ALM : D’abord, quelles sont vos premières impressions sur le contenu du discours de SM le Roi et de ses initiatives sur la question des droits de l’Homme?
Salah El Ouadie : Il va sans dire qu’il s’agit d’un discours d’une importance capitale pour le développement de la démocratie dans notre pays et la consécration de l’Etat de droit et des libertés. Aujourd’hui, il n’y a plus d’amalgames ou de confusion en ce qui concerne le rôle de l’instance «Equité et Réconciliation», notamment en ce qui concerne la vérité et la justice. Sans ambages, SM le Roi vient de baliser le terrain à l’action de cette instance : «Nous demeurerons, dit-il dans son discours adressé, hier, à la nation, attaché à la clôture définitive de ce dossier en favorisant le règlement extra-judiciaire équitable, et en veillant à ce que les préjudices du passé soient réparés et les blessures pansées. Nous adopterons, à cette fin, une approche globale, audacieuse et éclairée, fondée sur l’équité, la réhabilitation et la réintégration, outre la volonté de tirer les enseignements qui s’imposent et d’établir les faits».
Qu’en est-il des prérogatives et attributions de l’Instance «Equité et Réconciliation» ?
Les tâches de cette instance sont claires maintenant. Il faut jeter la lumière sur les violations du passé et réhabiliter les victimes de ces violations. Dans le même ordre d’idées, il faudrait veiller à l’application des recommandations portant sur le règlement des dossiers concernant cette période. Mais, en même temps, il faut faire de ce passé une force pour l’avenir. «Notre objectif est que les Marocains se réconcilient avec eux-mêmes et avec leur histoire, qu’ils libèrent leurs énergies, et qu’ils soient partie prenante dans l’édification d’une société démocratique et moderne, gage de prévention de toute récidive», a réaffirmé, également, le Souverain dans son dernier discours. Les trois volets qui constituent la base de notre action concernent la vérité sur les violations graves du passé, la réhabilitation des victimes de cette période et leur réintégration dans la société et, bien entendu, la mis en lumière du sort des disparus.
Un communiqué du Palais royal a fait état d’une décision de grâce royale en faveur d’une trentaine de détenus. Quelle est votre première réaction à ce sujet ?
En effet, suite à une demande de notre instance, SM le Roi a accordé sa grâce royale en faveur d’une trentaine de personnes, dont des journalistes, comme Ali Lamrabet, condamné à trois de prison ferme, et des islamistes, dont Hakimi Belkacem, arrêté en 1985 dans la région d’Oujda pour port d’armes et qui avait adressé, il y a quelques mois une lettre au Souverain. Même des gens qui ont participé à l’assassinat du dirigeant socialiste Omar Benjelloun, en décembre 1975, comme Ahmed Saâd et Mustapha Khazzar. A ces deux groupes s’ajoutent bien entendu des anciens étudiants et des détenus appartenant à des organisations des droits de l’Homme.
Enfin, un mot sur les attentes exprimées dans ce domaine…
Je dirai que le véritable travail de notre instance ne fait que commencer. Nous allons donc entamer cette nouvelle phase avec optimisme et sincérité pour le règlement définitif du dossier des violations des droits de l’Homme, dont notamment la question des disparus.