engagé à prix d’or, mais sans que lui soient fixés des objectifs à atteindre. D’ailleurs, il n’y en a pas. La Coupe d’Afrique des Nations 2006 ? L’Equipe nationale aurait pu y aller sans lui.Le retour sur investissement, notion précieuse en économie, a été ignoré. De manière flagrante.
Le football national, lui, a d’autres enjeux : réussir une mise à niveau qui traîne depuis des décennies. Avec les 280 millions de dirhams consentis aux termes du contrat-programme pour le football, l’on n’est encore pas sortis de l’auberge. Etalé sur cinq ans, ce budget est alloué à la fois aux équipes, à la formation et aux infrastructures. Vaste chantier dont on ne risque pas de voir le bout de sitôt.
En attendant, l’on aura toujours droit à un football national à deux vitesses. Une Equipe nationale qui a tout, qui obtient tout et un championnat amateur où, à part deux équipes, des clubs galèrent pour joindre les deux bouts. Un déplacement du Nord au Sud du Maroc est souvent synonyme d’un grand sacrifice.
Un pays aux ressources limitées, et surtout au football amateur, ne peut pas se permettre l’adoption d’une telle approche généreuse à en devenir naïve. Ce n’est pas par quelque populisme à deux sous, mais c’est la réalité que nul ne pourrait nier. On dépense pour avoir plus que ce qu’on a. Le strict minimum ne devrait pas nécessiter une telle débauche de moyens. C’est le bon sens qui le veut. Est-ce que l’Equipe nationale qu’on a est à l’image de notre championnat ? Les professionnels nous disent que non.
Il est loin le temps où un Mohamed Jebrane et Hammadi Ahmidouch, aux commandes de l’Equipe nationale, avaient droit à 10.000 DH par mois à eux deux ! Ils avaient veillé aux destinées du Onze national qui s’est classé troisième à la CAN 1980. Avant de passer le témoin, et un précieux noyau dur, à Mehdi Faria pour Mexico 1986.