L’argentier du Royaume s’est attiré les foudres des syndicats en ouvrant le dossier des primes semestrielles des fonctionnaires du ministère des Finances. Motif : la décision de Fathallah Oualalou de soumettre à partir de juin 2006 leur octroi à un nouveau système d’évaluation et de notation supposé être plus rigoureux sans consulter au préalable la CDT , l’UMT et la FDT qui ont lancé en conséquence un mot d’ordre de grève pour le jeudi 8 décembre. Le ministre USFP semble avoir ouvert la boîte de Pandore à moins de trouver d’ici là un terrain d’entente avec les défenseurs des fonctionnaires qui réclament pour le moment l’annulation de l’initiative ministérielle et le maintien du statu quo. C’est-à-dire, continuer à accorder les primes selon l’appréciation de l’évaluateur du candidat, qui compte juste trois critères alors que le projet Oualalou met la barre très haut en instituant un barème de 0 à 100 points.
La première remarque qui vient à l’esprit c’est que les fonctionnaires des finances ont peur d’être évalués selon un système où ils risqueraient de perdre leurs droits acquis. Alors pourquoi changer un mode de fonctionnement administratif primant tout le monde de manière automatique et indépendamment du rendement et du mérite de chacun ? De quoi ont peur les protestataires ? De ne plus toucher la même somme d’argent dès lors que leur travail serait jugé sévèrement ou qu’ils soient à la merci de leurs chefs hiérarchiques, de leurs sautes d’humeur et d’une notation à la tête du client ? On peut bien sûr arguer de cette dernière hypothèse pour ne rien changer et laisser les choses en l’état. Mais le problème est beaucoup plus complexe que cela.
En fait, cette affaire de primes des finances, survivance du passé colonial, pèche par une iniquité qu’il faut corriger. Si la part annuelle du ministre peut atteindre près d’un million de Dhs contre 800.000 pour le secrétaire général, celle de l’agent d’exécution rivé en bas de l’échelle ne dépasse pas les 1500 Dhs. Sans oublier que ces primes de masse généreuses n’arrêtent pas de faire jaser dans nombre de ministères qui s’estiment beaucoup moins lotis que celui de Fathallah Oualalou. Ces disparités dans le revenu des fonctionnaires travaillant en plus pour le même gouvernement et le même pays sont visibles dans leurs trains de vie. Il est vrai que les ministères, adossés à des offices et établissements publics qui manipulent des fonds énormes, arrivent à se débrouiller pour distribuer des enveloppes aux uns et aux autres. Mais cela se fait de manière informelle loin de tout cadre organisé. Il est grand temps de mener une réflexion sérieuse sur ce dossier des primes et autres avantages touchés par une catégorie du personnel ministériel. L’objectif étant d’aboutir à la mise en place d’un nouveau statut de la fonction publique basé sur le mérite qui ferait que tous les fonctionnaires, quels que soient leurs ministères, soient égaux devant le service de l’État.