ALM : Avec la libération des 404 prisonniers de guerre marocains, considérez-vous que le dossier est clos concernant cet aspect du conflit autour du Sahara Marocain ?
Moulay Ismaïl Alaoui : Je pense que c’est tout à fait normal que le Maroc considère que le dossier n’est pas clos. Il y a encore beaucoup de problèmes qui ne sont pas définitivement résolus dans la mesure où ils concernent les disparus.
Il y a grand besoin de fournir les explications nécessaires aux familles concernées. Une fois ces informations transmises aux familles des disparus, il faudra alors expliciter les responsabilités. En outre, je crois que la libération des prisonniers, essentiellement militaires mais aussi civils, ne met pas un terme au calvaire de nos concitoyens encore séquestrés dans les camps de Tindouf.
Les Etats-Unis ont joué un rôle important dans la libération des prisonniers de guerre. Pensez-vous qu’il s’agit d’un retour en force de la diplomatie américaine dans la région du Maghreb Arabe ?
C’est un constat. La médiation américaine a joué un grand rôle, mais il ne faut pas oublier qu’il y a eu également l’extraordinaire mobilisation pour sensibiliser l’opinion publique nationale et internationale au calvaire des plus anciens prisonniers de guerre dans le monde. Tout cela a fait que nos ennemis se sont vus obligés de les libérer. Cependant, il était indéniable que les Etats-Unis, vu les relations qu’ils entretiennent avec le Maroc et l’Algérie et le poids de leur diplomatie, ont joué un rôle important.
Plusieurs pays ont appelé à un rapprochement entre le Maroc et l’Algérie pour trouver une solution définitive au conflit. Comment voyez-vous un tel éventuel rapprochement ?
Je crois que si des négociations sont engagées de manière sérieuse entre le Maroc et l’Algérie pour apurer tous les contentieux entre les deux pays, cela ne peut être que bénéfique pour nos deux peuples et pour ceux du Maghreb. On y croit toujours, car c’est une nécessité économique, mais aussi politique.
Un Maghreb uni peut jouer un rôle extrêmement important dans le contexte de la mondialisation avec de grandes entités comme l’Union européenne, l’ALENA et un grand marché commun en chantier en Amérique latine. Il est quand même triste que nos peuples du Maghreb, qui se trouvent avoir les mêmes racines, qui partagent la même religion et les mêmes langues, continuent de vivre la désunion. Il est temps de démentir Ibn Khaldoun qui affirmait, dans un autre contexte, que «les Arabes se sont mis d’accord pour ne jamais se mettre d’accord».
Dans ce nouveau contexte, quel rôle, d’après vous, doit être celui du HCR ?
Pour moi, le Haut Commissariat aux Réfugiés a d’abord l’obligation de procéder à un recensement précis et exhaustif de tous ceux qui se considèrent comme originaires de l’ex-Sahara espagnol. Il y a un deuxième travail à faire par cet organisme et qui consiste à donner la possibilité aux personnes qui le voudraient de rentrer chez elles pour partager la vie et le sort des leurs dans le cadre d’un Maroc unifié et démocratique.
Régionalisé aussi ?
Quand je dis démocratique, cela englobe une démocratie élargie dans toutes ses dimensions, y compris la régionalisation.